Les règles relatives aux manifestations sportives sur les voies publiques se mettent à la page européenne !
K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Eve Derouesné et David Bristow, 2/04/2012
La procédure française d’organisation de manifestations sportives non motorisées se déroulant sur la voie publique vient d’évoluer pour se conformer au droit européen. La règlementation de ces « services » - au sens de la directive n°2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur (la « Directive ») et de l’article 57 du Traité – vient d’être modifiée par le décret n°2012-312 du 5 mars 2012 relatif aux manifestations sportives sur les voies publiques. Le décret, applicable aux manifestations se déroulant trois mois après sa publication, modifie notamment les articles R. 331-6 et suivants du code du sport.
A. Toutes les personnes physiques ou morales peuvent désormais obtenir l’autorisation d’organiser une manifestation sportive non motorisée sur la voie publique
L’impact de la Directive est sensible. L’ancien article R. 331-7 du code du sport indiquait que seules les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 ayant au moins 6 mois d’existence et affiliées à la fédération sportive délégataire du sport concerné pouvaient organiser ces manifestations. Le nouvel article R. 331-9 prévoit que l’autorisation d’organiser une manifestation sportive « peut être délivrée à toute personne physique ou morale ». De la même manière disparaît l’obligation pour la personne organisatrice d’être inscrite sur un calendrier fédéral . Les règles antérieures ne respectaient pas l’article 16 de la Directive qui oblige les Etats à garantir, sur leur territoire, « le libre accès à l’activité de service ainsi que son libre exercice » et empêche les Etats de « subordonner l’accès à une activité de service ou son exercice (…) à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants : non discrimination (…), nécessité (…), proportionnalité (…) ». Cette véritable libéralisation comporte cependant des garde-fous. La personne physique ou morale doit par exemple, pour certaines manifestations, recueillir un avis motivé de la part de la fédération délégataire du sport concerné (voir notre point C).
B. Les trois régimes d’obtention du droit à organiser une manifestation sportive non motorisée sur la voie publique
Dans leurs relations avec l’administration, trois régimes s’offrent désormais aux organisateurs, en fonction de taille et de la nature de la manifestation projetée : l’autorisation préfectorale (1), l’absence de formalités administratives (2), la déclaration préfectorale (3) .
1. L’alinéa 1er du nouvel article R. 331-6 rend obligatoire l’obtention d’une autorisation pour l’organisation des manifestations sportives « qui constituent des épreuves, courses ou compétitions comportant un chronométrage et qui se déroulent en totalité ou en partie sur une voie publique ou ouverte à la circulation publique ». Cette autorisation peut être délivrée à toute personne physique ou morale par le préfet territorialement compétent . La demande doit parvenir au moins trois mois avant la date prévue pour le déroulement de la manifestation .
2. L’article R. 331-6 , alinéa 2, permet aux organisateurs de s’affranchir de cette autorisation sous quatre conditions cumulatives. Ne sont pas soumises à autorisation les manifestations qui :
- respectent le code de la route ;
- ne comportent qu’un ou plusieurs point(s) de rassemblement ou de contrôle ;
- n’imposent pas d’horaire fixé à l’avance ;
- ne comportent pas de classement en fonction de la vitesse ou de la moyenne réalisée.
3. Toutefois – et c’est ici que la réforme porte – , l’alinéa 3 du même article dispose que les manifestations sportives qui entrent dans cette seconde catégorie et qui prévoient « la circulation groupée, en un point déterminé de la voie publique ou de ses dépendances, de plus de 75 piétons, de plus de 50 cycles ou autres véhicules ou engins non motorisés et de plus de 25 chevaux ou autres animaux » sont, elles, soumises à déclaration. Soulignons que ce régime déclaratoire ne s’applique que pour les manifestations respectant déjà les quatre conditions de l’alinéa précédent (notre point 2). Du point de vue du délai, l’organisateur d’une manifestation soumise à déclaration doit déposer un dossier de déclaration au plus tard un mois avant la date de l’évènement auprès du préfet territorialement compétent .
Lecteurs attentifs et amateurs de légistique, vous n’aurez pas manqué de vous interroger sur l’articulation des trois régimes. Une manifestation, telle qu’elle est définie à l’alinéa 1er de l’article R. 331-6, « comporte un chronométrage ». Mais pour obtenir une dérogation, selon l’alinéa 2, la manifestation (telle que définie à l’alinéa 1er) ne doit pas « comporter de classement en fonction de la vitesse ou de la moyenne réalisée ». La dérogation s’applique donc pour les manifestations chronométrées mais…sans classement ! En effet, une manifestation non chronométrée se trouve hors du champ d’application du régime d’autorisation par la seule application du nouvel article R. 331-6. Cela réduit singulièrement le champ d’application de l’alinéa 2…et ce de manière bien trop importante pour croire que c’était là la volonté initiale des rédacteurs. Pourtant la mention « et qui comporte un chronométrage » dans la définition de la manifestation sportive est un ajout du décret 2012-312 lui-même : cette insertion suscite perplexité et incompréhension.
1. L’alinéa 1er du nouvel article R. 331-6 rend obligatoire l’obtention d’une autorisation pour l’organisation des manifestations sportives « qui constituent des épreuves, courses ou compétitions comportant un chronométrage et qui se déroulent en totalité ou en partie sur une voie publique ou ouverte à la circulation publique ». Cette autorisation peut être délivrée à toute personne physique ou morale par le préfet territorialement compétent . La demande doit parvenir au moins trois mois avant la date prévue pour le déroulement de la manifestation .
2. L’article R. 331-6 , alinéa 2, permet aux organisateurs de s’affranchir de cette autorisation sous quatre conditions cumulatives. Ne sont pas soumises à autorisation les manifestations qui :
- respectent le code de la route ;
- ne comportent qu’un ou plusieurs point(s) de rassemblement ou de contrôle ;
- n’imposent pas d’horaire fixé à l’avance ;
- ne comportent pas de classement en fonction de la vitesse ou de la moyenne réalisée.
3. Toutefois – et c’est ici que la réforme porte – , l’alinéa 3 du même article dispose que les manifestations sportives qui entrent dans cette seconde catégorie et qui prévoient « la circulation groupée, en un point déterminé de la voie publique ou de ses dépendances, de plus de 75 piétons, de plus de 50 cycles ou autres véhicules ou engins non motorisés et de plus de 25 chevaux ou autres animaux » sont, elles, soumises à déclaration. Soulignons que ce régime déclaratoire ne s’applique que pour les manifestations respectant déjà les quatre conditions de l’alinéa précédent (notre point 2). Du point de vue du délai, l’organisateur d’une manifestation soumise à déclaration doit déposer un dossier de déclaration au plus tard un mois avant la date de l’évènement auprès du préfet territorialement compétent .
Lecteurs attentifs et amateurs de légistique, vous n’aurez pas manqué de vous interroger sur l’articulation des trois régimes. Une manifestation, telle qu’elle est définie à l’alinéa 1er de l’article R. 331-6, « comporte un chronométrage ». Mais pour obtenir une dérogation, selon l’alinéa 2, la manifestation (telle que définie à l’alinéa 1er) ne doit pas « comporter de classement en fonction de la vitesse ou de la moyenne réalisée ». La dérogation s’applique donc pour les manifestations chronométrées mais…sans classement ! En effet, une manifestation non chronométrée se trouve hors du champ d’application du régime d’autorisation par la seule application du nouvel article R. 331-6. Cela réduit singulièrement le champ d’application de l’alinéa 2…et ce de manière bien trop importante pour croire que c’était là la volonté initiale des rédacteurs. Pourtant la mention « et qui comporte un chronométrage » dans la définition de la manifestation sportive est un ajout du décret 2012-312 lui-même : cette insertion suscite perplexité et incompréhension.
C. Le rôle des fédérations délégataires dans le cadre des manifestations sportives non motorisées sur la voie publique
Le nouvel article R. 331-7 dispose que les fédérations délégataires édictent, pour toutes les manifestations et «i[ dans les disciplines pour lesquelles elles ont obtenu délégation […] les règles techniques et de sécurité applicables aux manifestations mentionnées à l’article R. 331-6 [notre point B]. Le règlement particulier des manifestations soumises à autorisation ou déclaration respecte ces règles techniques et de sécurité]i ».
Le nouvel article R. 331-9-1 dispose de plus que « i[toute personne souhaitant organiser une manifestation soumise à autorisation doit recueillir l'avis de la fédération délégataire concernée. Celle-ci rend un avis motivé au regard des règles techniques et de sécurité mentionnées à l'article R. 331-7. […] [Cet avis] est réputé rendu dans un délai d’un mois à compter de la réception de la demande par la fédération. Un arrêté du ministre chargé des sports détermine les modalités de publication de cet avis]i ».
Reste que le décret n’éclaire pas la portée à reconnaître de ce silence prolongé qui devrait, selon nous, emporter toutefois un avis réputé favorable. L’arrêté d’application viendra, peut-être, opportunément clarifier ce point. Précisons que l’article 21 de la loi du 12 avril 2000 ne paraît pas applicable car, au cas présent, la fédération ne prend pas une décision mais rend seulement un avis.
Le nouvel article R. 331-9-1 dispose de plus que « i[toute personne souhaitant organiser une manifestation soumise à autorisation doit recueillir l'avis de la fédération délégataire concernée. Celle-ci rend un avis motivé au regard des règles techniques et de sécurité mentionnées à l'article R. 331-7. […] [Cet avis] est réputé rendu dans un délai d’un mois à compter de la réception de la demande par la fédération. Un arrêté du ministre chargé des sports détermine les modalités de publication de cet avis]i ».
Reste que le décret n’éclaire pas la portée à reconnaître de ce silence prolongé qui devrait, selon nous, emporter toutefois un avis réputé favorable. L’arrêté d’application viendra, peut-être, opportunément clarifier ce point. Précisons que l’article 21 de la loi du 12 avril 2000 ne paraît pas applicable car, au cas présent, la fédération ne prend pas une décision mais rend seulement un avis.
D. Les véhicules de rallye peuvent déroger à l’obligation générale d’immatriculation des véhicules
La réforme prévoit que les véhicules participant à des manifestations sportives motorisées (rallyes, courses automobiles…), peuvent déroger ponctuellement à l’obligation d’immatriculation des véhicules prévue par l’article R. 411-29 du code de la route, lorsqu’ils empruntent un « parcours de liaison », c'est-à-dire un « itinéraire non fermé, allant d'un point de départ à un point d'arrivée distinct, empruntant des voies ouvertes à la circulation publique sur lesquelles les participants respectent le code de la route » . Cette dérogation est valide sous réserve d'une inscription effective à une manifestation sportive et strictement limitée à la date et à l’itinéraire prévus dans l’arrêté d’autorisation de la manifestation sportive.
E. Les dispositions pénales
Rappelons que le fait d'organiser une manifestation de quelque nature que ce soit dans une discipline sportive, sans y avoir été autorisé ou avoir effectué la déclaration nécessaire, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende .
Comme nous le comprenons, le nouvel article R. 331-17-2 du code du sport aggrave les sanctions pour l’organisation illégale d’une manifestation sportive non motorisée sur la voie publique. En sus du dispositif précité, le fait d’organiser sans la déclaration ou l’autorisation préalable une telle manifestation est puni des peines prévues pour les contraventions de cinquième classe (soit au maximum 1500 euros ainsi que des peines complémentaires). Le non-respect des prescriptions contenues dans l’autorisation administrative qui a été délivrée aux organisateurs est puni des mêmes peines. On comprend mal cette addition à la peine prévue par la loi et l’enchevêtrement successif des sanctions qui en résulte.
L’article R. 331-17-2 contient également une disposition nouvelle : le participant à une manifestation non autorisée risque une amende de troisième classe (soit, au maximum, 450 euros).
Comme nous le comprenons, le nouvel article R. 331-17-2 du code du sport aggrave les sanctions pour l’organisation illégale d’une manifestation sportive non motorisée sur la voie publique. En sus du dispositif précité, le fait d’organiser sans la déclaration ou l’autorisation préalable une telle manifestation est puni des peines prévues pour les contraventions de cinquième classe (soit au maximum 1500 euros ainsi que des peines complémentaires). Le non-respect des prescriptions contenues dans l’autorisation administrative qui a été délivrée aux organisateurs est puni des mêmes peines. On comprend mal cette addition à la peine prévue par la loi et l’enchevêtrement successif des sanctions qui en résulte.
L’article R. 331-17-2 contient également une disposition nouvelle : le participant à une manifestation non autorisée risque une amende de troisième classe (soit, au maximum, 450 euros).