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La fin de l’assujettissement des réunions sportives à la taxe sur les spectacles n’est pas pour aujourd’hui

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Eve Derouesné, 2/05/2012

Nous évoquions récemment la réforme des statuts des sociétés sportives . L’actualité du Conseil Constitutionnel nous conduit à traiter à présent d’un autre dossier, au cœur de la problématique de compétitivité des sociétés sportives. Il s’agit du régime fiscal appliqué aux réunions sportives. En effet, sur une décision de renvoi de la cour de cassation du 21 février 2012, le conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative au régime de la taxe sur les spectacles en matière sportive. A l’origine de cette question prioritaire de constitutionnalité, le litige porté par le PSG devant la Cour de Cassation sur sa demande refusée de décharge de l’impôt sur les spectacles acquitté au titre du mois de décembre 2007 et des années 2008, 2009 et 2010. Le club de Ligue 1 dénonçait une inconstitutionnalité du régime fiscal pour méconnaissance de principe d’égalité devant l’impôt et d’égalité devant les charges publiques.
Quel est ce régime ?
Contrairement à son intitulé, l’impôt sur les spectacles, jeux et divertissements a un champ restreint qui ne concerne plus aujourd’hui que les réunions sportives ainsi que les cercles et maisons de jeux.

Toutefois, ce principe est assorti de nombreuses exceptions, au cœur de la critique du PSG en raison des disparités de traitement qu’elles créent entre les disciplines sportives ainsi qu’entre les clubs eux-mêmes.

Voici les grandes lignes de ces régimes d’exonération qui s’articulent autour de deux grandes catégories.

A. La première « celles des exonérations ouvertes à tous » n’était évidemment pas dans le viseur :

1. une exonération jusqu’à concurrence de 3.040 €, recette par manifestation pour les réunions sportives organisées par les associations sportives régies par la loi du 1er juillet 1901 agréées ou par les sociétés sportives visées à l’article L 122-1 du code du sport ;

2. une imposition à demi-tarif pour quatre manifestations sportives par an organisées par les associations sportives agréées ou par les associations et sociétés sportives visées à l’article L 122-1 du code du sport (article 1562 du CGI).

B. La seconde « celles des exonérations réservées » dénoncées par le PSG :

1. une exonération en raison de la discipline sportive à laquelle se rattache la réunion sportive en cause (régime national)

La liste des disciplines sportives obtenant le précieux « label » figure à l’article 126 F de l’annexe IV du CGI dans sa dernière version issue de l’arrêté ministériel du 27 mai 2005par arrêté ministériel.

2. une exonération en raison du lieu de la manifestation sportive (régime local à la discrétion de la collectivité)

a) si l’exonération ne concerne que certaines disciplines sportives, une condition organique liée à la qualité d’association sportive de l’organisateur doit alors être remplie,

b) si l’exonération concerne toutes les compétitions sportives sans distinction, aucune condition organique liée à la qualité d’organisateur n’est posée.

Le sens de la décision du conseil constitutionnel
La décision du Conseil Constitutionnel confirme, à notre sens, sans surprise - du moins en droit - la constitutionnalité des dispositions législatives contestées aux motifs que :

D'une part, l'article 1559 et le premier alinéa du b du 3° de l'article 1561 du CGI créent des différences de traitement respectivement entre des spectacles de nature différente et entre des compétitions relatives à des activités sportives différentes. Ils n'introduisent pas de différence de traitement entre des personnes placées dans la même situation et ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant les charges publiques.

D'autre part, le second alinéa du b du 3° de l'article 1561 du CGI permet aux communes qui le souhaitent de favoriser, par des exonérations facultatives, le développement d'évènements sportifs ayant lieu sur leur territoire. De telles exonérations facultatives d'un impôt ayant une assiette locale et exclusivement perçu au profit des communes ne sont pas contraires au principe d'égalité.

Conclusion
Pour autant, le sujet ne nous semble pas épuisé. Des questions demeurent.

Tout d’abord, l’on comprend que la décision du Conseil Constitutionnel a pris en compte la circonstance que les réunions sportives exonérées de la taxe sur les spectacles étaient soumises à un autre impôt, la TVA (article 261 E CGI). L’opérance de l’élément ne va pas de soi.

L’assujettissement à la TVA n’a pas le même effet bien au contraire, c’est la raison pour laquelle d’ailleurs les opposants à la taxe sur les spectacles militent pour son remplacement par une TVA à taux réduit sur la billetterie de toutes les réunions sportives (voir en ce sens, le rapport de l’union des clubs professionnels de football UCPF intitulé « la suppression de la taxe sur les spectacles au profit de la TVA auto-réduit rapport de synthèse - saison 2005/2006 » ou plus récemment la proposition d’amendement déposée par le sénateur Dominati au projet de loi de finance pour 2012. L’amendement avait finalement été retiré après avoir reçu des avis défavorables de la commission et du gouvernement pour des raisons vraisemblablement liées au contexte économique).

Ensuite, si différence de situation il y a, l’on peut se demander dans quelle mesure la différence de traitement n’est pas disproportionnée au regard de la différence de situation. Cette question n’était toutefois pas du ressort du Conseil Constitutionnel ès lors que l’acte en cause est un arrêté ministériel.

Enfin, l’argument selon lequel le régime génère une distorsion de concurrence entre les sociétés sportives mérite analyse. Celui- ci était notamment soulevé dans le rapport Besson « accroître la compétitivité du football professionnel français » qui dénombrait 24 clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 assujettis à cette taxe et 16 clubs exonérés. Ce même rapport relevait que le club Paris Saint Germain est le plus gros contributeur de cette taxe avec près de trois millions d’euros (cf. le taux normal de 8 % peut être majoré par les collectivités locales, ce qui est le cas à Paris).


Ces deux dernières interrogations laissées intactes sont donc traitées dans un article complémentaire.


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