Justice fiscale : L’AS Monaco échappe à la taxe à 75%
Actualités du droit - Gilles Devers, 14/12/2013
Ah cette sacrée taxe à 75%,… on n’a pas fini d’en rire. Tous les clubs de foot sont concernés… mais pas l’AS Monaco. Bilan, le PSG est taxé à 20 millions, Lille, Lyon, Marseille à 5 millions,… et la vertueuse AS Monaco est exonérée. Vive les paradis fiscaux, et joyeux Noël…
Et pourquoi ? Parce que Monaco, ce n’est pas la France ! C’est un rocher souverain. La grande histoire des peuples… D’ailleurs Hollande était là-bas il y a un mois pour rencontrer son Altesse princière de mes deux…
L'AS Monaco est un un club monégasque, donc non français, mais qui est affilié à la fédération française de football et participe au championnat français. C’est cool, on va pouvoir faire jouer dans le championnat français les clubs de Bagdad, Shanghai et Téhéran.
Toute la question est de savoir si les clubs de Bagdad, Shanghai et Téhéran, dès qu’ils seront affiliés à la fédération française de football, seront visés par la jolie taxe. Eh ben, ce sera non…
C’est d’ailleurs bien pour cela que l’AS Monaco intéresse les investisseurs, et notamment notre ami le milliardaire russe Dmitry Rybolovlev, qui a racheté l’AS Monaco. Les joueurs monégasques bénéficient d’un régime fiscal plus que favorable, et la charge salariale pour le club est d’autant allégée,… et la compétition d’autant faussée.
La Ligue de football professionnel en a ras le bol, et elle mesure le possible effet de contagion : un club s’installe chez un voisin moins accro aux taxes, récupèrent des joueurs, et monte une concurrence vicieuse.
Aussi, par décision du 21 mars 2013, la Ligue a modifié l’article 100 de son règlement, relatif aux conditions de participation des clubs des compétitions de Ligue 1 et de Ligue 2, en lui ajoutant un alinéa ainsi rédigé : « le siège de la direction effective de la société constituant le club doit impérativement être implanté sur le territoire français conformément aux dispositions des articles L. 122-1 et suivants du code du sport. Cette disposition s’appliquera à compter du 1er juin 2014 ».
L’AS Monaco a saisi le Conseil d'Etat. Elle réplique qu’elle a signé une convention avec la Fédération française de football (FFF) et que la Ligue de football professionnel (LFP) n’est pas compétente pour prendre la décision à son encontre. Surtout, elle soutient que cette mesure porte une atteinte disproportionnée, qu’aucun motif impérieux d’intérêt général ne justifie, aux lois du business (libre circulation des capitaux, liberté d’établissement, libre circulation des travailleurs, liberté d’entreprendre, libre concurrence) et qu’elle méconnaît la convention fiscale du 18 février 1963 signée entre la France et la principauté de Monaco.
Le Conseil d’Etat est saisi et doit se prononcer dans les prochains mois. On verra... mais que le championnat de France soit soumis à des règles assurant l'équité entre les clubs parait assez logique.
Lors des débats à l’Assemblée nationale, notre purgeur en chef, Bernard Cazeneuve, avait expliqué qu’on ne pouvait inclure l’AS Monaco, et il était rentré à la maison. Mais les petits coquins de députés en ont profité pour voter un amendement imposant la taxe, soulignant que « les clubs sportifs basés à l’étranger doivent payer cette taxe lorsqu’ils sont affiliés à une fédération sportive française ». Fureur du purgeur, qui a fait voter la suppression de l’amendement : « Nous ne voulons pas prendre le moindre risque juridique et constitutionnel ». Un truc de trouillard, car le Conseil aurait pu annuler cette disposition sans toucher au reste. Mais comme la taxe a déjà été annulée par le conseil constitutionnel en 2012, le « gouvernement » préfère contourner l’obstacle.
La solution serait que le Club installe son siège social de l’autre côté des pointillés du Rocher, mais son altesse sérénissime a posé son véto pour des motifs de souveraineté nationale.
Ben dis donc, ça rigole pas chez les dindons…