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Conseil d’État - 330040

- wikisource:fr, 8/10/2009


Conseil d’État
7 septembre 2009


2ème/7ème SSR - Dassault - 330040


Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public



Sommaire

Visas

Vu 1°/ sous le n° 330040, la requête et le mémoire, enregistrés le 24 juillet et le 24 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour M. Serge A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’État :

1°) de réviser la décision n° 322236, 322237 du 8 juin 2009 en tant qu’elle a, d’une part, annulé le jugement du 6 octobre 2008 du tribunal administratif de Versailles rejetant la protestation de M. Bruno B dirigée contre les opérations électorales des 9 et 16 mars 2008 pour l’élection des conseillers municipaux dans la commune de Corbeil-Essonnes (Essonne) et la demande de ce dernier tendant au rejet du compte de campagne de M. A, d’autre part, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la commune de Corbeil-Essonnes et déclaré M. A inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d’un an ;

2°) de rejeter l’appel formé par M. B à l’encontre du jugement du 6 octobre 2008 du tribunal administratif de Versailles ;


Vu 2°/ sous le n° 330041, la requête et le mémoire, enregistrés le 24 juillet et le 24 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour M. Serge A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’État :

1°) de rectifier pour erreur matérielle la décision n°322236, 322237 du 8 juin 2009 en tant qu’elle a, d’une part, annulé le jugement du 6 octobre 2008 du tribunal administratif de Versailles rejetant la protestation de M. B dirigée contre les opérations électorales des 9 et 16 mars 2008 pour l’élection des conseillers municipaux dans la commune de Corbeil-Essonnes (Essonne) et la demande de ce dernier tendant au rejet du compte de campagne de M. Serge A, d’autre part, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la commune de Corbeil-Essonnes et déclaré M. A inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d’un an ;

2°) de rejeter l’appel formé par M. B à l’encontre du jugement du 6 octobre 2008 du tribunal administratif de Versailles ;


…………………………………………………………………………


Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; le code électoral ; le code pénal, notamment son article 441-7 ; le code de justice administrative ;

Motifs

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre une même décision ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu’à l’issue du second tour des élections municipales qui s’est déroulé le 16 mars 2008 à Corbeil-Essonnes (Essonne), la liste conduite par M. Serge A a recueilli 6621 voix et celle conduite par M. Bruno B 6451 voix ; que, par un jugement en date du 6 octobre 2008, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la protestation de M. B tendant à l’annulation de ces opérations électorales et au rejet du compte de campagne de M. A ; que M. B a fait appel devant le Conseil d’État de ce jugement en faisant notamment valoir que des dons d’argent avaient été faits à des électeurs par M. A dans la période précédant les élections ; que l’affaire, inscrite une première fois à l’audience publique du 25 mars 2009, a été rayée du rôle à l’issue de celle-ci afin de poursuivre l’examen contradictoire des attestations produites peu de temps avant l’audience et relatives aux dons d’argent qu’aurait effectués M. A ; qu’après cette radiation, la première sous-section de la section du contentieux du Conseil d’État, chargée de l’instruction de l’affaire, a procédé, en application de l’article R. 623-1 du code de justice administrative, à une enquête sur la question des dons d’argent qui auraient été versés à des particuliers pendant la période ayant précédé les élections municipales de Corbeil-Essonnes ; que, lors de cette enquête, qui s’est déroulée le 29 avril 2009 en présence de M. B et de M. A, assistés de leurs avocats, les membres de la formation d’instruction ont notamment entendu les personnes citées par les parties comme témoins, dont Mme Catherine D, témoin présenté par M. B ; que le procès-verbal de l’audience d’enquête, comportant en annexe les dépositions des témoins présentés par chacune des parties, a été communiqué à celles-ci le 30 avril 2009 ; que, par décision du 8 juin 2009, le Conseil d’État, statuant au contentieux a annulé le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 6 octobre 2008 et les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la commune de Corbeil-Essonnes et déclaré M. A inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d’un an ; que cette décision relève que, si les faits énoncés par quatre témoignages relatifs à la mise en place d’un système organisé de distribution d’argent par des membres de l’entourage de M. A à des électeurs de Corbeil-Essonnes peu avant ou entre les deux tours des élections ne peuvent être tenus pour établis, d’une part, plusieurs habitants de Corbeil-Essonnes ont attesté avoir eu directement ou indirectement connaissance de dons d’argent effectués par M. A en faveur d’habitants de la commune, y compris dans la période précédant les opérations électorales, l’un d’entre eux, présent à l’enquête, ayant formellement réitéré son témoignage dans des conditions conduisant à tenir pour établis les faits ainsi relatés, d’autre part, dans un document audiovisuel portant sur un échange entre les deux candidats pendant la campagne électorale et versé au dossier, M. A, interpellé sur l’existence de dons en argent aux habitants de la commune, ne conteste pas l’existence de telles pratiques mais en minimise la portée et nie qu’elles aient eu un caractère électoral ; qu’elle relève en outre que la circonstance que M. A ait porté plainte contre certains des témoins mentionnés ci-dessus et qu’il ait indiqué que la réponse qu’il donnait dans le document audiovisuel correspondait à un trait d’humour ne saurait ôter leur caractère probant aux éléments établissant l’existence de pratiques de dons en argent à destination des habitants de la commune, dont l’ampleur, bien que ne pouvant pas être déterminée avec précision, avait été, eu égard à l’écart de voix, de nature à altérer la sincérité du scrutin et à en vicier les résultats ; qu’elle en déduit que, du fait de ces dons d’argent, dont le montant ne peut être tenu pour négligeable, le compte de M. A ne retrace pas l’ensemble des dépenses engagées et qu’il y a donc lieu, compte tenu du caractère substantiel des irrégularités constatées, de rejeter son compte de campagne et de prononcer, en application de l’article L. 118-3 du code électoral, son inéligibilité pour un an comme conseiller municipal ; que, par la même décision du 8 juin 2009, le Conseil d’État, statuant au contentieux a aussi rejeté l’appel formé par M. B contre l’autre jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Versailles, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), a rejeté son compte de campagne et l’a déclaré inéligible pour une durée d’un an ; que le recours en révision et le recours en rectification d’erreur matérielle formés par M. A sont dirigés contre la décision du Conseil d’État en date du 8 juin 2009 en tant qu’elle annule les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la commune de Corbeil-Essonnes et qu’elle le déclare inéligible pour une durée d’un an comme conseiller municipal ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 834-1 du code de justice administrative : « Le recours en révision contre une décision contradictoire du Conseil d’État ne peut être présenté que dans trois cas :/ 1° Si elle a été rendue sur pièces fausses, / 2° Si la partie a été condamnée faute d’avoir produit une pièce décisive qui était retenue par son adversaire, / 3° Si la décision est intervenue sans qu’aient été observées les dispositions du présent code relatives à la composition de la formation de jugement, à la tenue des audiences ainsi qu’à la forme et au prononcé de la décision » ; que la révision d’une décision rendue par le Conseil d’État, statuant au contentieux ne peut être décidée que pour l’un de ces trois motifs limitativement énumérés ; qu’aux termes de l’article R. 833-1 du même code : « Lorsqu’une décision d’une cour administrative d’appel ou du Conseil d’État est entachée d’une erreur matérielle susceptible d’avoir exercé une influence sur le jugement de l’affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification » ; que le recours en rectification d’erreur matérielle n’est ainsi ouvert qu’en vue de corriger des erreurs de caractère matériel qui ne sont pas imputables aux parties et qui ont pu avoir une influence sur le sens de la décision ;

Sur les moyens relatifs aux visas et mentions de la décision du Conseil d’État :

Considérant que si M. A soutient, en premier lieu, que la décision du Conseil d’État ne vise ni les conclusions et moyens des parties, ni la décision ordonnant l’enquête ainsi que le procès-verbal établi à son issue, et ne porte pas la mention de sa lecture en audience publique, il ressort de la minute de cette décision, qui est tenue à la disposition des parties au greffe du Conseil d’État, que celle-ci comporte bien les visas et mentions indiqués ci-dessus ; que la circonstance que ces visas et mentions ne figurent pas dans l’ampliation adressée à M. A est sans incidence sur la régularité de cette décision ; qu’ainsi, ces moyens manquent en fait et ne peuvent donc, en tout état de cause, qu’être écartés ;

Sur les moyens relatifs aux conditions de l’instruction et, notamment, aux conditions de l’enquête ordonnée en application de l’article R. 623-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A fait grief, en deuxième lieu, à la décision du Conseil d’État d’avoir été rendue à la suite d’une enquête conduite dans des conditions irrégulières ; qu’il soutient, en particulier, que lui-même, défendeur à l’instance, ne pouvait pas être entendu lors de cette enquête, a fortiori sans que son adversaire ait été interrogé de manière contradictoire, et que Mme D, colistière de M. B et donc partie à l’instance, aurait dû avoir notification de la requête d’appel et ne pouvait pas être entendue en qualité de témoin, en tout état de cause, sans révéler les liens qu’elle avait avec M. B ;

Considérant en tout état de cause que, d’une part, devant le Conseil d’État, juge d’appel, pour les communes de plus de 3500 habitants, les candidats têtes de liste représentent, sauf circonstances particulières, l’ensemble des élus de leurs listes ; que, dès lors, le caractère contradictoire de la procédure est assuré par la notification de la requête d’appel et la communication des pièces du dossier aux candidats têtes de liste ayant obtenu des élus ; que, d’autre part, aux termes de l’article R. 623-1 du code de justice administrative : La juridiction peut, soit sur la demande des parties, soit d’office, prescrire une enquête sur les faits dont la constatation lui paraît utile à l’instruction de l’affaire ; qu’aux termes de l’article R. 623-2 du même code : La décision qui prescrit l’enquête indique les faits sur lesquels elle doit porter et précise, suivant le cas, si elle aura lieu soit devant une formation de jugement ou d’instruction, soit devant un de ses membres qui, le cas échéant, se transportera sur les lieux. Elle est notifiée aux parties ; qu’aux termes de l’article R. 623-3 de ce code : Les parties sont invitées à présenter leurs témoins aux jour et lieu fixés par la décision prescrivant l’enquête. / Elles peuvent assigner les témoins, à leurs frais, par acte d’huissier de justice. / La formation de jugement ou d’instruction ou le magistrat qui procède à l’enquête peut d’office convoquer ou entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile à la manifestation de la vérité ; qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article R. 623-4 de ce code : Chacun peut être entendu comme témoin, à l’exception des personnes qui sont frappées d’une incapacité de témoigner en justice ; que ces dispositions confèrent à une formation d’instruction comme à une formation de jugement le pouvoir de prescrire une enquête, si elle estime une telle mesure utile à la solution du litige ; qu’ainsi, la formation chargée de l’instruction de l’appel de M. B, qui a bien notifié aux parties sa décision par lettre recommandée, a pu régulièrement décider d’organiser une enquête sur les dons d’argent qui auraient été versés aux habitants de Corbeil-Essonnes durant la période électorale ; qu’il résulte de ces mêmes dispositions que la formation chargée de l’enquête peut entendre à cette fin, outre les parties, toute personne dont l’audition lui paraît utile à la manifestation de la vérité ; que la participation de M. A à cette enquête, loin de le mettre en position de plaider contre sa cause en méconnaissance des principes généraux des droits de la défense, lui permettait de faire valoir, ainsi que l’exige le caractère contradictoire de la procédure, sa version des faits discutés lors de cette enquête ; que la formation d’instruction n’était pas tenue d’interroger M. B sur les faits qu’il alléguait à l’appui de son appel ; qu’enfin, l’audition sous serment, en tant que témoin et non en tant que partie, de Mme D, qui déclarait avoir assisté à un don d’argent et s’était présentée à l’enquête à la demande de M. B, est sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors que tant la formation d’instruction que la formation de jugement avaient, contrairement à ce que soutient M. A, connaissance de sa qualité de colistière de M. B, ainsi qu’en fait foi le procès-verbal de l’enquête ; que, par suite, les moyens tirés de ce que l’enquête prescrite par la première sous-section de la section du contentieux se serait déroulée dans des conditions irrégulières ne peuvent qu’être écartés ;

Sur le moyen tiré de la participation au délibéré du rapporteur de l’affaire et du président de la formation d’instruction :

Considérant que M. A fait grief, en troisième lieu, à la décision du Conseil d’État d’avoir été rendue en présence du rapporteur et du président de la sous-section qui avait prescrit l’enquête au motif que leurs investigations dans le cadre de cette enquête leur interdisaient de participer à la formation de jugement ; que, toutefois, les membres de la formation chargée de l’instruction d’une affaire et, au premier chef, le rapporteur de l’affaire et le président de la formation, qui ne peuvent prendre des mesures d’instruction que pour mettre le dossier en état d’être jugé et qui ne sont habilités ni à prescrire des mesures de contrainte, ni à ordonner des poursuites, peuvent participer au jugement de cette affaire sans qu’il soit porté atteinte au principe d’impartialité qui s’impose à toute juridiction ; qu’il en va en particulier ainsi lorsqu’une enquête est prescrite en application de l’article R. 623-1 du code de justice administrative ; qu’en l’espèce, le président de la formation d’instruction n’a pas exercé d’autres pouvoirs que ceux qui lui étaient conférés par les dispositions précitées du code de justice administrative ; que, par suite, M. A n’est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir, dans le cadre de son recours en révision, que la formation qui a procédé au jugement de la requête de M. B était irrégulièrement composée en ce qu’elle comprenait le rapporteur de l’affaire et le président de la sous-section qui avait ordonné et conduit l’enquête prévue par l’article R. 623-1 du code de justice administrative ; que par ailleurs la régularité de la composition de la formation de jugement ne relève pas d’une erreur matérielle au sens de l’article R. 833-1 du code de justice administrative ;

Sur les moyens tirés de ce que les témoignages et documents pris en considération par le Conseil d’État constitueraient des faux :

Considérant, en quatrième lieu, qu’ont été versées au dossier, dès la procédure devant le tribunal administratif, douze attestations nominatives et signées d’habitants de Corbeil-Essonnes déclarant avoir eu connaissance de dons en argent effectués par M. A ou son entourage et un document audiovisuel réalisé par M. B dans lequel M. A ne nie pas de tels dons mais en minimise la portée ; que quatre nouveaux témoignages ont été produits pour la première fois devant le Conseil d’État par M. B le 18 mars 2009 ;

Considérant que M. A fait grief à la décision du Conseil d’État d’avoir été rendue sur la base de faux témoignages et d’un faux document audiovisuel ; qu’il fait valoir, à cet égard, d’une part, que les quatre personnes qui ont prétendu avoir organisé un système de distribution d’argent à son instigation ont fait de faux témoignages, ainsi que l’établissent les pièces produites à l’appui des recours et que ces personnes l’ont elles-mêmes reconnu et, d’autre part, que le témoignage de Mme D, qui comporterait des contradictions par rapport à son attestation écrite, ainsi que les autres témoignages figurant au dossier d’appel, qui comporteraient des approximations, rapporteraient des faits dont leurs auteurs n’ont pas été directement témoins ou auraient été démentis et qui ont fait l’objet de plaintes devant le juge pénal, doivent pour ces raisons également être regardés comme des faux ; qu’il fait enfin valoir que le document audiovisuel produit par M. B et enregistré à son insu, dans lequel il reconnaîtrait avoir effectué des dons en argent aux électeurs, serait un montage de séquences audiovisuelles et sonores dépourvu de caractère authentique ;

Considérant, d’une part, que le requérant ne saurait remettre en cause par la voie du recours en rectification d’erreur matérielle ou du recours en révision les appréciations de fait et la qualification des faits à laquelle s’est livrée la juridiction ; qu’il en résulte que l’appréciation portée par celle-ci sur la valeur de certaines pièces ne peut être contestée par la voie de tels recours, dès lors qu’il n’est pas établi que les documents sur lesquels elle s’est fondée sont des pièces fausses ; que, dans la mesure où l’argumentation du requérant aurait une telle portée, elle ne serait pas recevable ;

Considérant, d’autre part, que si le requérant entend soutenir que les éléments de fait sur lesquels se fonde la décision du Conseil d’État ont entaché celle-ci d’erreurs matérielles , au sens de l’article R. 833-1 du code de justice administrative, ou sont des pièces fausses , au sens du 1° de l’article R. 834-1 du même code, il convient de relever, tout d’abord, que les témoignages des quatre personnes qui prétendaient avoir mis en place un système organisé de distribution d’argent à l’instigation de M. A ont été écartés par le Conseil d’État dans sa décision ; qu’ainsi, la circonstance que leurs déclarations constitueraient des faux témoignages au sens de l’article 447-1 du code pénal ne saurait entraîner la révision de cette décision en application du 1° de l’article R. 834-1 du code de justice administrative ou sa rectification pour erreur matérielle en application de l’article R. 833-1 du même code ;

Considérant, ensuite, que ni la circonstance que Mme D ait rectifié, lors de son témoignage oral devant la formation chargée de l’instruction de l’affaire, certains des éléments de son témoignage écrit précédemment produit au dossier, notamment la date des faits dont elle avait été le témoin, ni la circonstance, d’ailleurs déjà relevée par le Conseil d’État dans sa décision, que M. A a porté plainte contre l’auteur de ce témoignage, ne permet de tenir pour établi qu’en prenant en compte les faits rapportés par Mme D, le Conseil d’État aurait fondé sa décision sur des pièces fausses , au sens du 1° de l’article R. 834-1 du code de justice administrative, ou qu’il aurait entaché celle-ci d’ erreurs matérielles , au sens de l’article R. 833-1 du même code ;

Considérant que la circonstance que d’autres attestations prises en considération par le Conseil d’État dans sa décision seraient indirectes ou insuffisamment précises, que leurs auteurs aient fait l’objet de plaintes pour faux témoignage et que deux démentis n’émanant pas des témoins aient été déposés ne suffit pas non plus à établir qu’en prenant en compte ces éléments, le Conseil d’État aurait fondé sa décision sur des pièces fausses , au sens du 1° de l’article R. 834-1 du code de justice administrative, ou qu’il aurait entaché celle-ci d’ erreurs matérielles , au sens de l’article R. 833-1 du même code ;

Considérant que seule une séquence du document audiovisuel produit par M. B a été retenue par la décision du Conseil d’État ; que la circonstance que, selon le rapport de l’expert mandaté par M. A, les séquences composant ce DVD auraient fait l’objet d’un montage, notamment pour y insérer des écrans de texte, ne suffit pas à établir que ce document serait un faux ou que la décision le prenant en considération serait entachée d’erreur matérielle ; qu’en outre, à aucun moment avant le dépôt des présents recours, M. A n’a mis en doute l’authenticité de ce document audiovisuel ; que s’il a nié à plusieurs reprises, y compris lors de l’enquête, avoir fait des dons d’argent, il n’a en revanche jamais soutenu, ni lors de la procédure au fond, ni lors de l’enquête, ni même à l’occasion des présents recours, qu’il n’aurait pas tenu les propos enregistrés sur ce document et relatifs à des dons en argent aux habitants de la commune ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les moyens, selon lesquels les témoignages et documents pris en considération par le Conseil d’État seraient des faux ou qu’en se fondant sur eux il aurait entaché sa décision d’erreurs matérielles, ne sont pas fondés ;

Considérant, enfin, qu’à supposer que les propos de M. A aient été enregistrés à son insu, alors même que son interlocuteur portait un micro visible, ces propos ont été tenus dans un lieu public en réponse aux questions d’une personne que le requérant connaissait comme étant son principal adversaire politique ; que le document audiovisuel produit par M. B a fait l’objet, à toutes les étapes de la procédure, d’un débat contradictoire à l’occasion duquel M. A a pu faire valoir toutes les explications qu’il souhaitait présenter ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce qu’un élément de preuve aurait été recueilli irrégulièrement doit, en tout état de cause, être écarté ;

Sur le défaut de réponse à des moyens en défense :

Considérant, en cinquième lieu, qu’à l’appui de son recours en rectification d’erreur matérielle M. A soutient avoir soulevé, dans son troisième mémoire en défense devant le Conseil d’État, des moyens en défense auxquels il n’aurait pas été répondu, tirés notamment de ce que les attestations de Mme D révèleraient des contradictions et de ce qu’il avait produit une attestation démentant formellement certains dons d’argent évoqués dans le document audiovisuel ; qu’il ressort cependant des pièces du dossier qu’il s’agissait d’arguments au soutien de moyens tirés du défaut d’authenticité de certains témoignages, auquel il a été répondu par la décision du Conseil d’État, et non de moyens auxquels la formation de jugement aurait involontairement omis de répondre ; que le moyen formulé sur ce point doit, par conséquent, en tout état de cause, être écarté ;

Sur le rejet de son compte de campagne :

Considérant, en sixième lieu, que M. A soutient, d’une part, que le défaut d’évaluation précise et chiffrée des dépenses qui n’auraient pas été retracées dans son compte constitue une erreur matérielle, d’autre part, que le raisonnement conduit dans la décision du Conseil d’État ne permet pas d’établir une pratique d’une ampleur telle qu’elle aurait altéré la sincérité du scrutin et représenté une somme d’un montant supérieur à la marge de tolérance de 1,5 % des dépenses engagées et non inscrites ;

Considérant que, par sa nature même, l’irrégularité retenue par la décision du Conseil d’État ne pouvait pas conduire à ce que soit exactement chiffré le montant des sommes qui auraient dû figurer au compte de campagne ; que, dans sa décision du 8 juin 2009, le Conseil d’État a estimé, au vu de l’ensemble des éléments produits au dossier, d’une part, que la pratique des dons d’argent avait été, eu égard à l’écart de voix, de nature à altérer la sincérité du scrutin et à en vicier les résultats, d’autre part, que le compte de campagne de M. A ne retraçait pas l’ensemble des dépenses engagées lors de la campagne électorale et présentait un excédent de dépenses par rapport aux recettes conduisant, en application des dispositions combinées des articles L. 52-12 et L. 118-3 du code électoral, au rejet du compte de campagne et à la déclaration de son inéligibilité en tant que conseiller municipal ; que ni le recours en révision, ni le recours en rectification d’erreur matérielle ne permet de mettre en cause l’appréciation qui a été portée sur ces points par le Conseil d’État, juge de l’élection ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les recours présentés par M. A ne peuvent pas être accueillis ;

Sur les conclusions de M. B tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A le versement à M. B d’une somme au titre des frais qu’il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;… (Rejet de la requête : rejet des conclusions de M. B tendant au versement des frais irrépétibles.)



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