Conseil d’État, 334905
- wikisource:fr, 20/01/2011
5 janvier 2011
Visas
Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 22 décembre 2009 et 5 janvier 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour M. et Mme Jean-François A, demeurant … ; M. et Mme A demandent au Conseil d’État :
1°) de rectifier pour erreur matérielle la décision n° 317010 du 28 octobre 2009 par laquelle le Conseil d’État a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux du 8 avril 2008, condamné le département de la Haute-Garonne à payer à M. et Mme A une somme de 21 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du refus opposé le 25 juin 1998 par le président du conseil général à leur demande d’agrément en vue d’une adoption, réformé le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 février 2006 en ce qu’il a de contraire à cette décision et mis à la charge du département de la Haute-Garonne le versement à M. et Mme A d’une somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, en tant qu’elle a omis de statuer sur leurs conclusions tendant à ce que le département de la Haute-Garonne soit condamné à leur verser les intérêts légaux afférents à l’indemnité de 21 000 euros qui leur a été allouée, calculés à compter de leur demande d’indemnisation présentée le 18 octobre 2000, avec capitalisation des intérêts échus au 9 septembre 2008 pour produire eux-mêmes des intérêts ;
2°) de condamner le département de la Haute-Garonne à leur verser les intérêts au taux légal afférents à l’indemnité de 21 000 euros qui leur a été allouée, calculés à compter de leur demande préalable présentée le 18 octobre 2000, avec capitalisation des intérêts échus au 9 septembre 2008, pour produire eux-mêmes des intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Motifs
Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 833-1 du code de justice administrative : Lorsqu’une décision d’une cour administrative d’appel ou du Conseil d’État est entachée d’une erreur matérielle susceptible d’avoir exercé une influence sur le jugement de l’affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification ;
Considérant que, par décision du 28 octobre 2009, le Conseil d’État statuant au contentieux a omis, après avoir annulé l’arrêt du 8 avril 2008 de la cour administrative d’appel de Bordeaux, de statuer explicitement sur les conclusions de M. et Mme A tendant à ce que le département de la Haute-Garonne soit condamné à leur verser les intérêts légaux afférents à l’indemnité de 21 000 euros qui leur a été allouée par cette décision, calculés à compter de leur demande d’indemnisation présentée le 18 octobre 2000, avec capitalisation des intérêts échus au 9 septembre 2008, date de la demande qui en a été faite par les requérants devant le Conseil d’État, pour produire eux-mêmes des intérêts ; que par suite, la requête présentée par M. et Mme A tendant à la rectification de l’erreur matérielle résultant de cette omission est recevable et qu’il y a lieu de statuer sur ces conclusions ;
Considérant, d’une part, que la créance détenue sur l’administration existe, en principe, à la date à laquelle se produit le fait qui en est la cause, sans qu’il soit besoin que le juge se livre au préalable à une appréciation des faits de l’espèce et en liquide le montant ; que, saisie d’une demande tendant au paiement de cette créance, l’administration est tenue d’y faire droit dès lors que celle-ci est fondée ; qu’en conséquence, contrairement à ce que soutient le département de la Haute-Garonne, les intérêts moratoires dus en application de l’article 1153 du code civil, lorsqu’ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l’administration ou, en l’absence d’une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; que, par suite, M. et Mme A ont droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 21 000 euros à compter du 18 octobre 2000, date à laquelle ils ont demandé réparation au département de la Haute-Garonne, et non à compter de la décision du Conseil d’État du 28 octobre 2009 comme le soutient ce département ;
Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 1154 du code civil : Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ; que pour l’application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu’à cette date il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s’accomplit à nouveau à l’expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu’il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que M. et Mme A ont demandé par un mémoire du 9 septembre 2008 la capitalisation des intérêts ; qu’à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu’il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande ;
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. et Mme A qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d’une somme au titre des frais exposés par le département de la Haute-Garonne et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du département de la Haute-Garonne le versement de la somme de 1 000 euros ;
DÉCIDE
Article 1er : Les motifs de la décision en date du 28 octobre 2009 du Conseil d’État statuant au contentieux sont complétés comme suit : Sur les intérêts et les intérêts des intérêts : Considérant que M. et Mme A ont droit aux intérêts de la somme qui leur est due à compter du 18 octobre 2000, date à laquelle ils ont demandé réparation au département de la Haute-Garonne ; qu’à la date du 9 septembre 2008, à laquelle ils ont présenté devant le Conseil d’État des conclusions à fin de capitalisation des intérêts, il était dû plus d’une année d’intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation pour les intérêts échus à cette date, puis à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci ; .
Article 2 : Les articles 3333, 44, 55, 66, 7 et 88 du dispositif de la décision du 28 octobre 2009 du Conseil d’État statuant au contentieux deviennent respectivement les articles 44, 5, 6, 7, 8 et 99. L’article 3 est ainsi rédigé : « Article 33 : La somme due à M. et Mme A portera intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2000. Les intérêts échus à la date du 9 septembre 2008, puis à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. »
Article 3 : Les conclusions du département de la Haute-Garonne tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le département de la Haute-Garonne versera à M. et Mme A une somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Jean-François A et au département de la Haute-Garonne.