Y croire ou non ?
Justice au singulier - philippe.bilger, 11/04/2012
François Hollande déclare qu'il n'y aura pas "d'Etat PS" (Le Parisien).
Il y a des engagements qui sont formulés avec une totale bonne foi mais auxquels on a du mal à croire.
La justice indépendante demain, des nominations justifiées par la compétence, le mérite récompensé, des médias libres, fin du copinage.
Ces promesses font plaisir quand on les entend, on serait navré si elles n'apparaissaient pas au cours de la campagne mais je suis persuadé qu'à peines formulées, le citoyen les prend pour ce qu'elles sont : de l'espoir obligé, de la morale nécessaire. Mais le désabusement est présent au moment même où l'illusion nous est offerte.
Est-ce à dire que rien n'est tenable, qu'un Etat appartiendra forcément au parti dominant et que les rêves d'avant le pouvoir se briseront inéluctablement sur la réalité de la gestion et l'occupation des places?
Parce que depuis trop longtemps la société a été déçue. Qu'on pressent que le pouvoir de demain aura sa logique interne, de droite ou de gauche, qui le fera ressembler au pouvoir d'aujourd'hui. On éprouve de la reconnaissance pour le candidat qui nous fera monter au septième ciel républicain mais le sarkozysme est passé par là et, avant, le mitterrandisme, le chiraquisme et ces noces politiques constantes entre des valeurs proclamées et le dur métier de gouverner avec les mains sales et les accommodements inévitables. La naïveté serait impardonnable et la lucidité condamnée à l'amertume.
Il y a de la tristesse dans cette sagesse qui ne nous quitte plus.
Peut-être faut-il arriver au fond du trou, sans l'ombre d'une éclaircie pour, peut-être, profiter d'une heureuse surprise ?
Le jour où plus rien d'impossible ne nous sera exprimé comme une douceur conventionnelle, selon un rituel à l'usage vide de sens, on retrouvera le goût et la passion d'écouter, d'y croire.