Actions sur le document

Comment contester les décisions prises par l’inspection du travail de soustraire un travailleur à une situation de danger grave ou imminent ?

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Marc Sénac de Monsembernard, Patrick Berjaud, 17/10/2019

L’article L. 4731-1 du code du travail habilite les agents de contrôle de l’inspection du travail, qui sont des membres soit du corps des inspecteurs du travail, soit du corps des contrôleurs du travail jusqu'à l'extinction de leur corps (article L. 8112-1), à soustraire sans délai un travailleur qui serait exposé à une situation de danger grave et imminent pour sa vie et sa santé. Cette situation doit constituer une infraction aux obligations prescrites par les décrets pris en application des articles L. 4111-6, L. 4311-7 ou L. 4321-4. Peut être prescrit notamment l'arrêt temporaire de la partie des travaux ou de l'activité en cause. La mise en œuvre de ces pouvoirs est subordonnée à la constatation d’un danger dont l’article L. 4731-1 énumère les causes (défaut de protection contre les chutes de hauteur ; absence de dispositifs de nature à éviter les risques d'ensevelissement, etc.).

Le Conseil d’Etat, dans son arrêt " Société Auchan Hypermarché " (CE, 2 octobre 2019, req. n° 432388, Lebon), définit le régime contentieux de ces décisions dont la contestation, par un employeur est attribuée par l’article L. 4731-4 du code du travail à la juridiction administrative. Cette dernière disposition se borne toutefois à mentionner la voie de saisine du juge par voie de référé. Cette unique mention n’a toutefois ni pour objet, ni pour effet d’exclure les voies de recours de droit commun. Toute décision administrative peut faire l’objet, même sans texte, en l’absence de dispositions contraires, d’un recours pour excès de pouvoir (CE, ass., 17 février 1950, Dame Lamotte, req. n° 86949). Aussi, à défaut de dispositions contraires, le recours formé contre les mesures mentionnées à l’article L.4731-1 du code du travail est un recours en excès de pouvoir par lequel l’employeur conclut donc à leur annulation rétroactive. L’employeur peut assortir ce recours en référé d’un recours en référé-suspension, formé sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, tendant à ce que soit ordonnée la suspension de la décision attaquée. Cette saisine du juge des référés n’est toutefois recevable, aux termes mêmes de ces dispositions, que si la décision fait l’objet d’un recours en annulation : le référé-suspension est un recours accessoire à une action au fond. La mesure de suspension de travaux ou d’une activité produit des effets tant qu'elle n'a pas été rapportée et qu'elle s'impose à l'employeur, la demande de suspension en référé conserve par conséquent un objet tant que l’administration n’a pas mis fin à la mesure. Il ne sera fait droit à la demande en référé que si l’employeur justifie, d’une part, de l’urgence que présente la suspension de la décision en cause et, d’autre part, de l’existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (sur le référé suspension, cf. Marc de Monsembernard, Vis « Référés d'urgence : le référé-suspension », Répertoire de Contentieux administratif, Dalloz).

Par ailleurs, l’employeur peut introduire, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, une action en référé liberté, mais uniquement dans l’hypothèse, très restrictive, où la situation exigerait à très bref délai que soit ordonnée en référé une mesure de sauvegarde pour faire cesser une atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale (sur le référé liberté, cf. Marc de Monsembernard, Vis « Référés d'urgence : le référé-liberté », Répertoire de Contentieux administratif, Dalloz)..


Retrouvez l'article original ici...

Vous pouvez aussi voir...