Afin de garantir le droit au logement, le représentant de l'Etat dans le département peut réquisitionner, pour une durée d'un an au moins et de six ans au plus, des locaux sur lesquels une personne morale est titulaire d'un droit réel conférant l'usage de ces locaux et qui sont vacants depuis plus de dix-huit mois, dans les communes où existent d'importants déséquilibres entre l'offre et la demande de logement au détriment de personnes à revenus modestes et de personnes défavorisées.
La réquisition donne la jouissance des locaux à un attributaire, à charge pour lui de les donner à bail à des personnes bénéficiaires visées à l'article L. 642-5.
La réquisition ouvre le droit pour l'attributaire de réaliser des travaux, payés par lui, de mise aux normes minimales de confort et d'habitabilité. L'attributaire informe le titulaire du droit d'usage de la nature des travaux et de leur délai d'exécution ; il lui communique le tableau d'amortissement du coût de ces travaux.
Par dérogation au premier alinéa, lorsque l'importance des travaux de mise aux normes minimales de confort et d'habitabilité le justifie, la durée de la réquisition peut être supérieure à six ans, dans la limite de douze ans.
Les locaux régulièrement affectés à un usage autre que l'habitation peuvent, à l'expiration de la réquisition, retrouver leur affectation antérieure sur simple déclaration.
Les locaux détenus par les sociétés civiles constituées exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus ne peuvent faire l'objet d'une procédure de réquisition avec attributaire.
L'attributaire de la réquisition peut être :
1° L'Etat ;
2° Une collectivité territoriale ;
3° Un organisme d'habitations à loyer modéré ;
4° Une société d'économie mixte dont l'objet est de construire ou de donner à bail des logements ;
5° Un organisme bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 ou de l'agrément relatif à l'intermédiation locative et la gestion locative sociale prévu à l'article L. 365-4.
Les rapports entre l'Etat et les attributaires mentionnés aux 2° à 5° de l'article L. 642-3 sont régis par une convention ; le projet de convention d'attribution est notifié au titulaire du droit d'usage en même temps que l'intention de procéder à une réquisition de même que la liste des éventuels attributaires.
Les locaux sont donnés à bail aux personnes justifiant de ressources inférieures à un plafond fixé par décret et désignées par le représentant de l'Etat dans le département en raison de leurs mauvaises conditions de logement.
Le titulaire du droit d'usage sur les locaux réquisitionnés peut exercer un droit de reprise après neuf ans à compter de la notification de l'arrêté de réquisition, dans les conditions prévues par l'article L. 642-18.
Le représentant de l'Etat dans le département peut nommer des agents assermentés afin de l'assister dans la procédure de réquisition. Ces agents sont astreints aux règles concernant le secret professionnel. Ceux-ci peuvent :
1° Consulter les fichiers des organismes chargés de la distribution de l'eau, du gaz, de l'électricité, du téléphone, ainsi que les fichiers tenus par les professionnels de l'immobilier, en vue de prendre connaissance des informations strictement nécessaires à la recherche des locaux vacants, à la détermination de la durée de la vacance et à l'identification du titulaire du droit d'usage sur les locaux ;
2° Visiter, accompagnés le cas échéant d'experts, les locaux susceptibles d'être réquisitionnés ; le titulaire du droit d'usage donne son accord pour cette visite ; à défaut, celle-ci ne peut avoir lieu que sur autorisation du juge judiciaire.
Les services fiscaux fournissent au représentant de l'Etat dans le département les informations nominatives dont ils disposent sur la vacance.
Après avoir sollicité l'avis du maire, le représentant de l'Etat dans le département notifie au titulaire du droit d'usage des locaux son intention de procéder à une réquisition.
La notification indique les motifs et la durée de la réquisition envisagée. Elle est adressée au titulaire du droit d'usage par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Dans un délai de deux mois à compter de la notification, le titulaire du droit d'usage sur les locaux peut faire connaître au représentant de l'Etat dans le département :
1° Son accord ou son opposition ;
2° Son intention de mettre fin à la vacance dans un délai de trois mois au plus à compter de la notification ;
3° Son engagement d'effectuer les travaux nécessaires pour mettre fin lui-même à la vacance ; dans ce cas, un échéancier est soumis à l'approbation du représentant de l'Etat dans le département.
A compter de la réponse du titulaire du droit d'usage ou à l'issue du délai de deux mois et au plus tard quatre mois à compter de la notification de l'intention de réquisitionner, le représentant de l'Etat dans le département notifie au titulaire du droit d'usage sa décision, qui peut prendre l'une des formes suivantes :
1° Arrêté de réquisition motivé désignant l'attributaire et indiquant la durée de la réquisition qui ne peut excéder celle mentionnée dans l'arrêté visé à l'article L. 642-9 ;
2° Accord sur l'échéancier prévu au 3° de l'article L. 642-10 ;
3° Abandon de la procédure.
La notification de la décision est adressée au titulaire du droit d'usage par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Le titulaire du droit d'usage qui s'est engagé à mettre fin à la vacance justifie de l'exécution de son engagement sur la demande du représentant de l'Etat dans le département.
En l'absence de justification utile, le représentant de l'Etat dans le département peut notifier l'arrêté de réquisition.
A défaut de retour dans les dix jours de l'avis de réception de la notification, les notifications prévues aux articles L. 642-9 et L. 642-11 sont affichées à la porte des locaux.
A compter du retour dans les dix jours de l'avis de réception de la notification prévue à l'article L. 642-11 ou, à défaut, à l'expiration d'un délai de dix jours à compter de l'affichage, le représentant de l'Etat dans le département peut requérir la force publique pour entrer dans les lieux.
Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les sections 1 et 2 du chapitre II du titre VIII du livre III du code civil relatif au louage de choses sont applicables aux relations entre le titulaire du droit d'usage des locaux et l'attributaire.
A compter de la prise de possession, l'attributaire verse mensuellement une indemnité au titulaire du droit d'usage.
Cette indemnité est égale au loyer défini à l'article L. 642-23, déduction faite de l'amortissement du montant des travaux nécessaires et payés par lui pour satisfaire aux normes minimales de confort et d'habitabilité, et des frais de gestion des locaux. Lorsque le montant de l'amortissement des travaux et des frais de gestion est supérieur au loyer défini à l'article L. 642-23, aucune somme ne peut être perçue auprès du titulaire du droit d'usage.
Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de cet amortissement et du calcul des frais de gestion.
Le juge judiciaire fixe, le cas échéant, l'indemnisation par l'Etat du préjudice matériel, direct et certain, causé par la mise en oeuvre de la réquisition.
La transmission des locaux, à titre onéreux ou gratuit, n'affecte pas la réquisition.
Le titulaire du droit d'usage peut exercer le droit de reprise prévu à l'article L. 642-6 à condition d'avoir :
1° Adressé à l'attributaire un préavis d'un an ;
2° Indemnisé celui-ci, trois mois avant l'expiration du délai de préavis, du montant des travaux non amortis.
Le juge judiciaire connaît du contentieux des relations entre le titulaire du droit d'usage des locaux et l'attributaire de la réquisition.
Les conditions d'application des sections 1, 2 et 3 du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
Le bail, conclu entre l'attributaire et le bénéficiaire, est régi par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, sous réserve des dispositions de la présente section.
Le contrat de location est conclu pour une durée d'un an, ou pour la durée de la réquisition restant à courir si celle-ci est inférieure à un an.
Ce contrat ne comporte aucun dépôt de garantie ni caution simple ou solidaire.
Le loyer est déterminé en fonction du prix de base au mètre carré de surface habitable, fixé par décret.
Il est révisé chaque année en fonction de la variation moyenne de l'indice du coût de la construction et des indices des trois trimestres qui précèdent.
Il est payé mensuellement à terme échu.
Le bénéficiaire peut donner congé à tout moment, avec un délai de préavis d'un mois.
Le bénéficiaire ne peut céder le contrat de location ni sous-louer le logement.
Trois mois avant l'expiration du contrat intervenant avant la fin de la réquisition, le représentant de l'Etat dans le département peut proposer au bénéficiaire un autre logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités. Sauf motif légitime et sérieux, le bénéficiaire qui n'accepte pas l'offre de relogement est déchu de tout titre d'occupation au terme du contrat.
A défaut d'offre de relogement, le bail est reconduit pour une durée d'un an, ou pour la durée de la réquisition restant à courir si celle-ci est inférieure à un an.
Si, au plus tard trois mois avant la fin de la réquisition, le titulaire du droit d'usage et le bénéficiaire n'ont pas conclu de contrat de location, l'attributaire peut proposer au bénéficiaire qui remplit les conditions pour l'attribution d'un logement d'habitation à loyer modéré la location d'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités. A défaut d'une telle proposition, le représentant de l'Etat dans le département est tenu de proposer un logement au bénéficiaire aux mêmes conditions.
Le bénéficiaire qui n'a pas conclu de contrat de location ou accepté l'offre de relogement est déchu de tout titre d'occupation à l'expiration de la réquisition.
I. - Sont punis d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende :
1° Le fait de dissimuler, par des manoeuvres frauduleuses, la vacance de locaux ;
2° Le fait de détruire, dégrader ou détériorer des locaux ayant fait l'objet d'une notification d'intention de réquisitionner, dans le but de faire obstacle à une réquisition avec attributaire.
II. - (Abrogé).
III. - Le tribunal peut également ordonner que les travaux de remise en état seront exécutés aux frais du condamné.