Association cultuelle
- Wikipedia, 28/01/2012
La loi de Séparation des Églises et de l'État en 1905 institua en France (amputée à l'époque de l'Alsace et de la Moselle, où cette loi ne s'applique pas) des associations cultuelles dites aussi paroissiales ou parfois, dans certaines Églises, presbytérales, voire aujourd'hui associations islamiques.
Ces associations sont des associations à but non lucratif selon la loi de 1901, mais avec certaines limitations : objet cultuel exclusivement (donc pas d'entraide), membres seulement individuels (pas d'association membre), nombre minimum de membres, etc., et certains avantages, notamment fiscaux.
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Historique
La loi de 1905 a prévu ce type d'associations "pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte" ; elles remplissent certaines des missions auparavant assurées, pour les quatre cultes reconnus, par les établissements publics du culte constitués dans le cadre de la loi du 18 germinal an X (8 avril 1802). Il fallait en effet une entité privée à qui attribuer la part des biens mis à disposition ou propriété d'un établissement public du culte, pour ce qui concerne exclusivement l'exercice public du culte, notamment les lieux de culte, et qui puisse assurer l'exercice du culte notamment sous l'aspect matériel (entretien des lieux de culte, réception des dons, rétribution et formation des ministres...)
Le catholicisme refusa de créer les associations cultuelles prévues par la loi de 1905 (il créera plus tard des associations diocésaines). Le judaïsme garda ses structures passées. Les Églises protestantes constituèrent donc la très grande majorité des associations cultuelles, le modèle associatif présentant d'ailleurs des parallèles évidents avec leur système d'organisation traditionnel.
L'être et la mission de ces Églises ne s'épuisent cependant pas dans lesdites associations : elles ont dû constituer, en leur sein ou ensemble, d'autres associations uniquement de loi de 1901 qui leur permettent d'exercer notamment l'entraide et la Mission.
Régime juridique
Déclaration d'une association cultuelle
Toute association peut être déclarée en préfecture en tant qu'association cultuelle conformément à la loi du 9 décembre 1905, la République ne reconnaissant aucun culte. Le préfet pourra néanmoins engager a posteriori une action en nullité auprès du tribunal de grande instance, si l'association poursuit un objet illicite.
Valeur juridique du terme cultuel
Cependant le terme cultuel n'emporte pas de valeur juridique au moment de la déclaration de l'association. Comme l'a rappelé le ministre de l'Intérieur (responsable du Bureau central des Cultes) aux préfets[1], ce n'est que lorsque l'administration lui accorde le bénéfice d'avantages fiscaux[2], en tant qu'association cultuelle au sens de la loi de 1905, que son caractère cultuel est ponctuellement reconnu.
Conditions nécessaires
La jurisprudence administrative[3] a établi trois conditions à remplir pour qu'une association puisse être considérée comme cultuelle au sens de la loi du 9 décembre 1905 :
- Elle doit être consacrée à l'exercice d'un culte.
- Son objet doit être exclusivement cultuel. Il doit donc se limiter aux activités suivantes : la célébration de cérémonies organisées en vue de l'accomplissement, par des personnes réunies par une même croyance religieuse, de certains rites ou de certaines pratiques ; l'acquisition, la location, la construction, l'aménagement et l'entretien des édifices servant au culte, ainsi que l'entretien et la formation des ministres et autres personnes concourant à l'exercice du culte. Ainsi sont exclues les activités culturelles, éditoriales, sociales ou humanitaires, qui doivent éventuellement faire l'objet d'une autre association à but non lucratif (loi du 1er juillet 1901).
- Son objet statutaire comme son activité effective ne doivent pas porter atteinte à l'ordre public. La circonstance qu'une association ait fait l’objet de diverses condamnations pour des infractions graves et délibérées à la législation peut s'opposer au bénéfice du statut d’association cultuelle aux autres associations rattachées au même culte et exerçant leurs activités en étroite liaison avec celle-là[4]. En revanche, la seule qualification de "mouvement sectaire" donnée par des rapports parlementaires ne suffit pas à justifier d'un quelconque trouble à l'ordre public[1].
Contrôle préfectoral
Selon la nouvelle rédaction de l'article 910 du code civil[5], l'acceptation de dons et legs n'est plus soumise à une autorisation préalable par arrêté préfectoral. Toute association cultuelle est autorisée à recevoir des dons et legs, avec obligation de déclaration à l'autorité administrative, qui conserve un pouvoir d'opposition a posteriori. Sont explicitement exclues de ces dispositions les « associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants sont visées à l'article 1er de la loi du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ».
Il en va de même pour l'application des articles 200 et 238 bis du code général des impôts, qui permet aux bienfaiteurs des associations cultuelles de déduire un pourcentage déterminé de leurs versements dans une certaine limite de leurs revenus.
Notes et références
- ↑ a et b Circulaire du 20 décembre 1999 du ministère de l'Intérieur relative à la lutte contre les agissements répréhensibles des mouvements sectaires.
- ↑ Article 1382 du code général des impôts prévoyant l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties affectées à l'exercice du culte appartenant aux associations cultuelles.
- ↑ Conseil d'État, Assemblée, avis du 24 octobre 1997, Association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de Riom ; Conseil d'État, Section du contentieux, arrêt du 23 juin 2000, Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie c/ Association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de Clamecy.
- ↑ Conseil d’État, Section du contentieux, arrêt du 28 avril 2004, Association Cultuelle du Vajra Triomphant
- ↑ Modifié notamment par l'ordonnance n° 2005-856 du 28 juillet 2005 portant simplification du régime des libéralités consenties aux associations, fondations et congrégations, de certaines déclarations administratives incombant aux associations, et modification des obligations des associations et fondations relatives à leurs comptes annuels.
Bibliographie
- Actes du colloque " Actualité des associations cultuelles : Faut-il modifier la loi de séparation des Églises et de l'État ? " (Assemblée Nationale, 24 novembre 1995), Les Petites Affiches, 1er mai 1996, n° 53.
- Gilles BACHELIER, Conclusions du commissaire du gouvernement, Revue de droit public et de la science politique en France et à l'étranger, 2000, n° 6, pp. 1839-1849.
- Sophie BOISSARD, " Conditions du refus du statut d'association cultuelle à une association ", Conclusions du commissaire du gouvernement, L'Actualité juridique - Droit administratif, 2004, p. 1367.
- Alain BOYER et Michel BRISACIER, " Les associations cultuelles et les congrégations ", in " L'État et les Cultes ", Administration, n° 161, octobre/décembre 1993, pp. 65-79.
- Alain BOYER, " L'administration préfectorale et les cultes ", Annuaire Droit et Religions, n° 1, 2005, pp. 13-19.
- Michel BRISACIER, " Le Conseil d'État précise les critères de l'Association cultuelle ", Administration, n° 177, 1997, pp. 91-93.
- Thierry DAUPS, " Ordre public et associations cultuelles ", Annuaire Droit et Religions, n° 1, 2005, pp. 129-147.
- Xavier DELSOL, Alain GARAY, Emmanuel TAWIL, Droit des cultes - Personnes, activités, biens et structures, Éditions Juris associations, Lyon, 2005.
- Alain GARAY et Philippe GONI, Note de jurisprudence administrative, Revue de droit public et de la science politique en France et à l'étranger, 2000, n° 6, pp. 1825-1837.
- Gérard GONZALEZ, " Les témoins de Jéhovah peuvent-ils constituer des associations cultuelles ? ", Revue française de droit administratif, janvier-février 1998, pp. 61-73.
- Gérard GONZALEZ, " Les témoins de Jéhovah peuvent constituer des associations cultuelles ", Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme, n° 2001/48, pp. 1208-1219.
- Mattias GUYOMAR et Pierre COLLIN, " Chronique générale de jurisprudence administrative française - Contributions et taxes ", L'Actualité juridique - Droit administratif, 20 juillet/20 août 2000, pp. 597-602, 671, 672.
- Ministère de l'Intérieur (direction des libertés publiques et des affaires juridiques), circulaire du 20 décembre 1999 sur la " Lutte contre les agissement répréhensibles des mouvements sectaires " (Int. 9900262C).
- Caroline LECLERC, " Le statut d'association cultuelle et les sectes ", Revue française de droit administratif, mai-juin 2005, pp. 565-576.
- Hocine SADOK, " Sectes et associations cultuelles ", Droit administratif, novembre 1998, pp. 7-11.
Voir aussi
Liens internes
- Séparation des Églises et de l'État en 1905
- Texte intégral de la loi du 9 décembre 1905 sur Wikisource
- Caisse d'assurance vieillesse, invalidité et maladie des cultes
- Statut des Témoins de Jéhovah en France
Liens externes
- Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État (actualisée)
- [PDF] Circulaire du 20 décembre 1999 du ministère de l'Intérieur relative à la lutte contre les agissements répréhensibles des mouvements sectaires
- [PDF] Circulaire du 19 juillet 2004 du ministère de l'Intérieur
- [PDF] Circulaire du 1er août 2007 du ministère de l'Intérieur
- Droit des religions