Des élections italiennes qui nous parlent
Actualités du droit - Gilles Devers, 28/02/2013
Les Français pensent avec obstination que ce qui arrive aux US sera chez eux dans quelques années…alors que les deux sociétés sont si différentes. L’histoire montre plutôt que c’est ce que vivent les Italiens qui devient vite notre quotidien. Au menu du jour : la déliquescence de la politique.
Tout le monde est d’accord : Les Italiens n’ont pas voté comme il faut… Déjà, on parle d’organiser un nouveau vote. C’est comme après la dégelée de Jospin, doublé par Le Pen. Les scrutins qui ne correspondent pas aux prévisions n’existent pas. Pourtant, les Italiens ont voté en masse et disent des choses très claires :
- Un camouflet pour Monti (ancien de la Goldmann Sachs), tellement vanté dans la presse qu’il a cru être devenu populaire ;
- Un score de miraculé pour Berlusconi, du haut de ses 74 ans, avec un feu d’artifices de promesses et des attaques débiles contre « l’Europe allemande », la source de tous les maux ;
- Un triomphe (Plus de 25% des voix) pour Beppe Grillo, qui assume d’être illusionniste et incohérent, car il veut dénoncer la pourriture du système et surtout ne pas exercer le pouvoir ;
- Une raclée pour la gauche normale, qui attendait gentiment que le bon peuple lui donne les bonnes places…parce qu’elle est gentille.
Les Italiens n’ont pas cherché à dégager la voie pour un gouvernement raisonnable. Les responsables politiques n’étant pas sérieux, les électeurs le leur disent avec sincérité. L’un ou l’autre… la solution ne passe pas par là. Le pouvoir politique d’Etat est passé au second plan.
La situation est-elle si différente en France ?
La gérante de la SARL Le Pen affirme qu’elle veut redonner sa grandeur à la France… mais elle refuse toute alliance électorale pour être sûre de ne jamais gagner. Bouffonnerie parfaite.
L’UMP est un champ de bataille, avec son hilarant vote démocratique interne, la demi-portion Fillon annonçant qu’il s’apprête à sauver la France, la danse du ventre de Sarko-le-loser sur son éventuel retour,… et les SMS de rendez-vous coquins publiés comme arguments politiques…
Le PS normal sombre, inexorablement… Pathétique. Ce gouvernement d’amateurs est dans l’incapacité de faire passer la moindre réforme sérieuse. Après bientôt deux ans, le bilan est la poursuite de la politique économique et sociale de Sarko. Hollande avait annoncé l’inversion de la courbe du chômage en 2013. Or, il n’en sera rien et 2014 sera très mauvais. Réponse ? Rien, à part un discours sur la solidarité… Il nous gave.
Les Verts ? Divisés, inaudibles et souvent archaïques.
D’autres voix ? Le seul opposant crédible est… la Cour des comptes !
Alors,… et bien la population se fiche du jeu politique, qui n’est plus qu’un spectacle. Chacun mène sa vie dans son coin, se débrouille, crée ses réseaux, tente sa chance. Le pays tient par la qualité de ses services, à commencer par ceux des impôts, de l’éducation nationale et de la santé. Le rôle moteur est celui des grandes firmes, toutes très internationalisées, et qui face à un pouvoir évanescent sont devenues des pôles de stabilité. Après c’est tout l’entrelacs des relations sociales, des PME, des assos, et dans ce jeu complexe, chacun cherche à tirer sa chance. Courageux, tenace, imaginatif, astucieux… avec des échecs, mais aussi de vraies réussites.
D’un côté un groupe incestuel, qui squatte les allées du pouvoir, et se gère avec son petit code relationnel ; de l’autre, la vraie société, qui se débrouille seule.
L’axe moteur de cette destruction est le discours anti-européen tenu par les leaders politiques. Ca va de Berlusconi qui vomit « l’Europe allemande », à Fabius, mentor du non, et héros de la politique du oui. Tout le monde se défoule, avec toujours la même sauce : Bruxelles et ses technocrates, qui ne connaissent que la règle des 3%, et qui sont la source de tous nos malheurs…
Mais, qui a instauré les 3% ? Les technocrates de Bruxelles... ou les politiques, avec la Mitte et Kohl à la manœuvre ? Bruxelles trop rigide ? Mais n’est-ce pas le gouvernement de Gochmole qui veut imposer la règle du 0% dans la Constitution ? Et l’endettement des Etats, il est le fait de la Commission de Bruxelles ? Quel Etat est en mesure de tenir son crédit sans les garanties de la Banque Centrale Européenne ? Hollande avait deux impératifs : renégocier le traité et conclure un pacte de croissance ; le résultat est un traité inchangé et un budget européen en recul.
On ne vote pas contre la rigueur, mais contre les incapables qui disent gouverner. Face à une situation économique mauvaise, chacun comprend qu’il faut se serrer la ceinture. Mais, ce qui est insupportable, c’est le mensonge perpétuel des gouvernements, qui nous prennent pour des demeurés, et leur incapacité à assumer des choix politiques. Alors, s’ils n’assument rien,… et bien, on se passe d’eux.