Elle est Royal !
Justice au singulier - philippe.bilger, 4/01/2013
On ne l'oublie pas, elle ne se laisse pas oublier.
Au moment où à nouveau un discours de la méthode - des banalités dont on s'étonne qu'elles aient eu besoin d'être répétées - a été adressé au gouvernement par le président de la République, Ségolène Royal, dans un entretien à VSD, fait valoir son ambition de rester plus que jamais dans le jeu politique et, surtout, le caractère irremplaçable de sa personnalité. Ce n'est pas parce qu'elle a refusé - elle a raison de s'en repentir- le poste de garde des Sceaux qu'elle doit laisser dorénavant en friche le cours de son destin public.
Il n'y a pas l'ombre d'une outrecuidance dans cette certitude exprimée de représenter un atout pour la gauche, notamment la gauche de gouvernement. Comment oublier que cette candidate, en 2007, a engrangé, lors du combat présidentiel, dix-sept millions de voix et que, si elle avait été soutenue par son camp comme le père de ses enfants l'a été en 2012, elle l'aurait vraisemblablement emporté contre Nicolas Sarkozy ?
Je ne veux pas mêler à ce billet plus politique qu'intime des considérations personnelles mais il est plus qu'évident qu'en 2012 notamment, les Français dans leur ensemble ont admiré la force d'âme de Ségolène Royal, son allure dans tous les sens du terme et sa capacité à encaisser des coups et des affronts que la jalousie qui les inspirait ne rendait pas plus acceptables. Elle a conquis, grâce à sa dignité, bien au-delà de sa mouvance.
J'entends bien la difficulté de lui trouver un poste, une fonction à la hauteur de ses aptitudes et compétences d'aujourd'hui mais il conviendrait que le président de la République, pour chasser définitivement tout soupçon de faiblesse amoureuse, tranchât vite en sa faveur. Ce ne serait pas du luxe ! Cohn-Bendit n'avait pas tort, en effet, quand il déplorait dans ce gouvernement le manque de "pointures": quelle meilleure opportunité pour donner de l'éclat et une efficace lisibilité politique à ce dernier que d'impliquer Ségolène Royal dans un combat qui à force d'être reporté finit par prendre les couleurs de l'impossible !
J'ajoute que Ségolène Royal - nulle condescendance de ma part dans cette appréciation - a mûri depuis 2007. Je n'évoque pas son physique altier mais son argumentation, ses analyses, ses propos, son soutien clairvoyant mais lucidement critique et sa volonté à la fois de se fondre et de se distinguer. Ces dispositions, chez elle, ont pris une ampleur, une profondeur et une justesse qui n'ont plus rien de commun avec l'enthousiasme frais et un tantinet naïf de la candidate harcelée et stupidement moquée de 2007.
Elle ne se laisse pas oublier. Qu'elle ne se fasse aucun souci sur ce plan, elle demeure plus que jamais, admirée, estimée, courageuse, imprévisible, irritante, singulière, dans la tête des Français.
Elle est Royal.