Intime conviction, un procès d’assises pour le Web entre réalisme et fiction
Le blog Dalloz - bley, 13/11/2012
Intime conviction, c’est le nom qu’a choisi la chaîne Arte France pour son nouveau concept lancé à la rentrée et coproduit par Maha Productions. Une fiction policière et judiciaire tournée en deux volets, dont l’un est destiné à la télévision et l’autre au Web : « la première fiction française imaginée pour la télévision et pour le Web », insiste la chaîne. L’idée était de suivre un dossier criminel depuis le déroulement des faits jusqu’au jugement du principal accusé en cour d’assises, en reconstituant chacune des étapes de cette affaire.
Sur le banc des accusés justement, Paul Villiers, incarné par l’acteur Philippe Torreton, qui s’était déjà illustré en 2011 dans Présumé Coupable, un film retraçant l’affaire judiciaire emblématique d’Outreau et dans lequel il jouait le rôle principal d’un des coaccusés. Pour Intime conviction, il devient un médecin légiste, qui, un soir d’automne, fait la macabre découverte du corps de sa femme Manon (Marie Baümer) dans la salle de jeux de leurs enfants. Toute l’intrigue de cette première partie du programme d’Arte est distillée entre le récit de la mort mystérieuse de Manon et l’enquête de police menée par la capitaine Judith Lebrun (Camille Japy) autour du mari qu’elle soupçonne être l’auteur des faits, jusqu’à la mise en examen de ce dernier. Une affaire qui pourra en rappeler d’autres, bien réelles, comme celle de ce professeur de droit du nom de Viguier, longtemps accusé du meurtre de sa femme disparue, dont le corps n’a jamais été retrouvé et qui fût finalement acquitté en appel en 2010. Le tournage, qui se déroule du côté de Biarritz en ce moment même, sera diffusé sur la chaîne en 2013 sous forme d’un téléfilm de quatre-vingt-dix minutes. Coécrit par Rémy Burkel et Dominique Garnier, il est réalisé par Rémy Burkel, qui avait déjà tourné les cinq épisodes de Justice à Vegas (2007), sur des enquêtes criminelles.
Jusque-là, rien de très original comme type de programme proposé par une chaîne de télévision. Sauf qu’Arte a décidé de prolonger la fiction sur son site internet, et pas seulement avec des extraits vidéo, des liens ou anecdotes pour en savoir plus sur le téléfilm. Cette fois, la chaîne a décidé de tester un projet tout à fait expérimental : mettre en scène le principal accusé de ce dossier criminel, Paul Villiers, à travers un procès réalisé dans des conditions semi-réalistes. Un véritable défi d’acteur puisque ce personnage de fiction sera jugé par des magistrats professionnels qui siégeront dans la salle du tribunal de grande instance de Tours : Jean-Pierre Deschamps, ex-président de la cour d’assises d’Aix-en-Provence, jouera son propre rôle de président de cour d’assises, face aux autres professionnels du droit Françoise Cotta, avocat de la défense, Jean Alègre, avocat de la partie civile, ainsi que Jean-Claude Kross, avocat général de la cour d’appel de Paris dans la vie. Ils seront entourés d’un jury de six internautes, recrutés via des bulletins de candidature envoyés jusqu’au 14 octobre 2012. Un jury auquel la chaîne promet de vivre une expérience inédite, comme on peut le lire sur le site internet dédié : « entrez dans les coulisses de l’affaire et devenez de véritables acteurs du procès » ; « et si le destin d’un homme était entre vos mains ? ». À l’instar de programmes à fort audimat comme Faites entrer l’accusé, les producteurs d’Intime conviction misent sur l’attrait des Français à l’égard des grands dossiers criminels et leur promettent de se mettre dans la peau de véritables jurés. À l’issue d’une rencontre à Tours, six candidats présélectionnés ont donc été choisis pour faire partie du procès dont le tournage a lieu du 12 au 16 novembre 2012. Ceux qui n’auront pas été retenus auront l’opportunité de suivre sur internet l’évolution du dossier d’instruction après la diffusion du téléfilm sur le petit écran. Le procès sera retransmis pendant quatre semaines à travers vingt épisodes de Webfiction durant lesquelles les internautes auront accès à des pièces du dossier et des modules vidéo quotidiens. Une occasion exceptionnelle d’interagir tout au long de la diffusion du programme pour faire partager leur propre intime conviction.
Anaïs Coignac
Journaliste