Le contexte conflictuel, un faux obstacle à la rupture conventionnelle
K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Stéphane Bloch, Gratiane Kressmann, 26/11/2013
Depuis sa mise en place par la loi n°2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail, la rupture conventionnelle connaît un véritable succès. Toutefois, elle a pu être quelque peu freinée dans son élan par un obstacle récurrent : le contexte conflictuel entourant la rupture du contrat de travail.
L’article L 1237-11 du code du travail (issu de la loi n°2008-596, 25 juin 2008, art 5. III) dispose que :
« L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. »
La rupture conventionnelle ne peut ainsi résulter que d’un consentement mutuel de l’employeur et du salarié. Elle suit une procédure strictement encadrée qui vise à garantir la liberté de consentement des parties.
Pour rappel, la procédure est fondée sur un triptyque obligatoire:
1. Les parties doivent s’entretenir et convenir ensemble des conditions de rupture du contrat de travail à durée indéterminée ;
2. Les parties signent la convention de rupture et remplissent le formulaire à adresser à la DIRECCTE (formulaire cerfa n°14598*01 Rupture conventionnelle d’un contrat de travail à durée indéterminée et formulaire de demande d’homologation) ;
3. Passé un délai de rétractation de quinze jours calendaires, la convention de rupture est adressée à la DIRECCTE pour homologation. Cette dernière vérifie le bon déroulement de la procédure et le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle qui ne peut être inférieure à l’indemnité légale.
Jusqu’à présent, au regard des divergences de jurisprudence des juges du fond, des employeurs, en conflit avec leur salarié, pouvaient hésiter à mettre en œuvre cette option de rupture du contrat de travail de crainte de la voir requalifier en un licenciement abusif dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En effet, alors que la Cour d’appel d’Angers affirmait qu’une « rupture conventionnelle ne peut valablement intervenir qu’en dehors de tout litige ayant déjà émergé», la Cour d’appel de Paris refusait d’annuler une rupture conventionnelle pour un avertissement notifié au salarié avant la signature de la convention mais non contesté par lui (CA Angers,20 décembre 2012, n°10-02401 ; CA Paris, 22 février 2012, n°09-07814).
Le 23 janvier 2013, la Cour d’appel de Montpellier a suivi le raisonnement de la Cour d’appel de Paris et a précisé à cette occasion que la loi du 25 juillet 2008 n’avait jamais eu pour objectif de subordonner « la mise en œuvre de la rupture conventionnelle à l’absence d’un litige antérieur entre employeur et salarié ou salarié et employeur » (CA Montpellier, 23 janvier 2013, n°11-07067).
Dans un arrêt du 23 mai 2013, la Haute juridiction prend enfin position
et met un terme à ces divergences jurisprudentielles. Elle estime « que, si l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle ne peut-être imposée par l’une ou l’autre des parties » (Cass. soc. 23 mai 2013 n°12-13.865).
La Chambre sociale a depuis plusieurs fois confirmé sa décision du mois de mai en reprenant son attendu de principe : elle écarte ainsi définitivement la possibilité d’invoquer l’existence d’un contexte conflictuel comme seul argument de nullité de la convention (Cass.soc. 26 juin 2013, n° 12-15.208 ; Cass.soc. 3 juillet 2013 n°12-19.268 ; Cass.soc. 30 septembre 2013, n°12-19.711).
La Cour s’attache désormais à clarifier la situation et reprend la lettre de la loi.
En l’absence d’atteinte prouvée au libre consentement des parties dans l’établissement de la convention de rupture et à la régularité de la procédure d’homologation, la convention de rupture est valable. La partie lésée devra donc rapporter la preuve que son consentement a été vicié (par exemple : comportement frauduleux du salarié à l’encontre de son employeur, viciant le consentement de ce dernier).
La Haute juridiction se montre assez exigeante sur les éléments de preuve ce qui réduit sensiblement le risque de requalification en un licenciement abusif d’une rupture conventionnelle intervenue dans un contexte conflictuel. Dans un arrêt du 30 septembre 2013, la Chambre sociale considère ainsi « qu’il ne résulte ni des pièces de la procédure ni de l’arrêt que le salarié a invoqué devant les juges du fond des agissements précis de l’employeur susceptibles de laisser présumer un harcèlement moral » (Cass.soc. 30 septembre 2013, n°12-19.711).
En conclusion, l’existence d’un contexte conflictuel précédent ou concomitant à la rupture n’est pas en lui-même un motif de nullité de la convention sauf dans le cas où il serait rapporté la preuve qu’il a été l’instigateur de réelles pressions ayant forcé le consentement de l’une des parties.
« L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. »
La rupture conventionnelle ne peut ainsi résulter que d’un consentement mutuel de l’employeur et du salarié. Elle suit une procédure strictement encadrée qui vise à garantir la liberté de consentement des parties.
Pour rappel, la procédure est fondée sur un triptyque obligatoire:
1. Les parties doivent s’entretenir et convenir ensemble des conditions de rupture du contrat de travail à durée indéterminée ;
2. Les parties signent la convention de rupture et remplissent le formulaire à adresser à la DIRECCTE (formulaire cerfa n°14598*01 Rupture conventionnelle d’un contrat de travail à durée indéterminée et formulaire de demande d’homologation) ;
3. Passé un délai de rétractation de quinze jours calendaires, la convention de rupture est adressée à la DIRECCTE pour homologation. Cette dernière vérifie le bon déroulement de la procédure et le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle qui ne peut être inférieure à l’indemnité légale.
Jusqu’à présent, au regard des divergences de jurisprudence des juges du fond, des employeurs, en conflit avec leur salarié, pouvaient hésiter à mettre en œuvre cette option de rupture du contrat de travail de crainte de la voir requalifier en un licenciement abusif dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En effet, alors que la Cour d’appel d’Angers affirmait qu’une « rupture conventionnelle ne peut valablement intervenir qu’en dehors de tout litige ayant déjà émergé», la Cour d’appel de Paris refusait d’annuler une rupture conventionnelle pour un avertissement notifié au salarié avant la signature de la convention mais non contesté par lui (CA Angers,20 décembre 2012, n°10-02401 ; CA Paris, 22 février 2012, n°09-07814).
Le 23 janvier 2013, la Cour d’appel de Montpellier a suivi le raisonnement de la Cour d’appel de Paris et a précisé à cette occasion que la loi du 25 juillet 2008 n’avait jamais eu pour objectif de subordonner « la mise en œuvre de la rupture conventionnelle à l’absence d’un litige antérieur entre employeur et salarié ou salarié et employeur » (CA Montpellier, 23 janvier 2013, n°11-07067).
Dans un arrêt du 23 mai 2013, la Haute juridiction prend enfin position
et met un terme à ces divergences jurisprudentielles. Elle estime « que, si l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle ne peut-être imposée par l’une ou l’autre des parties » (Cass. soc. 23 mai 2013 n°12-13.865).
La Chambre sociale a depuis plusieurs fois confirmé sa décision du mois de mai en reprenant son attendu de principe : elle écarte ainsi définitivement la possibilité d’invoquer l’existence d’un contexte conflictuel comme seul argument de nullité de la convention (Cass.soc. 26 juin 2013, n° 12-15.208 ; Cass.soc. 3 juillet 2013 n°12-19.268 ; Cass.soc. 30 septembre 2013, n°12-19.711).
La Cour s’attache désormais à clarifier la situation et reprend la lettre de la loi.
En l’absence d’atteinte prouvée au libre consentement des parties dans l’établissement de la convention de rupture et à la régularité de la procédure d’homologation, la convention de rupture est valable. La partie lésée devra donc rapporter la preuve que son consentement a été vicié (par exemple : comportement frauduleux du salarié à l’encontre de son employeur, viciant le consentement de ce dernier).
La Haute juridiction se montre assez exigeante sur les éléments de preuve ce qui réduit sensiblement le risque de requalification en un licenciement abusif d’une rupture conventionnelle intervenue dans un contexte conflictuel. Dans un arrêt du 30 septembre 2013, la Chambre sociale considère ainsi « qu’il ne résulte ni des pièces de la procédure ni de l’arrêt que le salarié a invoqué devant les juges du fond des agissements précis de l’employeur susceptibles de laisser présumer un harcèlement moral » (Cass.soc. 30 septembre 2013, n°12-19.711).
En conclusion, l’existence d’un contexte conflictuel précédent ou concomitant à la rupture n’est pas en lui-même un motif de nullité de la convention sauf dans le cas où il serait rapporté la preuve qu’il a été l’instigateur de réelles pressions ayant forcé le consentement de l’une des parties.