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Prescription en droit français

- Wikipedia, 3/02/2012

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La prescription est un concept général de droit qui désigne la durée au-delà de laquelle une action en justice, civile ou pénale, n'est plus recevable. En conséquence, la prescription est un mode légal d'acquisition ou d'extinction de droits par le simple fait de leur possession pendant une certaine durée. Elle peut porter sur des droits réels ou personnels, mobiliers ou immobiliers.

La prescription ne s'applique ni au domaine public, ni aux dispositions des lois d'ordre public. Pour cette raison, les lois qui ne sont plus appliquées ne sont jamais abolies par désuétude. Les règles de prescription ne s'appliquent plus pour la recherche, la punition et l'indemnisation de crime contre l'humanité depuis 1994, date de promulgation du code pénal.

En matière civile, la durée de prescription de droit commun est passée de 30 ans à 5 ans depuis la loi no 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile. Cette durée s'applique lorsqu'aucun texte ne spécifie de durée différente (plus longue ou plus courte).

Sommaire

En droit civil

Le régime de la prescription civile en droit français a été modifié en profondeur par la récente loi no 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile[1].

Définitions

L'2219 du code civil définit la prescription extinctive comme : « un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps ». Au contraire de la prescription acquisitive qui selon l'2258 : « est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi. »

Le code civil distingue la suspension de la prescription, qui permet d'observer une pose dans les délais[2], de l'interruption, qui elle fait partir un noveau délai à zéro[3].

Prescriptions principales en matière civile

Délai général de prescription

De 30 ans à 5 ans

Jusqu'à la loi no 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile[1] le délai général de prescription en matière civile était de trente ans. La prescription était dite « trentenaire ». L'article ancien 2262 énonçait alors « Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi. »

Maintenant, c'est l'article 2224 du code civil qui réduit ce délai à 5 ans : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. ».

Point de départ de la prescription générale

Le délai court à partir du jour « où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». La jurisprudence devra préciser la définition « du jour où le titulaire d’un droit […] aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer » (article 2224 du Code civil).

Prescription acquisitive

Article détaillé : Prescription acquisitive.

La prescription acquisitive, ou usucapion est le fait d'acquérir juridiquement un droit du fait de l'écoulement du temps.

Prescription des titres exécutoires

La loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 prévoit aussi spécifiquement un délai de 10 ans pour la prescription des titres exécutoires, parmi lesquels se trouvent « Les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif ». Ce délai est prévu à l’article 3-1 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution (non codifiée) créé par la loi de 2008.

En outre, la loi pose aussi le principe d’un délai maximum à l’article 2232 du code civil : le report du point de départ, la suspension et l’interruption de la prescription ne peuvent avoir pour effet de porter le délai total de la prescription au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit sauf exceptions (par exemple, possession de certains titres exécutoires ou en cas d’interruption du délai par une demande en justice ou par un acte d’exécution forcée).

Prescription commerciale

Il existe aussi des délais plus court mais généraux dans d'autres matières du droit : en droit commercial, le délai est 5 ans comme le dispose l'article L.110-4 du code de commerce modifié par la loi n° 2008‑561 du 17 juin 2008[4].

Prescription : droit des assurances

En assurance le délai de prescription est de deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance d'après l'article L114-1 du code des assurances. Ce délai est porté à dix ans en cas d'assurance décès.

Calcul du délai

Point départ du délai

La prescription commence le lendemain (dies a quo) de la réalisation de l'infraction et se termine à J+1 de la prescription officielle (dies ad quem).

La détermination du début du délai de prescription se fait en fonction du type d'infraction. En cas d'infraction instantanée, c'est-à-dire se déroulant en un seul acte (exemple type : vol), le délai de prescription commence à courir le jour même de l'infraction (plus précisément le lendemain à 0 h ). En cas d'infraction continue, c'est-à-dire se déroulant dans la durée (exemple : enlèvement), la prescription court à partir du dernier jour de l'acte délictuel. En cas d'infraction d'habitude, c'est-à-dire se renouvelant (exemple : exercice illégal de la médecine), le délai court à partir de la découverte de l'infraction. Dans ce cas, l'infraction n'est constituée qu'à partir de la seconde commission de l'acte, et peu importe le délai écoulé entre ces deux moments.

De plus, la jurisprudence a reporté le délai de certaines infractions qui sont par essence dissimulées (abus de confiance, abus de biens sociaux), au jour où la constatation de l'infraction a été faite par la partie civile ou le ministère public.

Interruption et suspension du délai

La prescription n'est pas un acte inéluctable. Celle-ci peut être interrompue ou suspendue. En cas de d'interruption, un nouveau délai recommence à courir à compter de la date de l'acte interruptif.

Les actes interruptifs peuvent être : un acte d’enquête préliminaire, comme un procès-verbal ; un acte de poursuite, à l’initiative du parquet ou de la partie civile ou encore un acte réalisé par un juge étranger.

La suspension est plus rare. Elle signifie que le décompte du délai est temporairement interrompu, et reprend après. Cela résulte soit de la loi, soit d'une convention ou de la force majeure (art. 2234 Code Civil) Par exemple cas de guerre, des mineurs non émancipés et des majeurs en tutelle (art. 2235 Code Civil), de saisine d'autorités comme la commission de conciliation (art. 2238 du Code Civil) etc.. La jurisprudence a aussi établi des suspensions en cas d’obstacles de droit (question préjudicielle, appel, pourvoi, autorisation préalable (immunité parlementaire), détention à l’étranger si extradition impossible)[réf. nécessaire].

En droit pénal

En matière pénale, la prescription est variable, selon la qualification de l'incrimination. Ce qui peut aboutir à des situations particulières comme l'affaire Émile Louis[5] où celui-ci risquait la prison non pas en raison de meurtres qu'il avait avoués mais en raison d'une infraction continue : l'enlèvement.

En droit pénal français on parle de prescription de l'action publique et de la prescription des peines.

La prescription des peines

Article détaillé : Prescription des peines.

La prescription de la peine est le principe selon lequel toute peine, lorsque celle-ci n'a pas été mise à exécution dans un certain délai fixé par la loi à 20 ans pour les crimes, 5 ans pour les délits, 3 ans pour les contraventions (respectivement articles 133-22, 3 et 4 du Code pénal), ne peut plus être subie. Le délai commence à courir le jour où la condamnation devient définitive. Il peut être suspendu (peine avec sursis par exemple) ou interrompu (mesure d'exécution).

La prescription de l'action publique

La prescription de l'action publique est le principe selon lequel l'écoulement d'un délai entraîne l'extinction de l'action publique et rend de ce fait toute poursuite impossible. L'auteur d'une infraction ne pourra plus être poursuivi.

Délais généraux de prescription de l'action publique

Les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles.

Les autres crimes se prescrivent par 10 ans. Régie par l'7 du Code de procédure pénale pour les crimes[6], c'est-à-dire d'infractions punies d'une durée de réclusion criminelle, le délai de prescription est décennal.

En ce qui concerne les crimes, commis sur victime mineure, mentionnés à 7066code de procédure pénale et à 222code pénal, le délai de prescription est vingt ans et ne démarre qu'à la majorité de la victime.

Les délits se prescrivent par 3 ans. L'8, relatif aux délits c'est-à-dire d'infractions punies d'emprisonnement, énonce un délai général dit triennal[7].

Les contraventions se prescrivent par 1 an, c'est-à-dire les infractions punies par une amende uniquement, le délai prévu à l'9 est annuel[8].

Délais spécifiques de la prescription de l'action publique

Il s'agit de la prescription de la peine et de la condamnation, et non de l'action publique (au chapitre « de l'extinction des peines et de l'effacement des condamnations » du code pénal français) cf article 133-2 du code pénal.

Le délai de prescription est 20 ans pour les crimes, et 10 ans pour les délits ; pour un certain nombre d'infractions sexuelles graves perpétrées à l'encontre de mineur. Lorsque le délit ou le crime a été commis contre un mineur, la prescription ne court qu'à compter de la majorité de la victime. Le délai de prescription de l'action publique des crimes mentionnés à l'article 706-47 du présent code[Lequel ?] et le crime prévu par l'article 222-10 du code pénal, lorsqu'ils sont commis sur des mineurs, est vingt ans et ne commence à courir qu'à leur majorité.

Il en va de même, en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiant : le délai est 30 ans pour les crimes, et 20 ans pour les délits.

Les crimes contre l'humanité sont quant à eux imprescriptibles.

Calcul du délai

Par principe, le point de départ est le jour où l'infraction a été commise, le délai court à partir du lendemain de la commission de l'infraction à minuit.

Si l'infraction est continue, le délai commence à courir au jour où l'activité délictueuse cesse.

Pour les infractions d'habitudes, le délai court à compter du jour du dernier acte manifestant l'habitude.

Pour les infractions clandestines, qui sont non apparentes, la prescription ne court qu'à compter du jour où l'infraction a été découverte, dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique.

Pour les crimes et délits commis contre un mineur, le délai ne court qu'à sa majorité.

Suspension et interruption de la prescription

L'interruption du délai renvoie à la notion d'évènement interruptif : il s'agit de l'évènement qui efface le délai écoulé, un nouveau délai, identique, recommencera à courir après cet évènement. Les actes de poursuites et d'instructions interrompent la prescription : ce sont ceux par lesquels les autorités compétentes manifestent leurs volonté de poursuivre et engager la répression de l'infraction.

La suspension de l'infraction renvoie à la notion d'obstacle qui empêche le délai de prescription de courir. Une fois l'obstacle levé, le délai reprend son cours. L'obstacle peut être de fait (comme la destruction d'un document nécessaire), ou de droit (exigence d'un acte préalable, d'autres causes de suspension sont prévues par la loi (comme la composition pénale par exemple).

Les caractères de la prescription

Toutes les infractions sont prescriptibles, à l'exception des crimes contre l'humanité.

La prescription est d'ordre public. Elle peut être invoquée « en tout état de cause » (quel que soit l'avancement du procès), le délinquant ne peut renoncer au bénéfice de la prescription, la prescription doit être soulevée d'office par le juge.

Les fondements de la prescription en droit pénal français

La prescription de l'action publique n'est pas une généralité. Dans certains systèmes judiciaires les crimes de sang sont imprescriptibles.

La prescription pour les crimes de sang est régulièrement remise en cause par l'opinion publique lors de grandes affaires de meurtre[5],[9]. La prescription est expliquée par le fait qu'au-delà d'un certain délai le trouble causé par l'infraction disparaît, et que les preuves disparaissent avec le temps, donc surtout que le risque d'erreur judiciaire augmente. Certains arguent aussi que la perte du droit de poursuivre est la sanction de la négligence des autorités.

Origine des prescriptions spécifiques

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Certaines incriminations ont des prescriptions spécifiques : plus longues mais surtout généralement plus courtes.

Les crimes contre l'humanité et les génocides sont imprescriptibles en raison de la gravité des actes (ex. : affaire Papon).

En droit administratif

La loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics[10] fixe les bases de la prescription en matière administrative.

Selon la doctrine, la prescription administrative obéirait également aux dispositions du code civil[réf. nécessaire].

Contentieux administratif

La prescription est quadriennale, avec pour date de départ de son calcul le premier janvier de l'année suivant le dépôt du recours suivant l'article 1 de la loi du 31 décembre 1968[10].

Une jurisprudence récente de la Cour de cassation précise que la date de départ court au premier janvier de l'année suivant le dommage, et non pas l'année suivant la décision de justice prononçant l'indemnisation de celui-ci[11].

En droit fiscal

La prescription est trois ans, et court jusqu'au 31 décembre, à partir de l'année durant laquelle l'avis d'imposition est émis : par exemple pour l'impôt sur le revenu, la redevance audiovisuelle, l'impôt sur la fortune, les taxes foncières ou d'habitation.

Ces délais sont fixés dans le livre des procédures fiscales, aux articles L.169 à L.173[12].

En cas de fraude ou d'absence de déclaration[13], l'administration peut remonter jusqu'à six ans, voire dix[14].

Une demande réintérée dans les formes par l'administration fiscale interrompt la prescription[15].

Les collectivités territoriales bénéficient d'un délai de quatre ans pour recouvrer leurs créances[10].

Voir aussi

Notes et références

  1. a et b Loi n°2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, sur Légifrance.
  2. 2230code civil
  3. 2231code civil
  4. « I. - Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.»

    — L.110code de commerce

    .
  5. a et b Sophie Bouniot, « La prescription : " un droit d’oubli légal " », dans L'Humanité, 18 décembre 2000 [texte intégral (page consultée le 24 novembre 2008)]
    Commentaires sur l'affaire Émile Louis et la prescription pénale
     
  6. « En matière de crime et sous réserve des dispositions de l'article 213-5 du code pénal, l'action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis si, dans cet intervalle, il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite.

    S'il en a été effectué dans cet intervalle, elle ne se prescrit qu'après dix années révolues à compter du dernier acte. Il en est ainsi même à l'égard des personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte d'instruction ou de poursuite.»

    — 7Code de procédure pénale

  7. « En matière de délit, la prescription de l'action publique est de trois années révolues ; elle s'accomplit selon les distinctions spécifiées à l'article précédent.

    Le délai de prescription de l'action publique des délits mentionnés à l'article 706-47 et commis contre des mineurs est de dix ans ; celui des délits prévus par les articles 222-12, 222-30 et 227-26 du code pénal est de vingt ans ; ces délais ne commencent à courir qu'à partir de la majorité de la victime.»

    — 8code de procédure pénale

  8. « En matière de contravention, la prescription de l'action publique est d'une année révolue ; elle s'accomplit selon les distinctions spécifiées à l'article 7

    — 9code de procédure pénale

  9. Frédérique Fanchette, « Dix-huit ans après le meurtre, le pompier confondu par son ADN », dans Libération, 24 juin 2008 [texte intégral (page consultée le 24 novembre 2008)] 
  10. a, b et c Voir la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 sur Légifrance
  11. Cass. civ. n°09-16003 du 1er juin 2011, publié au bulletin
  12. Voir les articles L.169, L.170, L.171, L.172, L.173, du Livre des procédures fiscales sur Légifrance
  13. Cas de l'imposition sur la fortune.
  14. Par exemple lors d'une imposition sur le revenu
  15. Article L.189 du Livre des procédures fiscales.

Articles connexes

Sites internet


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