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Le maire peut-il frapper les enfants de son village ? (2° épisode)

Actualités du droit - Gilles Devers, 6/09/2012

Heureusement, il reste donc interdit à un maire de frapper les enfants. La...

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Heureusement, il reste donc interdit à un maire de frapper les enfants. La baffe la plus célèbre de France repassait hier devant la cour d’appel de Douai. Devant le tribunal d'Avesnes-sur-Helpe, ce mois de février, le maire de Cousolre (Nord), Maurice Boisart, avait été déclaré coupable et condamné à 1000 € d’amende avec sursis. Les réactions avaient fusé : c’était un scandale absolu, il fallait changer la loi, créer un statut de l’élu du genre shériff... Au vu de l’audience d’hier, la culpabilité sera vraisemblablement confirmée et la cour va prononcer une dispense de peine. Entre 1000 € avec sursis et une dispense de peine, le curseur a bougé d’un millimètre.

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On se rappelle les faits. Des gamins jouent au foot, et le ballon va se perdre sur un terrain communal voisin. Pour récupérer son ballon, un gamin de seize ans escalade le grillage, qui n’est pas fait pour ça. Le maire qui passe par là le réprimande, et le gamin lui répond par des mots doux. En réponse, le maire lui colle une bonne baffe.

Le gamin a été poursuivi devant le tribunal pour enfants, et s’agissant des violences du maire, le Parquet avait proposé une médiation,… refusée par le maire frappeur ! Le Parquet avait alors choisi de poursuivre, ce qui était parfaitement logique… ce qui rendait inévitable la condamnation du maire par le tribunal correctionnel.

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La raison ? L’application de la loi, à savoir l’article 222-13, 7° du Code pénal qui traite des « violences par personne dépositaire de l'autorité publique sans incapacité ». Les violences n’ayant causé aucune incapacité temporaire – des violences légères – sont des contraventions sauf dans certaines circonstances, et notamment si l’agresseur profite de son autorité.

Devant le tribunal, le maire avait plaidé la « légitime défense », ce qui ne faut pas un clou : d’un côté des injures, de l’autre côté la violence. Aucun équilibre.

Alors que la peine encourue est de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende, le tribunal correctionnel avait été plus que bienveillant : 1 000 € avec sursis.  

Hier, à l’audience de la cour d’appel, l’avocat général a confirmé cette analyse : la gifle du maire était disproportionnée, même si le jeune homme s'est montré injurieux, et c’est à bon droit que le tribunal correctionnel avait reconnu la culpabilité.

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La peine était à 1000 € d’amende avec sursis. Comment faire moins ? Il reste la dispense de peine. Mais attention : cette mesure n’est pas une relaxe. Elle laisse intacte la donnée principale : être coupable d’avoir commis un délit correctionnel.

Son régime est défini par l’article 132-59 du Code pénal.

« La dispense de peine peut être accordée lorsqu'il apparaît que le reclassement du coupable est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l'infraction a cessé.

« La juridiction qui prononce une dispense de peine peut décider que sa décision ne sera pas mentionnée au casier judiciaire.

« La dispense de peine ne s'étend pas au paiement des frais du procès ».

L’affaire a été mise en délibéré, et la cour doit rendre son arrêt le 10 octobre.

Il y avait pour mettre l’ambiance l'Association des Maires de France – les élus contestent l’application de la loi, c’est nouveau… – et le fumeux Institut pour la Justice, qui annonce avoir recueilli 500.000 signatures pour modifier la loi. Rien que çà !

Le législateur a été sage en punissant les violences légères, donc sans la moindre incapacité temporaire, d'une peine correctionnelle lorsque ces violences sont le fait d’une personne exerçant une autorité. Quand on exerce une autorité, il faut savoir se tenir. Ici, les maires et les pétitionnaires veulent inverser le raisonnement : quand on a de l’autorité, c’est pour en abuser, et en commençant sur les enfants.

Revendiquer que les maires puissent frapper les enfants, c’est du grand délire.

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Le principe est simple : toute violence corporelle est condamnée par la loi pénale.


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