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Turquie : Belle victoire pour l’AKP, et lourdes responsabilités

Actualités du droit - Gilles Devers, 1/11/2015

Une victoire nette, imparable : dites-moi quel parti au pouvoir depuis...

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Une victoire nette, imparable : dites-moi quel parti au pouvoir depuis 13 ans, dans un grand pays démocratique et économiquement développé, est capable de l’emporter lors de législatives avec un score de 50 % ? Et avec 90 % de votants ? Depuis 2002, nos présidentiables rêvent de s’approcher de 20 %, ce qui leur suffit pour être propulsés au second tour… La constitution de notre Ve République est un calvaire pour la démocratie.

1/ Victoire de l’AKP

akp-erdogan.jpgGrande victoire de l’AKP, oui, et d’Erdogan, oui aussi,.. mais on ne peut pas réduire ce résultat à une victoire du boss. Erdogan, qui avait épuisé ses deux mandats de premier ministre, selon les statuts de son parti – mais pas selon la constitution – s’est fait élire en août 2014 à la présidentielle. Sauf que dans la constitution turque, l’essentiel du pouvoir revient au premier ministre. Comme pour toutes les législatives, il y a un partage entre l’impulsion que donne la direction politique et la notoriété des candidats.

Cette grande victoire n’est pas le triomphe d’Erdogan, car son projet était d’obtenir une majorité des deux tiers à l’assemblée, pour changer la constitution, et passer vers un régime faisant basculer le centre du pouvoir vers la présidence. Donc le projet majeur d’Erdogan - je reste la fonction de premier ministre, mais bientôt ce sera un président puissant - tombe à l’eau. La Turquie garde sa constitution républicaine et parlementaire.

2/ Quels choix politiques pour l’AKP ?

başbakan-ahmet-davutoğlu-okullarda-üzüm-dağıtılacak.jpgL’AKP devrait disposer de 320 des 550 sièges à l’Assemblée. Que faire de cette victoire ? L’AKP ne doit pas ses victoires au hasard, et il y a à la tête du parti un staff de haut niveau. Ce staff sait que le vrai poids politique de l’AKP, c’est le scrutin de juin, qui n’était pas bon – 40% – qu’il y eu hier un choix pour la stabilité, et que ce succès est largement dû à la faiblesse de l’opposition, sans projet commun. Aussi, l’AKP doit sereinement faire le point du positif et du négatif.

La stabilité politique, assurée, doit permettre de redynamiser l’économie, et l’AKP a quatre ans pour remettre l’économie turque dans la courbe ascendante. Si ça marche, un nouveau mandat est possible.

3/ Erdogan dans son palais doré

o-PALAIS-TURQUIE-ERDOGAN-facebook (1).jpgErdogan comptait sur une majorité des deux tiers, qu’il n’aura jamais. La réforme présidentielle est enterrée faute de cette majorité qualifiée, et le pouvoir constitutionnel revient au premier ministre Ahmet Davutoglu.

Tous mes amis turcs me disent que Davutoglu a fait un excellent parcours, qu’il passe mieux car il n’a pas le coté autoritaire d’Erdogan, et que la victoire d’hier lui doit beaucoup. Aussi, attendons un peu pour voir comment vont s’équilibrer les pouvoirs entre Erdogan et Davutoglu,… surtout avec la perspective d’une nouvelle victoire de l’AKP dans quatre ans, avec quatre ans plus de premier ministre pour Davutoglu… et quatre ans de plus pour Erdogan dans son palais doré…

4/ Du côté de l’opposition ?

1428421070554.jpgBelle victoire à nouveau le HDP de Selahattin Demirtas, parti à forte sensibilité kurde, qui se maintient à plus de 10 % et aura donc des députés, malgré la campagne le présentant comme complice des « terroristes » du PKK. D’une manière ou d’une autre, il faut trouver une réponse à la question kurde, et la résistance du HDP est un point intéressant. Demirtas parlait juste hier quand il affirmait : « J'espère que le résultat d'aujourd'hui renforcera les espoirs de paix. C'est ce dont la Turquie a le plus besoin en ce moment ».

Le MHP, bien à droite de la droite, est en net recul, à 12%, une partie de son électorat ayant choisi l’AKP comme vote utile. No future.

La grande défaite est celle du Parti républicain du peuple (CHP), de la gauche réformiste, qui plafonne à 24,5%. C’est le CHP qui devrait être le parti pivot de l’opposition, mais à moins de 25 % et après tant de défaites, il y a de vraies questions à se poser, de programme et de leadership. Ce qui revient à dire que c’est à partir la capacité de réflexion de l’AKP que va se dessiner l’avenir de la Turquie. 

5/ Les sondages

Comme d'hab... totalement plantés. Ils donnaient l'AKP à 40%... 


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