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Pour un code (Taubira) de l’enfance (503)

Droits des enfants - jprosen, 25/11/2012

On se doit d’approuver les efforts des pouvoirs publics pour faire prendre conscience à l’opinion des violences faites aux femmes. Cette mobilisation nationale inscrite dans une action mondiale  s’imposait. L’Etat et ses relais médiatiques et associatifs sont dans leur rôle. … Continuer la lecture

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On se doit d’approuver les efforts des pouvoirs publics pour faire prendre conscience à l’opinion des violences faites aux femmes. Cette mobilisation nationale inscrite dans une action mondiale  s’imposait. L’Etat et ses relais médiatiques et associatifs sont dans leur rôle. Je rappellerai qu’il a fallu attendre 1995 (Cour de cassation) et 2005 (loi) pour que le viol entre époux soit condamnable dans la patrie auto-proclamée des droits de l’Homme. Souhaitons au plan  « global « annoncé par le président de la République d’être performant.

Je regrette d’autant plus que le 20 novembre, jour des droits de l’enfant institué en 1993 dans la dynamique de l’entrée en vigueur en France de la Convention internationale sur les droits de l’enfant, soit passé relativement inaperçu ; en tous cas qu’il n’ait pas eu la couverture de presse méritée. Il faut dire que le vaudeville à mille actes  joué à l’UMP a tout écrasé, mais quand même !

Sans guère de retombées la Défenseure des enfants, adjointe du Défenseur des droits, a remis au président de la République un rapport sur les dangers des nouveaux médias pour les plus jeunes. Il aurait sûrement mérité mieux et déjà susciter un débat avec pour enjeu d’informer les parents et les enfants sur les précautions à prendre à l’égard des propositions sur internet. Par-ci par-là quelques tables-rondes ou colloque,  l’encéphalogramme  du 20 novembre est désormais plat. Ainsi la journée d’étude de DEI-France organisée ce samedi à l’Assemblée nationale ambitionnait de cerner les enjeux autour des responsabilités publiques sur l’enfant et l’enfance en mettant notamment en évidence la nécessité de clarifier ces responsabilités et d’installer des contre-pouvoirs car la territorialisation des pouvoirs publics n'implique pas nécessairement une meilleure prise en compte des droits des personnes.

On est donc loin du compte par rapport à l’époque où chaque année, ce 20 novembre, les pouvoirs publics organisaient une rencontre avec le secteur associatif pour faire l’état des avancées - ou des reculades -  sur les droits de l’enfant durant l’année, laisser s’exprimer les attentes et identifier des objectifs. Cette démarche ambitieuse a subi elle-même de avatars car r exigeante-, mais une véritable concertation était nouée entre les pouvoirs publics et la société civile (associations militantes, professionnels, etc.) et les institutions.

Ce souffle a disparu ! Le plus grave est bien que l’enfance n’est pas un sujet explicite de politique publique.

Pas de ministère de l’enfance. Et au final la jeunesse présentée comme un objectif politique majeur durant la campagne redevient  rattachée aux sports alors qu’elle méritait, en haut de l’affiche gouvernementale, un ministère d’Etat.

Pas de délégation interministérielle à l’enfance ; la délégation à la famille a même été supprimée.

Toujours pas de délégation parlementaire à l’enfance malgré un vote positif il y a bien des lustres  sous l’ancienne majorité par le Sénat. L’Assemblée avait bloqué cet élan entre 2002 et 2007. Depuis on n’en parle plus.

Quid des réponses aux Observations et aux Recommandations du Comité des experts de l’ONU qui a épinglé la France en 2010 sur son application de la Convention internationale ? Silence total.

J’arrête les illustrations de ce que l’enjeu enfance n’est plus tenu pour prioritaire.

On a pu comprendre cet essoufflement par rapport aux années 80-90 quand, petit à petit, on insufflait cette idée que les enfants étaient source de tous les dangers, notamment ceux qui violent la loi. La France serait à feu et à sang du fait des jeunes délinquants, pour e ne pas dire des jeunes des banlieues, pour ne pas dire des jeunes issus de l’immigration. Et au passage on assimile jeunes et enfants, personnes de moins de 18 ans.

Plus grave, on distille que c’est le fait d’avoir reconnu des droits aux enfants qui est à l’origine de leur refus de l’autorité des adultes et des violations des normes. Pas un instant on ne s’interroge sur le fait que chacun – enfants comme adultes - respecte d’autant plus une loi si elle lui parait juste et s’il en ressent les bénéfices. Comment se fait-il que tant d’enfants aient un profond sentiment d’injustice et soient privés d’espoir ?

Faut-il rappeler que notre société, mobilisée sur la reconnaissance du droit des adultes de tous sexes à se marier et à avoir un enfant, n’a toujours pas achevé le travail consistant à consacrer les responsabilités des adultes sur les enfants présents auprès d’eux, chair de leur chair ou pas.

Je ne méconnais pas le travail engagé pour rénover l’école et la recentrer sur l'enfant - non sur l’élève-,  mais le ministre d l'éducation nationale n'est pas au bout de ses peines, tant les blocages, y compris les corporatismes sont légion. Certains doutent même qu’il avance réellement. Reste que pour essentiel l’école n’est pas tout : l’accès aux soins, les conditions de logement, la présence d’adultes responsables et protecteurs sont autant de droits fondamentaux à garantir.

Je constate aussi que Martin Hirsh a échoué malgré le RSA  comme il l’entendait à) réduire de façon significative la grande pauvreté des enfants. Deux millions d’enfants sur les 13 que compte ce pays seraient sous le seuil européen de pauvreté; et les choses ne s’améliorent certainement pas. Ne parlons pas des enfants roms régulièrement  privés de leurs cahutes et de leur école, vraie bouée de sauvetage, au fil des expulsions pour aller de conditions de vie dangereuses vers des plus périls plus grands encore – conf. les accidents récents- au nom de l‘ordre public !

Que dire encore du dossier Enfants étrangers non accompagnés qui, de commission en mission, n’est toujours pas traité? L’actuel président de l’Assemblée nationale, alors président du conseil général de la Seine Saint-Denis avait ostensiblement choisi en septembre 2011 de violer la loi, rapidement imité par l’Etat, pour poser un vrai problème politique : faire reconnaître par l’Etat ses propres responsabilités sur ces enfants et veiller à une péréquation entre départements. Parce qu’il s’agit plus d’étrangers plus que d’enfants ce dossier stagne et un enieme groupe de travail aurait été constitué quand il fallait une mission décisionnaire. La machine à fabriquer la clandestinité fonctionne à plein. Et les jeunes en sont les victimes.

Pas question de noircir le tableau et de tomber dans la démagogie que j’exècre. La France reste un pays dans lequel les enfants ont généralement un meilleur sort que dans d’autres, dans tous les sens du terme. Pour autant nous décrochons de nos utopies et ce faisant nous nous tirons une balle dans le pied. A ne pas créer de meilleure conditions d’inscription des enfants dans la société nous préparons des générations de jeunes en conflit avec la loi et de futures victimes. Seuls les industriels de la sécurité y trouveront leur compte ! Et à ne pas protéger les enfants dans leur structure familiale on multiplie les adultes en difficultés pour élever leurs propres enfants. Etc…

Dans ce contexte difficile il nous faut renoncer à démissionner mais reprendre le bâton de pèlerin. Pour cela quelques préalables doivent être réunis pour lever les blocages actuels.

Il convient déjà de mobiliser chacun avec le souci de montrer qu’une meilleure prise en compte des enfants dans cette société peut être bénéfique pour tous, parents, professionnels comme pouvoirs publics.

Il faut aussi dépasser l’argument conjoncturel majeur : les caisses publiques sont vides on ne peut donc rien faire ! Faux. D’abord les caisses ne sont pas vides ; ensuite des budgets publics sont maintenus qui peuvent (partiellement) être redéployés ou mieux utilisés. Des moyens privés sont toujours mobilisables qui n’exigent pas de l’argent, mais du temps, de la disponibilité et de l’intelligence sinon de l’écoute.

Des mises au point s’imposent qui ne coûtent que de la réflexion et commandent pour demain les stratégies à suivre. Je m’explique. Le débat prévisible sur l’accès aux procréations assistées, notamment pour permettre aux gays d’être parents quand l’adoption ne leur apportera pas les enfants escomptés va nous amener à revisiter des réflexions sur la nature de l’être humain. La femme n’est-elle qu’un corps, objet ou acteur sexuel, qui porte un enfant ?  L’enfant peut-il être l’objet d’un contrat même non onéreux ? Objet ou personne, le débat n’est pas théorique (voir blog 50299)

Il nous faut encore ne plus présenter l’enfant comme source de danger et surtout admettre que c’est sur l’affirmation des droits d’une personne- ou d’un groupe- que la société  peut gager ses exigences à son égard. Des droits découlent les devoirs  et non l’inverse

Tout cela pour affirmer qu’une réflexion sur le statut l’enfant s’impose.

Le préalable est déjà de prendre la mesure de l’existant. Les enfants ont déjà des droits – conf. mes blogs précédents dont le 499) : plus qu’on le croit et ils peuvent être acteurs plus souvent qu’on le pense . Comme tout vieux  et riche pays nous avons accumulé les normes de toutes natures(constitution, lois, décrets, etc.) qui en plein et en creux dessinent les droits de l’enfant en France, mais si nul n’est censé ignorer la loi, ce magma est impénétrable.

Nous proposons de longue date de réunir dans un document unique – un code – toutes ces normes. Une société privée a eu le souci d’une compilation, les éditions Dalloz à travers le Code Junior. Il nous faut aller plus loin en harmonisant ces textes. Par exemple il faut mettre en cohérence les différents seuils d’âge quand dans certaines fois on parle du discernement – 7 ou 8 ans -, dans d’autres on a des âges préfixes. Il n’est pas normal que le droit pénal des enfants victimes parle d’enfant de moins de 7 ans, de moins de 15 ans, voire moins de 18 ans ou de personne vulnérable. Plus fondamentalement de cette collecte doit résulter une mise en synergie de ces textes. Par-delà les textes il faut enrichir le tout des jurisprudences civiles, pénales et administratives, des grands principes constitutionnels et des références européennes sinon mondiales qui s’imposent au  droit français. Bref, connaître nous-mêmes la loi pour la populariser et l’améliorer.

Ce travail ne coûte pas de l’argent, mais peut contribuer à faire renaître la dynamique de réflexion qui a disparu.

A défaut de ministre de l’enfance, il appartient  à la ministre de la justice, porteur de la loi, d’en prendre l’initiative.

Sur tous les bords de l’échiquier politique, elle recevra un relais même si chacun ne met pas derrière les droits les mêmes contenus ou les mêmes hiérarchies. Les sujets de consensus entre républicains ne sont pas si fréquents qu’il faille se priver de ceux qui existent. A preuve avec Claude Goasguen, élu UMP, député et maire du XVI°, nous présentions cette idée voici trois ans (1). Chacun gagnerait aujourd’hui à la concrétiser. Et après tout le code Taubira sur l’enfance vaudrait bien le « nouveau » code pénal  Badinter et, en tous cas,  mieux que le code Sarkozy sur la justice pénale des mineurs qui nous était promis.

(1)  "Quelle justice pour les jeunes délinquants ?", Editions  Autrement-La Croix,


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