L’Egypte à l’heure de toutes les incertitudes
Actualités du droit - Gilles Devers, 30/06/2013
L’Egypte, ce grand pays de 80 millions de personnes, est ravagé par la crise économique et sociale, et par la pauvreté. Morsi, arrivé au pouvoir il y a un an n’a rien maîtrisé. Rien. Ce dimanche soir du 30 juin, alors que les manifestants se comptent par centaines de milliers, et à travers toute le pays, personne ne peut dire où va l’Egypte. La chute de Morsi serait celle des Frères Musulmans, avec des effets systémiques dans tout le Proche Orient.
Hosni Moubarak est tombé en février 2011, laissant un pays exsangue. L’Egypte qui jadis exportait du blé, était devenue importatrice, et ce sont les US qui bouclaient le budget. Tout rendait la situation explosive: une économie stagnante, sans armature, un niveau de vie très bas, si ce n’est misérable, une capitale tentaculaire et ingérable, une corruption omniprésente, une armée devenue un appareil politique, la destruction de toutes les forces politiques d’opposition…
Les Frères musulmans ont logiquement gagné les élections, mais ils ont vite montré qu’ils ne savaient pas gouverner : incapacité à traiter des questions économiques et sociales, même pour répondre à l'urgence, marchandages sans fin avec l’armée, crise avec la magistrature conduisant à un blocage institutionnel. Il est à ce jour à peu près impossible de dire quelle structure politique est en mesure d’exercer ses fonctions, sauf la présidence,... et dès lors l’enjeu se déplace : c’est un mouvement massif, la campagne Tamarrod, qui a pour un but précis d’obtenir le départ de M. Morsi. Le mouvement regroupe des courants très divers, voire opposés, mais la cible est commune.
Inflation, chômage, pouvoir autoritaire… L’acte d’accusation est vite établi. Et face à cette foule qui appelle à un vote démocratique – 22 millions ont signé pour une nouvelle élection – les Frères musulmans apparaissent pétrifiés. Les nostalgiques de l’ancien régime sont à la manœuvre, comme tous les groupes qui ont intérêt à déstabiliser l’Egypte, certes. Mais un tel mouvement de masse est d’abord le fruit d’un mécontentent social et grave.
Morsi n’a pas encore démissionné, c’est sûr, et l’opposition ne parait sûre ni dans ses leaders, ni dans son programme. Quelle sera l’attitude de l’armée ? Elle qui a bien pourri la succession de Moubarak se retrouve au centre du jeu, et elle est naturellement amenée à renforcer le pouvoir en place… Qui peut dessiner des vraies perspectives pour résoudre la crise sociale ? Avec quels appuis ?
La nuit commence au Caire… Elle sera longue…