Les dispositions de la présente section s'appliquent aux interventions mentionnées à l'article L. 1333-1, réalisées en situation d'urgence radiologique ou résultant d'une exposition durable aux rayonnements ionisants, telles que définies aux articles R. 1333-76 et R. 1333-77 ou lors de la découverte d'une source radioactive orpheline.
Il y a situation d'urgence radiologique lorsqu'un événement risque d'entraîner une émission de matières radioactives ou un niveau de radioactivité susceptibles de porter atteinte à la santé publique, notamment en référence aux limites et niveaux d'intervention fixés respectivement en application des articles R. 1333-8 et R. 1333-80.
Cet événement peut résulter :
1° D'un incident ou d'un accident survenant lors de l'exercice d'une activité nucléaire définie à l'article L. 1333-1, y compris le transport de substances radioactives ;
2° D'un acte de malveillance ;
3° D'une contamination de l'environnement détectée par le réseau de mesures de la radioactivité de l'environnement mentionné à l'article R. 1333-11 ;
4° D'une contamination de l'environnement portée à la connaissance de l'autorité compétente au sens des conventions ou accords internationaux, ou des décisions prises par la Communauté européenne en matière d'information en cas d'urgence radiologique.
La situation d'exposition durable aux rayonnements ionisants est la conséquence soit des suites d'une situation d'urgence radiologique, soit de l'exercice, passé ou ancien, d'une activité nucléaire définie à l'article L. 1333-1 ou d'une des activités professionnelles mentionnées à l'article R. 1333-13.
Les interventions mentionnées à l'article L. 1333-1 concernent :
1° La source de rayonnement, afin de réduire ou d'arrêter l'émission de rayonnements et la dispersion de radionucléides ;
2° L'environnement, afin de réduire ou d'arrêter la contamination des personnes et des biens par des substances radioactives ;
3° Les personnes, afin de réduire ou d'arrêter l'exposition et d'organiser le traitement des victimes.
En situation d'urgence radiologique, le responsable de l'activité nucléaire dont l'exercice est à l'origine de la situation prend les mesures qui lui incombent en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, procède à une première évaluation des circonstances et des conséquences de la situation, met en oeuvre, le cas échéant, le plan d'urgence interne et informe immédiatement les autorités compétentes de la survenance de l'incident ou de l'accident.
Dans les conditions prescrites par les plans de secours mentionnés à l'article 15 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, le responsable de l'activité nucléaire dont l'exercice est à l'origine de la situation participe à la mise en oeuvre des actions de protection décidées par les pouvoirs publics, notamment en informant sans délai les populations avoisinantes du risque couru.
En situation d'urgence radiologique, le préfet se tient prêt à mettre en oeuvre des actions de protection de la population dès lors que les prévisions d'exposition aux rayonnements ionisants et leurs conséquences sanitaires dépassent les niveaux d'intervention définis par une décision de l'Autorité de sûreté nucléaire homologuée par le ministre chargé de la santé, et prise après avis de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et de l'autorité compétente pour les activités et installations nucléaires intéressant la défense.
Dans les conditions prévues à l'article R. 1333-81, le préfet décide de la mise en oeuvre de tout ou partie des actions de protection en appréciant notamment si le préjudice associé à l'intervention n'est pas disproportionné par rapport au bénéfice attendu.
Le préfet informe immédiatement la population de la situation d'urgence radiologique, du comportement à adopter et des actions de protection sanitaire applicables. Un arrêté des ministres chargés de la santé, de l'intérieur et de la sécurité civile, après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, précise les conditions d'information de la population ainsi que le contenu et la fréquence des messages.
Compte tenu des informations fournies par le responsable de l'activité nucléaire en cause ou par les services de secours, le préfet déclenche et met en oeuvre le ou les plans d'urgence prévus par la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs.
Il fait appel aux moyens d'évaluation mis à sa disposition par les départements ministériels compétents et les organismes placés sous leur tutelle, et par l'Autorité de sûreté nucléaire, tant au niveau local que national.
Ceux-ci lui fournissent, dans les meilleurs délais, les informations et les avis, notamment les informations concernant la répartition dans le temps et dans l'espace des substances radioactives susceptibles d'être dispersées et les expositions potentielles aux rayonnements ionisants en résultant pour les populations et les intervenants, lui permettant d'apprécier la situation et son évolution potentielle et de mettre en oeuvre les mesures appropriées de protection des populations et des intervenants.
Les expositions aux rayonnements ionisants sont évaluées selon les modalités définies en application de l'article R. 1333-10.
Le préfet dirige les opérations de secours et assure l'information des populations. Pour satisfaire aux obligations internationales en matière de notification, d'échange d'informations et d'assistance, il informe les ministres chargés de la sûreté nucléaire et de la radioprotection et l'Autorité de sûreté nucléaire de ses décisions. En liaison avec les départements ministériels concernés, il met en oeuvre, le cas échéant, les accords bilatéraux avec les Etats frontaliers.
Après toute situation d'urgence ayant entraîné un risque radiologique avéré pour la population, les conséquences de ce risque sont évaluées et enregistrées, notamment sous forme de bilans dosimétriques. Sont prises en considération les doses reçues par exposition externe et par incorporation pendant la durée de l'exposition, selon les modalités définies en application de l'article R. 1333-10.
L'efficacité de l'intervention est mesurée par différence entre ces bilans dosimétriques et les bilans analogues établis par les départements ministériels compétents et les organismes d'expertise placés sous leur tutelle en supposant une absence d'intervention. Ces bilans sont transmis pour avis à l'Autorité de sûreté nucléaire.
La présente sous-section vise en tant qu'intervenants les différentes catégories de personnels susceptibles d'être engagés dans la gestion d'une situation d'urgence radiologique telle que définie à l'article R. 1333-76 ainsi que toutes les personnes agissant soit dans le cadre de conventions avec les pouvoirs publics, soit dans le cadre des réquisitions prévues par l'article 17 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, sous l'autorité du directeur des opérations de secours, notamment au titre des plans d'urgence et de secours prévus par cette loi.
En vue de déterminer leurs conditions de sélection, de formation et de surveillance médicale et radiologique, les intervenants sont classés en deux groupes :
- le premier groupe est composé des personnels formant les équipes spéciales d'intervention technique, médicale ou sanitaire préalablement constituées pour faire face à une situation d'urgence radiologique ;
- le second groupe est constitué des personnes n'appartenant pas à des équipes spéciales mais intervenant au titre des missions relevant de leur compétence.
Les femmes enceintes ou allaitant et les personnes âgées de moins de dix-huit ans ne peuvent être intégrées dans les équipes du premier groupe. Lorsque le risque d'exposition aux rayonnements ionisants est avéré, les femmes enceintes ou allaitant et les personnes âgées de moins de dix-huit ans du second groupe sont exclues du périmètre du danger radiologique.
Les personnels appartenant au premier groupe font l'objet d'une surveillance radiologique et d'un contrôle d'aptitude médicale. Ils bénéficient d'une formation portant en particulier sur le risque associé à une exposition aux rayonnements ionisants. Ils disposent d'un équipement adapté à la nature particulière du risque radiologique lorsqu'ils sont engagés en opération.
Les personnes appartenant au second groupe bénéficient d'une information adaptée portant sur le risque associé à une exposition aux rayonnements ionisants.
Pour une intervention en situation d'urgence radiologique identifiée, des niveaux de référence d'exposition individuelle, constituant des repères pratiques, exprimés en termes de dose efficace, sont fixés comme suit :
- la dose efficace susceptible d'être reçue par les personnels du groupe 1, pendant la durée de leurs missions, est de 100 millisieverts. Elle est fixée à 300 millisieverts lorsque l'intervention est destinée à protéger des personnes ;
- la dose efficace susceptible d'être reçue par les personnels du groupe 2 est de 10 millisieverts.
Un dépassement des niveaux de référence peut être admis exceptionnellement, afin de sauver des vies humaines, pour des intervenants volontaires et informés du risque que comporte leur intervention.
La dose efficace intègre l'ensemble des doses reçues par exposition interne et externe. Elle est évaluée selon les modalités définies en application de l'article R. 1333-10.
Les personnels appelés à intervenir doivent bénéficier de protections individuelles et être munis de dispositifs dosimétriques appropriés.
En aucun cas la dose efficace totalisée sur la vie entière d'un intervenant ne doit dépasser 1 sievert.
Après toute intervention ayant présenté un risque radiologique avéré, un bilan dosimétrique individuel et une surveillance médicale des intervenants, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, sont effectués. Les résultats en sont remis à chacun d'entre eux et consignés dans leur dossier médical.
Les expositions antérieures sont prises en compte pour se prononcer sur l'aptitude de la personne à exercer les missions relevant de sa compétence en application des réglementations propres à chaque catégorie d'intervenant.
Un arrêté pris par les ministres chargés de la santé, du travail, de l'intérieur et de la sécurité civile, après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, précise les modalités d'application des articles R. 1333-84 et R. 1333-85. Il énumère les catégories de personnels relevant de chacun des deux groupes mentionnés à l'article R. 1333-84 et fixe le contenu des actions de formation ou d'information, leur durée, leur périodicité et l'organisme qui en a la charge ainsi que les conditions d'une surveillance radiologique et du contrôle d'aptitude médicale des personnels appartenant au premier groupe.
Le responsable d'une activité nucléaire ou d'une activité professionnelle, passée ou ancienne, à l'origine d'un cas d'exposition durable de personnes à des rayonnements ionisants, est tenu de mettre en place un dispositif de surveillance des expositions et de procéder à un assainissement du site selon des modalités arrêtées par le préfet. Il collabore à l'information des populations et à la mise en oeuvre des mesures de protection décidées par le préfet.
En l'absence de responsable connu ou solvable, les mêmes obligations peuvent être imposées au propriétaire du site.
En cas d'exposition durable de personnes aux rayonnements ionisants, le préfet met en oeuvre, après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, une ou plusieurs des mesures suivantes :
1° Délimitation du périmètre à l'intérieur duquel il est procédé à la mise en oeuvre de mesures pour réduire cette exposition ;
2° Mise en place d'un dispositif de surveillance des expositions et, si nécessaire, de surveillance épidémiologique des populations ;
3° Réglementation de l'accès ou de l'usage des terrains et des bâtiments situés dans le périmètre délimité ;
4° Restriction de la commercialisation ou de la consommation des denrées alimentaires et des eaux produites et distribuées à l'intérieur du périmètre délimité ;
5° Modalités de la prise en charge des matériaux contaminés.
Un arrêté des ministres chargés de la santé, de l'agriculture et de l'environnement, après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, détermine les niveaux de dose à partir desquels ces actions sont mises en oeuvre.
Le préfet informe sans délai la population concernée par un cas d'exposition durable sur le risque couru et sur les actions entreprises en application des alinéas précédents.
Pour apprécier la situation et son évolution à long terme et mettre en place les mesures énoncées à l'article R. 1333-90, le préfet bénéficie des moyens d'évaluation mis à sa disposition par les départements ministériels compétents et les organismes d'expertise placés sous leur tutelle, par l'agence régionale de santé et par l'Autorité de sûreté nucléaire. Ceux-ci lui fournissent toutes informations et avis utiles, notamment les informations concernant la répartition dans le temps et dans l'espace des substances radioactives dispersées et les expositions aux rayonnements ionisants en résultant pour les populations et les personnes susceptibles d'intervenir.
Les expositions aux rayonnements ionisants sont évaluées selon les modalités définies en application de l'article R. 1333-10.
Le préfet prend, s'il y a lieu, les contacts nécessaires avec les autorités des Etats frontaliers.
Dans les situations d'exposition durable, si les doses estimées le justifient, les intervenants bénéficient de la protection accordée par la réglementation en vigueur aux travailleurs exposés aux rayonnements ionisants.
Dans chaque département, le préfet, après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire et de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, détermine les modalités de prise en charge des sources radioactives orphelines susceptibles d'y être découvertes ainsi que les actions à mener pour faire face à des situations d'urgence radiologique dues à ces sources.
Les mesures définies par le préfet doivent être compatibles avec les prescriptions du plan national de gestion des matières et déchets radioactifs telles qu'établies par le décret prévu au III de l'article L. 542-1-1 du code de l'environnement.
Après mise en sécurité du site où a été découverte une source orpheline, le préfet procède à la recherche de l'identité du détenteur final ou du fournisseur. Après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire et, le cas échéant, de l'autorité compétente pour les activités et installations nucléaires intéressant la défense, il organise, en tant que de besoin, le transfert des sources radioactives orphelines vers un organisme autorisé à les recueillir, et fait appel aux conseils et aux moyens d'assistance technique mis à sa disposition par les départements ministériels compétents et aux organismes d'expertise placés sous leur tutelle.
Le préfet tient l'Autorité de sûreté nucléaire et, le cas échéant, l'autorité compétente pour les activités et installations nucléaires intéressant la défense informées des mesures qu'il compte prendre ou qu'il a prises pour assurer la mise en sécurité du site.
Les compétences attribuées au préfet par la présente section sont exercées :
1° Par le préfet du département du lieu concerné ;
2° Par le préfet de police à Paris ;
3° Par le préfet maritime en mer,
ou, s'il y a lieu :
a. par le préfet désigné comme directeur des opérations de secours par le plan de secours ;
b. par le préfet désigné à cet effet par le Premier ministre en raison de la nature et de l'étendue des risques.