Quelle Europe ? Il va falloir choisir…
Actualités du droit - Gilles Devers, 7/07/2013
Hier notre excellent Sinistre de l'Économie, Pierre Moscovici, a appelé à la création d'un « ministre des Finances de la zone euro », qui présiderait l'Eurogroupe et serait également le commissaire européen aux Affaires économiques. Il a expliqué : « La question qui se pose est de savoir si ce ministre doit être uniquement le président de l'Eurogroupe ou s'il doit être aussi le commissaire chargé des affaires économiques », disant sa préférence pour la deuxième proposition. Souhaitant « une synergie forte », il a plaidé pour la création « d’une commission, une chambre, un comité de la zone euro au sein du Parlement européen, qui puisse légiférer sur les affaires d'intérêt commun à la zone euro ».
Parfait, voilà qui a moins le mérite d’être clair. Mais cette saillie pose deux problèmes majeurs.
En un, le gouvernement disait exactement l’inverse la semaine dernière, en tapant à bras raccourcis sur Barroso et la Commission, au motif que ces lascars se mêleraient de la politique économique de la France. La Commission était renvoyée à un statut d’organe d’exécution, et devait apprendre à respecter les choix souverains de la France. Vous avez de la mémoire, et vous savez que ce genre de critiques est permanent. Cette prise de position de Mosco, c’est un revirement à 100%, et chacun mesure le poids politique que prendrait un ministre des Finances de la zone euro, président de l'Eurogroupe et commissaire européen aux Affaires économiques. Il y a donc deux lignes politiques en opposition radicale, et il va falloir choisir.
En deux, est-il politiquement raisonnable de passer un tel cap ? Je suis un européen convaincu, même si tant de choses me déplaisent dans l’Union Européenne actuelle. Mais elle est le moteur de l’ouverture de notre pays, sur le plan économique, social, humain… On lui fait beaucoup de reproches... pour des causes qui sont d’abord nationales : c’est la France qui a créé son endettement, et c’est par l’Europe qu’on cherche à s’en sortir. Par ailleurs, je suis persuadé que la construction d’un droit européen est un atout essentiel pour se préparer aux enjeux du futur.
Oui, mais nous ne vivons pas dans l’abstrait des belles théories. La politique se fait avec les gens. Or, le climat politique est très mauvais, la confiance dans le monde politique au plus bas, à Droite comme à Gauche. Il n’existe aucune base politique pour placer les choix politiques nationaux sous un gouvernement économique européen si puissant. Ce qui fait nos pays, c’est la démocratie et la solidarité, qui se vivent dans le cadre national.
Et puis, il faut se méfier au plus haut point de genre de gouvernement, suavement technocratique, et qui serait vite hors d’atteinte. Quel contrôle démocratique effectif disposeraient les citoyens sur ce pouvoir si lointain, et si peu lisible ?
Nos vies s’organisent dans des Etats, qui font des efforts pour s’accorder. Mais nous ne sommes pas encore des citoyens européens, et passer à un gouvernement européen la direction effective de l’économie causerait des ravages.