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Adoption d'un enfant né par assistance médicale à la procréation à l'étranger par l'épouse de la mère, avis de la cour de cassation du 22 septembre 2014

Actualités du droit et de la santé ... - Olivier SIGMAN, 23/09/2014

Interdiction française et filiation: des affrontements réguliers devant les tribunaux clos par deux avis

Ici, l'assistance médicale à la procréation est réalisée à l'étranger par une femme homosexuelle pour avoir un enfant. A son retour, sa femme en demande l'adoption plénière.

La question qui se pose est de deux ordres:

D'une part, l'assistance médicale à la procréation effectuée l'étranger est-elle une fraude à la loi en tant qu'elle n'est pas permise en France pour des couples homosexuels?

D'autre part, l'épouse de la mère biologique peut-elle adopter l'enfant de sa femme issu d'une assistance médicale à la procréation.

L'assistance médicale à la procréation a toujours eu vocation à se substituer à des difficultés de santé de concevoir un enfant puis par la suite d'éviter la transmission de maladie.

La loi 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe permettant le mariage aux couples de même sexe a permis d'adopter l'enfant du conjoint.

Les articles du code civil n'exigent qu'une différence de 10 ans entre l'adoptant et l'adopté lorsque celui-ci est l'enfant du conjoint et qu'une filiation n'ait été établie que pour ce conjoint.

L'intérêt de l'enfant est toujours reconnu comme étant celui lui permettant d'avoir une famille et d'être épanoui.

La Cour de cassation rend l'avis de la possibilité sous ces conditions de l'adoption d'un enfant né par assistance médicale à la procréation par la femme de la mère.

La Cour de cassation s'était cependant prononcé contre une adoption d'un enfant issu d'une gestation pour autrui réalisée à l'étranger; cette technique étant interdite en France. Cependant, la Cour Européenne des Droits de l'Homme avait pris deux arrêts le 26 juin 2014 faisant primer l'intérêt de l'enfant aux positions de principe des législations internes des pays et prononcé ainsi contre la cour de cassation. C'est sur cet arrêt que cette fois-ci, la Cour de cassation a du prendre cet avis, évitant une nouvelle condamnation de la France.

 

Avis n° 15010 du 22 septembre 2014 (Demande n° 1470007)ECLI:FR:CCASS:2014:AV015010

Filiation

LA COUR DE CASSATION,

Vu les articles L.441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile,

Vu la demande d’avis formulée le 19 juin 2014 par le tribunal de grande instance d’Avignon, reçue le 30 juin 2014, dans une instance introduite par Mme X... aux fins d’adoption plénière de l’enfant de sa conjointe, et ainsi libellée :

“L’accès à la procréation médicalement assistée, sous forme d’un recours à une insémination artificielle avec donneur inconnu à l’étranger par un couple de femmes est-il de nature, dans la mesure où cette assistance ne lui est pas ouverte en France, en application de l’article L.2141-2 du code de la santé publique, à constituer une fraude à la loi sur l’adoption, et notamment aux articles 343 et 345-1 du code civil, et au code de la santé publique, empêchant que soit prononcée une adoption de l’enfant né de cette procréation par l’épouse de la mère biologique ?”

Vu les observations écrites déposées par la SCP Thouin-Palat et Boucard pour Mme X... et Mme Y... ;

Vu les observations écrites déposées par Me Corlay pour les associations Juristes pour l’enfance et l’Agence européenne des adoptés ;

Sur le rapport de Mme Le Cotty, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Sarcelet, avocat général, entendu en ses conclusions orales ;

EST D’AVIS QUE :

Le recours à l’assistance médicale à la procréation, sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption, par l’épouse de la mère, de l’enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant.


Président : M. Louvel, premier président

Rapporteur : Mme Le Cotty, conseiller référendaire, assisté de Mme Norguin, greffier en chef au service de documentation, des études et du rapport

Avocat général : M. Sarcelet

 

Avis n° 15011 du 22 septembre 2014 (Demande n° 1470006) ECLI:FR:CCASS:2014:AV015011

Filiation

LA COUR DE CASSATION,

Vu les articles L.441-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile,

Vu la demande d’avis formulée le 23 juin 2014 par le tribunal de grande instance de Poitiers, reçue le 27 juin 2014, dans une instance introduite par Mme X... épouse Y... aux fins d’adoption plénière de l’enfant de sa conjointe, et ainsi libellée :

“Le recours à la procréation médicalement assistée, sous forme d’un recours à une insémination artificielle avec donneur inconnu à l’étranger par un couple de femmes, dans la mesure où cette assistance ne leur est pas ouverte en France, conformément à l’article L.2141-2 du code de la santé publique, est-il de nature à constituer une fraude à la loi empêchant que soit prononcée une adoption de l’enfant né de cette procréation par l’épouse de la mère ?

L’intérêt supérieur de l’enfant et le droit à la vie privée et familiale exigent-ils au contraire de faire droit à la demande d’adoption formulée par l’épouse de la mère de l’enfant ?”

Vu les observations écrites déposées par Me Corlay pour les associations Juristes pour l’enfance et l’Agence européenne des adoptés ;

Sur le rapport de Mme Le Cotty, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Sarcelet, avocat général, entendu en ses conclusions orales ;

EST D’AVIS QUE :

Le recours à l’assistance médicale à la procréation, sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption, par l’épouse de la mère, de l’enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant.


Président : M. Louvel, premier président

Rapporteur : Mme Le Cotty, conseiller référendaire, assisté de Mme Norguin, greffier en chef au service de documentation, des études et du rapport

Avocat général : M. Sarcelet

 

NB: Article L2141-2 du code de la santé publique Modifié par 33

L'assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité. Le caractère pathologique de l'infertilité doit être médicalement diagnostiqué.

L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination. Font obstacle à l'insémination ou au transfert des embryons le décès d'un des membres du couple, le dépôt d'une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l'homme ou la femme auprès du médecin chargé de mettre en oeuvre l'assistance médicale à la procréation.


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