Domanialité publique : quand le virtuel demeure réel…
K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Anna Stefanini-Coste, Marc de Monsembernard, 23/04/2013
Dans son arrêt n° 363738 du 8 avril 2013, le Conseil d’Etat juge que l’entrée en vigueur, le 1er juillet 2006, du CG3P n’a eu pour effet de déclasser des dépendances du domaine public soumises au principe de la domanialité publique en vertu de la théorie de la « domanialité publique virtuelle ».
arrêt n° 363738 du 8 avril 2013
Jusqu’à la publication du code général de la propriété des personnes publiques, la tendance à l’extension du champ d’application des règles de la domanialité publique s’est notamment traduite par la création jurisprudentielle de la notion de « domanialité publique virtuelle », ou « domanialité publique par anticipation » : ce n’est plus seulement une propriété immobilière d’une personne publique affectée au public ou, moyennant un aménagement spécial, à un service public qui appartenait au domaine public. Selon cette théorie, un bien pouvait désormais se voir appliquer les règles de la domanialité publique dès lors qu’il était prévu de manière certaine qu’il allait être affecté à l’usage direct du public ou à un service public moyennant des aménagements spéciaux.
Issue de l’arrêt Association Eurolat (CE 6 mai 1985, req. nos 41589 et 41699), elle a été ultérieurement confirmée par le Conseil d’Etat, que ce soit en formation administrative (avis n° 356.960 du 31 janvier 1995 relatif aux projets immobiliers du ministère de l’intérieur ; avis n° 370.169 du 18 mai 2004 relatif à la Cinémathèque) ou au contentieux (CE, 1er février 1995, req. 127969, Préfet de la Meuse, Rec. CE, p.783). Dans ce dernier arrêt, de l’application des règles de la domanialité publique, le Conseil d’Etat déduisait l’impossibilité de déclasser un immeuble dès lors qu’il était prévu de l’affecter à un service public, alors même que les aménagements spéciaux destinés à l’adaptation de l’immeuble au service public n’avaient pas encore été réalisés.
Le CG3P n’a pas codifié les principes de la domanialité publique virtuelle. Son article L.2111-1 lie l’entrée d’un bien dans le domaine public à la réalisation effective de l’aménagement indispensable prévu par ce texte, en disposant que « Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d’une personne mentionnée à l’article L.1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public ».
Le rapport de présentation de l’ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 de codification (JORF, 22 avril 2006), expliquait du reste que : « C’est désormais la réalisation certaine et effective d’un aménagement indispensable pour concrétiser l’affectation d’un immeuble au service public, qui déterminera de façon objective l’application du régime de la domanialité publique. De la sorte, cette définition prive d’effet la théorie de la domanialité publique virtuelle ».
Toutefois, jusqu’à présent, le Conseil d’Etat n’a pas pris position sur la notion de domanialité publique virtuelle que certains auteurs préconisaient de ne pas abandonner (Professeur Philippe Yolka, « Faut-il réellement abandonner la domanialité publique virtuelle ? », La semaine juridique A, n° 8, 22 février 2010, page 2073).
Sans se prononcer sur son application à des biens dont il serait aujourd’hui décidé de l’affectation à l’usage du public ou, moyennant un aménagement spécial, à l’utilité publique, le Conseil d’Etat juge, dans son arrêt du 8 avril 2013, que les effets produits par la théorie de la domanialité publique virtuelle avant l’entrée en vigueur du CG3P perdurent après son entrée en vigueur.
En d’autres termes, l’entrée en vigueur du GC3P n’a pu, en elle-même, entraîner déclassement d’un bien qui, par application de la domanialité publique virtuelle, appartenait au domaine public, illustrant ainsi que, même en l’espèce et alors que la domanialité publique virtuelle n’a plus cours, il ne saurait y avoir déclassement d’une dépendance du domaine publique sans décision expresse d’y procéder.
Jusqu’à la publication du code général de la propriété des personnes publiques, la tendance à l’extension du champ d’application des règles de la domanialité publique s’est notamment traduite par la création jurisprudentielle de la notion de « domanialité publique virtuelle », ou « domanialité publique par anticipation » : ce n’est plus seulement une propriété immobilière d’une personne publique affectée au public ou, moyennant un aménagement spécial, à un service public qui appartenait au domaine public. Selon cette théorie, un bien pouvait désormais se voir appliquer les règles de la domanialité publique dès lors qu’il était prévu de manière certaine qu’il allait être affecté à l’usage direct du public ou à un service public moyennant des aménagements spéciaux.
Issue de l’arrêt Association Eurolat (CE 6 mai 1985, req. nos 41589 et 41699), elle a été ultérieurement confirmée par le Conseil d’Etat, que ce soit en formation administrative (avis n° 356.960 du 31 janvier 1995 relatif aux projets immobiliers du ministère de l’intérieur ; avis n° 370.169 du 18 mai 2004 relatif à la Cinémathèque) ou au contentieux (CE, 1er février 1995, req. 127969, Préfet de la Meuse, Rec. CE, p.783). Dans ce dernier arrêt, de l’application des règles de la domanialité publique, le Conseil d’Etat déduisait l’impossibilité de déclasser un immeuble dès lors qu’il était prévu de l’affecter à un service public, alors même que les aménagements spéciaux destinés à l’adaptation de l’immeuble au service public n’avaient pas encore été réalisés.
Le CG3P n’a pas codifié les principes de la domanialité publique virtuelle. Son article L.2111-1 lie l’entrée d’un bien dans le domaine public à la réalisation effective de l’aménagement indispensable prévu par ce texte, en disposant que « Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d’une personne mentionnée à l’article L.1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public ».
Le rapport de présentation de l’ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 de codification (JORF, 22 avril 2006), expliquait du reste que : « C’est désormais la réalisation certaine et effective d’un aménagement indispensable pour concrétiser l’affectation d’un immeuble au service public, qui déterminera de façon objective l’application du régime de la domanialité publique. De la sorte, cette définition prive d’effet la théorie de la domanialité publique virtuelle ».
Toutefois, jusqu’à présent, le Conseil d’Etat n’a pas pris position sur la notion de domanialité publique virtuelle que certains auteurs préconisaient de ne pas abandonner (Professeur Philippe Yolka, « Faut-il réellement abandonner la domanialité publique virtuelle ? », La semaine juridique A, n° 8, 22 février 2010, page 2073).
Sans se prononcer sur son application à des biens dont il serait aujourd’hui décidé de l’affectation à l’usage du public ou, moyennant un aménagement spécial, à l’utilité publique, le Conseil d’Etat juge, dans son arrêt du 8 avril 2013, que les effets produits par la théorie de la domanialité publique virtuelle avant l’entrée en vigueur du CG3P perdurent après son entrée en vigueur.
En d’autres termes, l’entrée en vigueur du GC3P n’a pu, en elle-même, entraîner déclassement d’un bien qui, par application de la domanialité publique virtuelle, appartenait au domaine public, illustrant ainsi que, même en l’espèce et alors que la domanialité publique virtuelle n’a plus cours, il ne saurait y avoir déclassement d’une dépendance du domaine publique sans décision expresse d’y procéder.