La ligne de fuite
Justice au singulier - philippe.bilger, 15/08/2013
Petit appendice à une querelle de fond qui n'était pas médiocre et qu'on s'acharne à banaliser au lieu de l'affronter et d'en tirer les conséquences.
Serait-ce typique du comportement présidentiel de François Hollande ?
En tout cas, le Premier ministre a bien appris de son maître avec sa réaction face à l'antagonisme sérieux entre Christiane Taubira et Manuel Valls.
Ce dernier conscient du fait qu'on ne lui demande surtout pas de révéler les problèmes - plus aucune excuse, alors, pour ne pas tenter de les résoudre ! - a usé, déjà, de l'argument classique sur la richesse du débat qui sera tranché en définitive par le Président et le Premier ministre. C'est un peu pauvre après le courrier si vivement pertinent adressé par le ministre au président de la République. A l'insu du garde des Sceaux.
François Hollande est, paraît-il, furieux d'avoir vu sa mobilité ostensible de la période estivale dégradée par ce couac entre deux ministres qui voudraient l'obliger à choisir l'un ou l'autre alors qu'il passe son temps à tenter des synthèses impossibles entre l'eau et le feu (Le Canard enchaîné).
Mais que dire de Jean-Marc Ayrault qui croit avoir apaisé un conflit alors qu'il n'a fait qu'ajouter à l'ambiguïté ?
En effet, il déclare à la fois qu'il n'y a qu'une ligne au gouvernement - alors que tout démontre, pour la sécurité et la Justice, qu'il y en a au moins deux - et qu'une "justice ferme et efficace" est en chantier (20 minutes).
Ou il n'a pas lu le projet de loi concocté par la ministre et ses services ou, à sa manière, il prend ouvertement parti pour Manuel Valls.
Tant la fermeté et l'efficacité d'une politique pénale - avec l'improbable peine de probation (Le Monde) - ne constituent pas la préoccupation fondamentale de Christiane Taubira.
Faut-il plus tristement conclure, au grand dam des citoyens de gauche comme de droite, que la seule ligne tangible et indiscutable de ce Pouvoir est la ligne de fuite ?