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Si tu te retrouves en garde-à-vue…

Actualités du droit - Gilles Devers, 24/05/2013

Les droits de la défense contre l’efficacité de l’enquête… Pendant des...

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Les droits de la défense contre l’efficacité de l’enquête… Pendant des années, c’est resté la toile de fond justifiant le régime de la garde-à-vue : l’accusation commençait et les droits de la défense n'étaient pas assurés. Une faille qui marquait tout le processus... Le rapport 2012 de la Cour de cassation, publié hier, est l’occasion de faire le point sur la loi et la jurisprudence, après les bouleversements de 2011. Ni catastrophe, ni péril, bien au contraire : le centre de gravité de l'enquête se déplace vers les flics, et c'est bon pour tout le monde. 

L’information sur les droits

9782711015979_1_75.jpgSi tu es placé en garde-à-vue, l’OPJ doit immédiatement t’informer de ton placement sous ce régime, de la durée de la mesure et des prolongations possibles, de la nature et de la date présumée de l'infraction dont tu es soupçonné (Code de procédure pénale, art. 63-1).

En outre, il va t’expliquer que tu peux faire prévenir un proche et ton employeur (Art. 63-2), être examiné par un médecin (Art 63-3), être assisté par un avocat (Art. 63-3-1 à 63-4-3) et que tu as le droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui te sont posées ou de te taire.

C'est depuis la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 et une série d’arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation 15 avril 2011 (n° 10-17.049, n° 10-30.242, n° 10-30.313, n° 10-30.316), que tu peux demander à être assisté par un avocat, le cas échéant désigné par le Bâtonnier. Comme en application de l’article 63-2 tu peux faire prévenir, par téléphone, ta chérie, ton chéri ou un membre de ta famille proche, eux peuvent se charger de désigner l’avocat.

L’OPJ ne dit pas grand-chose à l’avocat, juste la nature et de la date présumée de l'infraction. Tu pourras t’entretenir avec lui pour un entretien confidentiel de trente minutes. Un debrief et des conseils de base, car l’avocat n’a pas le dossier d’enquête, et la loi prévoit de nouveaux entretiens si la garde-à-vue est renouvelée.  

Ton avocat assiste aux auditions et confrontations (Art. 63-4-2). A l'issue de chaque audition ou confrontation, ton avocat peut poser des questions, et l’enquêteur ne peut s'opposer aux questions que si elles sont de nature « à nuire au bon déroulement de l'enquête ».  A l'issue de chaque entretien et de chaque audition à laquelle il a assisté, ton avocat peut présenter des observations écrites dans lesquelles il peut consigner les questions refusées. Il peut adresser ses observations au procureur de la République pendant la durée de la garde à vue.

Les sanctions

garde-à-vue2.jpgCes mesures sont bien respectées, et les cas de nullité se sont surtout posés pour les mesures antérieures à la loi, qui étaient toutes irrégulières car ne respectant pas l’article 6 de la Convention EDH.

Au stade de l’instruction, la sanction est la nullité des auditions (Crim., 31 mai 2011, n° 10-88.293, n° 10-88.809 et n° 11-81.412 ; 7 juin 2011, n° 11-81.702).

Pour ce qui est du jugement, c’est moins radical, mais les droits de la défense sont respectés : tu ne peux pas être condamné sur le seul fondement de déclarations que tu as faites sans avoir pu t’entretenir avec un avocat et être assisté par lui (Crim, 11 mai 2011, n° 10-84.251). Les déclarations recueillies en garde à vue sans l’assistance d’un avocat n’ont pas de valeur probante.

Bien sûr, si la juridiction s’est fondée sur d’autres éléments que tes déclarations faites sans l’assistance de ton avocat, la condamnation sera valable (Crim., 7 février 2012, n° 11-83.676). Pour la Cour, la condamnation est régulière si les juges ne se sont fondés ni exclusivement ni même essentiellement sur les déclarations recueillies irrégulièrement en garde-à-vue (Crim., 21 mars 2012, n° 11-83.637).

La Cour est bien bonne pour les droits de la défense… Quand tu es mis en examen, le juge te donne lecture de l’article 173-1 du code de procédure pénale qui te laisse un délai de six mois pour demander la nullité d’actes. La chambre criminelle a jugé que tu as laissé passer le délai, tu gardes la possibilité de « discuter la valeur probante » des auditions irrégulières devant la juridiction de jugement (Crim., 14 février 2012, n° 11-87.757 ; 14 mars 2012, n° 11-81.274 et n° 11-85.827 ; 13 juin 2012, n° 10-82.420 et n° 11-81.573).

Enfin, précision : la méconnaissance de ces régles ne peut être invoquée à l’appui d’une demande d’annulation d’acte ou de pièce de procédure que par la partie qu’elle concerne (Crim, 14 février 2012,n° 11-84.694 ; 10 mai 2012, n° 11-87.328).

La défense ne joue pas contre la vérité

9782336290034FS.gifAllez, je te souhaite une bonne garde-à-vue, et si tu as encore un petit doute, voici ce que dit l’article préliminaire du Code de procédure pénale :

« I. - La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties.

« Elle doit garantir la séparation des autorités chargées de l'action publique et des autorités de jugement.

« Les personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées selon les mêmes règles.

« II. - L'autorité judiciaire veille à l'information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale.

« III. - Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d'innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi.

« Elle a le droit d'être informée des charges retenues contre elle et d'être assistée d'un défenseur.

« Les mesures de contraintes dont cette personne peut faire l'objet sont prises sur décision ou sous le contrôle effectif de l'autorité judiciaire. Elles doivent être strictement limitées aux nécessités de la procédure, proportionnées à la gravité de l'infraction reprochée et ne pas porter atteinte à la dignité de la personne.

« Il doit être définitivement statué sur l'accusation dont cette personne fait l'objet dans un délai raisonnable.

« Toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction.

« En matière criminelle et correctionnelle, aucune condamnation ne peut être prononcée contre une personne sur le seul fondement de déclarations qu'elle a faites sans avoir pu s'entretenir avec un avocat et être assistée par lui ».

Les avocats et les flics travaillent ensemble… On annonçait des périls, or l’évidence est là : ça n’est pas simple, et c’est le rapport de forces, mais tout le monde y gagne. La recherche judicaire de la vérité résulte de la confrontation. Alors, allons-y sereinement, et que chacun fasse bien son métier. Nous sommes tous au service de la loi.

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La magistrature représentée par la Justice que l’Innocence désarme ; la Prudence l’en félicite

L. Lagrenée, 1766, The Art Museum, Princeton


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