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Comme c'est mignon, comme c'est dur...

Justice au singulier - philippe.bilger, 24/10/2013

En 2017, Manuel Valls serait le meilleur candidat pour la gauche. De quoi piquer un peu François Hollande ? Par avance je demande pardon à ceux qui vont m'accabler parce que je suis revenu à la politique et que la France m'angoisse de plus en plus. On a forcément aujourd'hui l'amour de son pays inquiet sur tous les plans. Il y a des rechutes qui sont excusables.

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Quand mon ami Denis Olivennes a annoncé que le groupe Lagardère allait se séparer d'un certain nombre de titres, une bouffée d'espoir m'a envahi.

En effet, si Paris Match était vendu, je suis sûr que nous n'aurions plus à intervalles réguliers ces couvertures et ces articles sur l'ex-président et son épouse qui, à force, me gâchent la lecture de cet excellent hebdomadaire, par exemple quand Georges Brassens est évoqué dans son intimité et qu'on découvre encore des choses sur lui alors qu'on croyait à peu près tout connaître.

Mais comme c'est mignon !

Le couple se tient la main en couverture, lui grave, elle souriante. "Nicolas Sarkozy... Avec Carla tout est possible..." Puisqu'on est dans l'hyperbole, pourquoi lésiner ? Après tout, même s'il a été défait, il y a encore des Français qui ont envie de le revoir. Et avec son épouse, c'est encore mieux ! Cela vous a un petit air de simplicité chic, de fausse familiarité et de vraie manipulation.

Que dire alors de l'article ? Les soirées sous la lampe, l'homme qui n'est plus préoccupé que d'art, de lectures et de DVD, un sage qui s'est éloigné de la rumeur, des superficialités, qui ne ronge pas son frein ! D'ailleurs, une proche conseillère de l'ancien président nous annonce "qu'il n'avait pas envie d'être réélu". La suite a démontré comme elle était lucide ou comme il sait bien donner le change !

Pas facile pour le journaliste François de Labarre de nous "vendre" cette image tranquille, culturelle, conjugale, familiale, modeste et retirée quand, derrière les phrases de circonstance, pour le citoyen même le moins intuitif il est éclatant qu'il piaffe, que les échecs prévisibles, pour la gauche, des municipales et des européennes ne viennent pas assez vite et que le FN n'est pas encore assez dangereux. On le devine aux aguets, comptant sur ses Amis dont on peut dire que ce ne sont pas les plus brillants de la droite.

Le plus dur, c'est de simuler le désintérêt pour ce qui se déroule même si - il continue à jouer à de Gaulle - il se gonfle : "Vous ne pourrez jamais me détacher du destin de la France" (nouvelobs.com).

Comme c'est mignon, doux, mièvre, tendre, délicat en apparence quand tout à l'intérieur n'est que ressentiment, détestation et revanche !

Face à ces mignardises sentimentales, je songe évidemment à celui qui l'a battu et qui a permis à Nicolas Sarkozy de s'abandonner à cette existence que, paraît-il, il adore. Je pense à François Hollande et qu'on ne voie nulle condescendance de ma part dans ce que j'éprouve à son égard. Une forme de pitié pour cette extrême intelligence. Rien qui m'ait détourné de lui sur le plan de l'être intime, de la personne juste avant les affres de la politique.

Mais comme c'est dur !

Je ne méconnais pas les ressources de son inaltérable optimisme tactique - à la longue, il sera contagieux peut-être ! - mais tant d'obstacles s'accumulent, tant d'aléas se présentent qui précisément devraient inciter sa personnalité à accomplir ce qu'elle refuse viscéralement : trancher. Dire que la famille de Leonarda ne reviendra pas en France mais que celle-ci en aura le droit, ce n'est pas décider, c'est noyer, se noyer. Quand l'habileté dépasse un certain niveau pour se caricaturer elle-même, elle devient un piège, une impasse.

Non pas qu'on rêve alors de coups de poing sur la table démocratique, de l'agitation et du débridement d'hier mais on voudrait un président dans le plein sens du terme. Hervé Morin a eu tort de déclarer que François Hollande n'est pas à la hauteur de la fonction. Quand on compare avec la plupart des affidés d'hier et de leur chef, on est rassuré. Mais il n'est pas à la hauteur des multiples défis que sa pratique républicaine de la présidence devrait le conduire à relever : celui de la clarté, celui de la rigueur, celui du rassemblement, celui du pluralisme et celui du courage. Pas le courage pour les socialistes mais au bénéfice de tous les Français. Et ce n'est pas forcément le même !

Comme c'est dur, pénible, épuisant, harcelant et déprimant quand en apparence François Hollande offre son visage souriant et serein, sa gentillesse et ses certitudes !

En 2017, Manuel Valls serait le meilleur candidat pour la gauche. De quoi piquer un peu François Hollande ?

Par avance je demande pardon à ceux qui vont m'accabler parce que je suis revenu à la politique et que la France m'angoisse de plus en plus. On a forcément aujourd'hui l'amour de son pays inquiet sur tous les plans. Il y a des rechutes qui sont excusables.

Dire que j'étais parti pour m'élever contre la dictature de la minceur et célébrer les pulpeuses !


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