Une erreur judiciaire presque parfaite (bibliographie)
Paroles de juge - , 30/12/2012
Valérie Mahaut, journaliste au Parisien, a publié en décembre 2012 aux éditions du Moment (leur site) un livre intitulé :
"Une erreur judiciaire presque parfaite", sous-titré "Meurtre du Pont de Neuilly, enquête sur la
fabrication du "coupable" Marc Machin"
Ce livre est publié alors que M. Marc Machin, condamné successivement par deux cours d'assises en 2004 et
2005, vient d'être acquitté par une nouvelle cour d'assises après renvoi devant celle-ci par la chambre criminelle de la cour de cassation (lire ici) elle même saisie par la
commission de révision des condamnations pénales (lire ici). Il
aura, injustement, passé plus de six années en prison.
Valérie Mahaut nous raconte les épisodes successifs de cette histoire peu banale, en commençant, alors
que Marc Machin effectue sa peine en prison, par l'entrée dans un commissariat parisien, le 3 mars 2008, d'un homme venu s'accuser d'avoir commis deux crimes dont celui pour lequel M. Machin a
été condamné à deux reprises (viol et meurtre d'une femme).
Ce qui retient particulièrement l'attention, c'est, une fois de plus, le fait qu'un individu ce soit, en
garde à vue, accusé d'un crime qu'il n'a pourtant pas commis. D'où cette question particulièrement dérangeante et que nous avons déjà abordée ici, notamment à travers le débat sur la présence des
avocats en garde à vue : que peuvent bien faire et/ou dire les enquêteurs, pendant la période de garde à vue, pour qu'un homme qui n'a commis aucun crime s'accuse d'avoir violé puis tué une femme
qu'il n'a jamais rencontrée ?
Le petit regret, à le lecture du livre, tient au fait que l'on ne sait toujours pas exactement et en
détails ce qui s'est passé dans les locaux de la brigade criminelle parisienne pour que M. Machin se dénonce lui-même pour des faits qu'il n'avait pas commis. On voudrait pourtant comprendre
mieux, cela d'autant plus que l'un des policiers dont il est fait mention était considéré comme excellent dans l'art d'obtenir... des aveux. Il aurait été intéressant de décortiquer les
stratagèmes utilisés pour tenter d'analyser comment ils ont conduit à une telle aberration (lire not. ici).
Ce qui manquera aussi pour toujours, c'est, puisque M. Machin a été jugé avant janvier 2012, les
motivations de la première cour d'assises ainsi que de la cour d'assises d'appel. Autrement dit il aurait été utile, pour l'analyse à distance du processus judiciaire, de savoir quels ont été les
principaux arguments retenus pour justifier les déclarations de culpabilité successives. De telles affaires montrent une fois de plus si besoin était, combien la modification de la loi imposant
dorénavant une motivation minimale des décisions des cours d'assises est une bonne chose.
En tous cas ce livre, qui décrit une histoire particulièrement dramatique, est source de nombreuses
réflexions.
Sa lecture sera utile à tous ceux qui sont intéressés par la justice pénale.