Patrick Communal, avocat, 2016
Actualités du droit - Gilles Devers, 6/01/2016
Patrick Communal, après une longue et belle carrière d’avocat au Barreau d’Orléans, impliqué dans la défense des libertés individuelles et collectives, a pris sa retraite cette fin d’année. Voici le récit qu’il a publié de sa dernière affaire traitée. Les avocats, et particulièrement ceux rodés à la plaidoirie comme l’est Patrick Communal, savent à quel point il est difficile de convaincre, et que c’est déjà beaucoup quand on est parvenu à se faire comprendre. Voici un texte fort, sincère… que l’on comprend. L’un des plus beaux recueils de poèmes de Paul Éluard s’appelle « Donner à voir ». Le cri du cœur de Patrick Communal nous « donne à réfléchir »… Nous sommes en janvier 2016. A bientôt Patrick.
Ce matin j’ai prononcé mon ultime plaidoirie pour défendre un jeune musulman assigné à résidence qui risque de perdre son emploi et le bénéfice de sa formation professionnelle. J’ai donné le meilleur de moi-même face à un juge qui cherchait des arguties de procédure pour ne pas être contraint de statuer au fond et protéger nos libertés publiques. Quand les libertés publiques ont été remises en cause, jamais les juges de ce pays ne les ont protégées. Je n’aurais donc pas dû m’en étonner. La salle était vide, glaciale. Dans les bancs du public, deux agents des services de renseignement qui prenait des notes. L’impression d’être en RDA, surveillé par la Stasi.
J’ai rangé ma robe avec une envie de pleurer surtout ça. Cette expérience ultime du barreau m’a apporté la conviction que la république bourgeoise est une escroquerie intellectuelle et morale, et que l’État protecteur est devenu une menace pour les citoyens, dans l’ignorance et dans l’indifférence générale. Ce matin à 11 heures, je suis devenu anarchiste. Bonne année 2016.