Rupture des relations commerciales établies et la difficile reconnaissance du critère de l’originalité pour les photographies
Le blog Dalloz - bley, 14/12/2012
La cour d’appel de Paris, dans un récent arrêt du 14 novembre 2012, a eu l’occasion de rappeler, dans le cadre d’une relation commerciale entre une société de photographie et un club de football, la notion de relations commerciales établies, d’une part, et les conditions d’observation de l’originalité de photographies sportives, d’autre part.
En l’espèce, une société exerçant une activité de photographie avait conclu avec un club de football trois contrats de publicité et de promotion aux termes desquels elle assurait la couverture photographique de l’activité sportive du club en contrepartie de bannières publicitaires placées en divers emplacements du stade de ce club de foot.
Les négociations en vue du renouvellement du partenariat entre ces deux organismes n’ayant pas abouti et estimant que le club de football exploitait ses photographies sans droit, la société de photographie, à la suite d’une mise en demeure infructueuse, assignait le club de football devant le tribunal de grande instance de Paris en rupture brutale et abusive de leurs pourparlers commerciaux ainsi qu’en violation de droits d’auteur sur les photographies.
Par jugement contradictoire du 28 janvier 2011, le tribunal de grande instance de Paris a débouté la société demanderesse de ses demandes au titre de la rupture brutale des relations commerciales et des pourparlers et a déclaré irrecevable ses demandes fondées sur le droit d’auteur.
Aussi, celle-ci a interjeté appel de la décision.
Aux termes de l’arrêt du 14 novembre 2012, la cour d’appel de Paris a méthodiquement confirmé en tout point l’arrêt rendu en première instance.
Sur la rupture brutale de la relation commerciale et des pourparlers, elle rappelle que la notion de relation commerciale établie est indépendante de celle de contrat à durée déterminée et qu’il importe peu que les contrats de publicité et de promotion aient été conclus pour des durées déterminées et qu’ils aient été renouvelables.
Aussi, la succession de contrats régulièrement renouvelés à leur échéance pendant trois années dans les mêmes conditions, était de nature à donner à la relation entre les parties un caractère significatif et stable caractérisant une relation commerciale établie au sens de l’article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce.
Néanmoins, la rupture de la relation commerciale résultait de la société de photographie, qui avait conditionné la conclusion du prochain contrat au règlement d’une facture impayée. Aussi, partant de là, cette société ne pouvait faire grief au club de football d’avoir rompu brutalement cette relation commerciale.
Sur la violation des droits patrimoniaux d’auteur, la société appelante invoquait la protection au titre des droits d’auteur sur les photographies litigieuses en ce qu’elles étaient originales dans la mesure où ses auteurs ont « librement et en toute indépendance choisi les sujets, les instants, les angles et les cadrages de chaque prise de vue ».
Au regard de ces photographies sportives, la cour d’appel a néanmoins considéré qu’elles ne relevaient d’aucune recherche personnelle du photographe sur l’angle de prise de vue, le cadrage, les contrastes, la lumière, etc. Par ailleurs, les retouches ultérieures ne résultaient, selon la cour d’appel, que de manipulations techniques facilitées par l’emploi de logiciels de retouches photographique numérique et présentaient un caractère banal ne portant pas l’empreinte de la personnalité du photographe.
Ainsi, la société de photographie ne pouvait revendiquer aucun droit d’auteur sur l’ensemble des photographies litigieuses.
Antoine Chéron
Avocat au Barreau de Paris et de Bruxelles, ACBM avocats