Hénin-Beaumont : Le pari de Jean-Luc Mélenchon
Actualités du droit - Gilles Devers, 11/05/2012
La SARL Le Pen attendait avec gourmandise l’arrivée de sa gérante à l’Assemblée Nationale, mais ça semble se compliquer et on le doit à Jean-Luc Mélenchon. Je le remercie sincèrement. Tout le monde ne se planque pas, c’est très bien. Rien n'est fait, mais ce serait un beau message venant de ce pays de grande histoire.
L’enjeu, c’est la 11° circonscription du Pas-de-Calais : Hénin-Beaumont, Carvin, Courrières, Oignies, Leforest, Montigny-en-Gohelle, Rouvroy… Ce sont de bonnes terres électorales pour le PS, et le score d’Hollande au deuxième tour a été de 56,18 sur le département. La circonscription est au PS de longue date, alors pourquoi cette arrivée ?
Tout le problème est que la 11° circonscription est minée par les turpitudes du PS. Pas de doute : si Marine Le Pen, depuis son château de Montretout (Hauts-de-Seine) s’est intéressée à cette circonscription, c’est parce que c’est la plus prenable par le FN, et la faute en revient au PS.
La cause ? Des affaires crapulo-financières, suffisamment graves pour avoir conduit le maire de Hénin-Beaumont, Gérard Dalongeville (PS), en prison pour corruption, avec comme suite des divisions, des déchirements sans fin… L’an dernier, il a raconté les faits à sa manière dans une livre au titre évocateur : « Rose mafia ». Ambiance. Ajoutez il y a quelques mois l’ouverture d’une enquête judicaire sur la fédération du PS du Pas-de-Calais.
La circonscription est celle du bassin minier, et elle souffre de la désindustrialisation : 13% de demandeurs d’emploi.
Le député sortant, Pierre Facon (PS), ne se représente pas, après 15 ans de mandat, et le PS a investi Philippe Kemel, le maire de Carvin, à la suite d’une primaire qui a laissé des traces.
La Droite, qui était divisée, va présenter un candidat unique, Jean Urbaniak
Marine Le Pen a été conseillère municipale d’Hénin-Beaumont 2008 à 2011, et elle est depuis 2010 conseillère régionale. En 2007, elle s’était qualifiée au second tour – seul cas FN sur le pays – et elle avait perdu avec 41,65%. Le président de son comité de soutien était un élu local PS, secrétaire de section et adjoint au maire de Leforest pendant 4 mandats... Aux municipales de 2009 à Hénin-Beaumont, sa liste avait atteint 47,62 % des voix.
Au premier tour de la présidentielle, elle est arrivée en tête dans la circonscription avec 31% des voix, devant Hollande 28,75, Sarkozy 15,79, Mélenchon 14,85 et Bayrou 4,55. Il y a une dynamique locale, incontestable.
Alors ?
Le parachutage est un art difficile, mais Mélenchon a du métier. Et puis dans le contexte local, être étranger au feuilleton PS du coin présente des atouts. Mais le problème est moins ce parachutage que la nécessité d’arriver en tête de la Gauche au premier tour...
Pour cela, Mélenchon doit faire fort : inverser le résultat des présidentielles, où il était arrivé loin derrière Hollande. Or, il aura tout l’appareil du PS contre lui.
Vu le rôle national de Mélenchon, l’enjeu de la circonscription, et la candidature de Kemel ressortie fragilisée des primaires, la sagesse serait une candidature unique de Mélenchon au premier tour. Mais la fédération du Pas-de-Calais n’a pas l’air enthousiasmée par l’arrivée du leader du Front de Gauche, et on voit mal Martine Aubry ou François Hollande imposer quoique ce soit à cette fédération. Il reste juste quelques jours pour dealer, soit avant le 18. On verra.
Le second tour sera peut-être plus simple… si l’ambiance est restée correcte à Gauche.
Si le second tour est un affrontement Mélenchon/Le Pen, il devrait rassembler la Gauche et une large partie de la Droite, car on ne voit pas l’UMP faire un cadeau à Le Pen.
La Droite unie peut être au second tour, et ce sera une triangulaire. Sur la base du premier tour de la présidentielle, la Gauche est 43 et Le Pen à 31…
C’est donc jouable, mais il reste à faire une bonne campagne. Pas de Le Pen à l’Assemblée,… ça vaut la peine.
Il faut faire confiance à ce pays de grande histoire