Merah le bol !
Justice au singulier - philippe.bilger, 28/03/2012
Sur Twitter, on m'a à juste titre fait remarquer que le traitement médiatique de Mohamed Merah vivant puis mort commençait à ne plus relever de l'information mais à exagérer la triste dimension de ce personnage. Se faisait jour comme une aspiration au silence.
Les Français n'ont pas été dupes de ces terrifiantes séquences. Elles ont évidemment suscité une indignation générale, une adhésion au comportement présidentiel tant que celui-ci ne s'est pas égaré, comme souvent, dans des élucubrations absurdement réactives et, sur le plan de la campagne, une volonté de stabilité et de sérénité.
En effet, on n'a pas manqué d'être frappé par le fait que les derniers sondages n'ont pas constaté le décrochage par rapport à François Hollande qu'espérait le président-candidat, n'ont pas relevé une poussée des rivaux qui se sont coulé un temps dans l'ombre présidentielle.
Au contraire, ils ont révélé une progression continue et sensible de Jean-Luc Mélenchon. Cette avancée est signifiante puisque ce dernier, accordé à l'émoi et à la compassion de tous, n'a pas cependant participé au deuil officiel en quelque sorte.
Il y a là clairement, de la part des citoyens, le souci de ne rien favoriser qui puisse apparaître comme une exploitation à la longue indécente de tragédies singulières et délirantes.
Cette sagesse républicaine est absolument confirmée par une enquête exclusive BVA qui, contre l'attente de ceux qui espéraient un gain politique à la suite de ces sept assassinats, met en évidence que dominent très largement dans les préoccupations centrales de notre société le pouvoir d'achat, le chômage, la croissance économique, la dette de la France, la pauvreté et la précarité, l'insécurité et l'immigration n'apparaissant dans ce classement qu'à la 7ème et 8ème place sur douze (Le Parisien).
En dépit des apparences donc, et du tumulte médiatique sur ces ignominies et leurs suites, sur Mohamed Merah, son frère et son père, sur les basses attaques à l'encontre du RAID, malgré l'obsession de Nicolas Sarkozy de tenter de faire apparaître François Hollande comme un laxiste et un faible, notre démocratie tient le cap, sait ne pas mélanger l'accessoire même horrible avec l'essentiel et ne donne aucun quitus à qui souffle sur les braises ou prétend tirer de celles-ci avec démagogie une illusion de politique (nouvelobs.com, 20 minutes, Le Monde).
Il faut vraiment écouter les Français. Même plus un mois avant le premier tour. C'est si peu.