Actions sur le document

De l'art ou du cochon ?

Justice au Singulier - philippe.bilger, 8/08/2015

De l'art ou du cochon ? Du cochon indéniablement.

Lire l'article...

Triste France. Triste culture.

Qu'on ne me soupçonne pas de me régaler en catimini de ce que ce billet va dénoncer mais il fallait que je voie Love, le dernier film de Gaspar Noé, pour avoir le droit d'en parler, en dérogeant ainsi à la démarche de la plupart de nos critiques.

Je craignais le pire et il est survenu. Dire que c'est au sujet d'une telle oeuvre que depuis quelques jours une polémique est née et s'enfle pour déterminer à quels mineurs il faudrait permettre d'y accéder !

Je voudrais inscrire ma réflexion sous l'égide du scénariste et réalisateur qui, avec hauteur et mépris pour les malheureux qui s'émeuvent, déclare "qu'il n'y a rien de choquant... qu'il s'agit d'un anachronisme absolu, celui des réacs comme, dans d'autres contextes, celui de l'Etat islamique..."

L'accusation d'être "réac" aujourd'hui, c'est comme le poumon de Molière. Pour ma part je m'en vante mais pour tous ceux qui en usent comme d'une insulte, tout est dit et il n'est même plus nécessaire de défendre et d'argumenter. Le jour du progressisme et la nuit de l'obscurantisme !

Le film est épouvantablement long et les dialogues, comme les monologues intérieurs, sont affligeants de banalité, voire de bêtise.

Ce n'est pas grave puisque je suis "réac".

L'acteur masculin est totalement inexpressif et s'il se dépense beaucoup par corps et par gestes, il n'est manifestement pas un comédien susceptible d'éclairer la matière lourde et épaisse dans laquelle il est plongé. A la fois pompeuse et insignifiante. Si sa principale partenaire féminine est belle, on l'a condamnée à briller exclusivement par sa grâce corporelle, ses formes longilignes et son dynamisme amoureux.

Mais il est vrai que nous sommes "réacs".

Une succession lassante et répétitive de scènes "physiques" parfaitement inutiles au développement de l'action psychologique si on veut bien qualifier de telle la médiocrité des séquences ne concernant pas les ébats des corps. Avec, pour saupoudrer ces monotonies, la musique d'Erik Satie qui ne parvient pas à suppléer la pesanteur ampoulée du fond.

Mais malheur aux "réacs".

Plusieurs audaces franchement pornographiques, notamment une très longue masturbation en ouverture, qui n'ont pour finalité - c'est la définition de la pornographie - que de "provoquer l'excitation sexuelle du public" puisque rien, rigoureusement rien, sinon la roublardise cynique et vulgairement provocatrice du réalisateur, ne les rendait nécessaires et légitimes. Le titre anglais "Love" cherche à instiller un parfum chic et élégant. Pour compenser ?

Mais qu'importe puisque n'être pas dupe, c'est être "réac"!

Deux heures vingt minutes sans intérêt, sans élévation d'aucune sorte (quoique !), en même temps puériles et pleines d'enflure, cherchant à se faire prendre pour de l'art quand profondément il n'y a que du cochon et une pitoyable exploitation du snobisme des uns et de la curiosité des autres, amplifiée par des médias entremetteurs. Heureusement, alors, que l'association "Promouvoir", avec le souci de porter les valeurs judéo-chrétiennes dans tous les domaines de la vie sociale, est intervenue et le fait que son avocat ait travaillé avec Bruno Mégret, il y a des années, n'en fait pas un incompétent ni un pestiféré !

Mais, de grâce, qu'ils se taisent puisqu'ils sont "réacs" !

La commission de classification des oeuvres du Conseil national du cinéma a recommandé à deux reprises une interdiction de Love aux moins de 16 ans. Pour elle qui ne s'effarouche de rien de peur de manquer le train de la bienfaisante libération artistique des moeurs, une telle rigueur est quasiment une censure !

Le tribunal administratif de Paris, auquel il faut rendre hommage, a visé "la répétition et l'importance des scènes de sexe non simulées de nature à heurter la sensibilité des mineurs" pour prescrire l'interdiction aux mineurs de 18 ans. C'était du droit, du bon sens, absolument pas un cataclysme, mais pourtant c'était intolérable pour la ministre de la Culture et ses services !

Mais l'avis des "réacs" ne compte pas.

Fleur Pellerin, toutes affaires cessantes, deux jours après la décision du tribunal administratif - a formé un recours devant le Conseil d'Etat au motif, selon son entourage, "de faire lever l'interdiction du film aux mineurs de 18 ans". J'avoue que naïvement je supposais que l'obligation impérieuse d'un ministre de la Culture était au contraire de préserver, autant que possible, tous les mineurs de l'absence de culture et de la vulgarité intéressée de salacités offensantes. Mais je me suis trompé. Le progrès, paraît-il, n'est pas de détourner des sources impures mais de permettre à tous de s'y abreuver.

Mais j'admets que mes détracteurs ont raison de me traiter de "réac".

Jack Lang, qui a déjà été mieux inspiré, ainsi que le producteur du film Vincent Maraval soutiennent la démarche de la ministre. Vincent Maraval, évidemment parfaitement objectif, encense Fleur Pellerin qui "va au carton. voilà comment j'aime l'action politique".

Pas moi. Mais on sait bien que les "réacs" sont étrangers à la culture, la vraie, celle de Love.

De l'art ou du cochon ?

Du cochon, indéniablement.


Retrouvez l'article original ici...

Vous pouvez aussi voir...