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J’espère que Dilma va tenir le coup

Actualités du droit - Gilles Devers, 19/03/2015

Après une campagne difficile en octobre 2014 , Dilma Rousseff a su brasser...

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Après une campagne difficile en octobre 2014, Dilma Rousseff a su brasser les tripes du pays, un peu au Nord, et beaucoup au Sud, où le Parti des Travailleurs (PT) était malmené. Et elle a gagné : c’est reparti pour 4 ans, et même s’ils sont fatigués, les ressorts du Parti des Travailleurs, le parti qui porte la marque de Lula, ont fonctionné. Au titre de mon droit à la partialité, je précise que je suis in love with Dilma.

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L’ambiance n’y était plus. Le modèle brésilien associant partage et croissance patinait, et l’ambiance était minée par le scandale de Petrobas, cette compagnie pétrolière – première entreprise du pays –  qui, par des gonflages de marchés bidons passés avec des masters du BTP, a arrosé tous azimuts, et spécialement du côté des boss du PT. On parle de 4 milliards de dollars, sur 10 ans. Donc, je résume : le Brésil va mal, et la presse montre jour après jour que des kyrielles de boss du parti au pouvoir s’en sont mis plein les poches. Petrobas chancelle

La partie est difficile pour ma petite chérie de Dilma, car l’économie va mal, avec une stagnation de la croissance et une inflation qui s’envole dangereusement, à plus de 7% cette année. En 2010, on était sur une lancée à + 7% de croissance par an, et en 2015, on craint une récession. Dilma serre les boulons budgétaires, et ça pèse surtout sur le classe moyenne et aisée, qui est furie. Ce sont-là de vrais problèmes, à savoir redéfinir un modèle de développement pour le Brésil,… et tout devient encore plus compliqué avec le discrédit massif liés aux affaires de corruption, qui sont XXL.

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Ce 6 mars, la Cour suprême a autorisé l’enquête sur 49 responsables politiques : 2 gouverneurs, 22 députés et treize sénateurs, issus de 5 partis dont 3 de la coalition gouvernementale, notamment le PT. Le président du Sénat, Renan Calheiros, et celui de la Chambre des députés, Eduardo Cunha font partie de cette liste. Ça, c’est du lourd.

Dilma et Lula, ne figurent pas sur la liste, mais ma Dilma adorée était ministre de l’Energie entre 2003 et 2010 et, à ce titre, présidente du conseil d’administration de Petrobras… Problème.

Et puis, nous ne sommes pas totalement crédules. Car si 1) la corruption n’est pas née d’hier au Brésil, on sait 2) comment marche la corruption : une poignée s’en fourre plein les poches, et pour obtenir la tranquillité, elle finance l’activité des braves. C’est la limite de l’argument « pas d’enrichissement personnel ». Pas d’enrichissement personnel, certes,… mais un parti dont la caisse noire permet de financer et organiser tant de choses. On ressort le dossier Urba ? La cour suprême a publié la liste des personnalités concernées par l’enquête sur la corruption, et on ne trouve pas le nom de Dilma. Dont acte, et bravo, mais difficile de contester le bénéfice indirect. C’est dire que cette affaire est grave et va engluer durablement l’action politique du PT pendant ce mandat.

Ce 18 mars, Dilma Rousseff a annoncé une série de mesures anti-corruption, préparées par le ministre de la Justice, José Eduardo Cardozo. Il y a beaucoup à faire avec une législation embryonnaire sur le financement des partis politiques :  « La pratique de tenue de caisses noires par les partis politiques en période électorale, aussi incroyablement que cela puisse paraître, n'est pas actuellement un délit au Brésil » a expliqué le ministre de la Justice.

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Après, on trouve au Brésil deux populations en pet.

La classe populaire va mal, et les grandes centrales syndicales, qui ont décidé de mettre la pression. Dans le Nordeste, qui est la base électorale du PT, l’incompréhension et le mécontentement s’installent. 2014 a été économiquement très difficile. La géniale Dilma a été réélue sur la confiance, mais maintenant la population, qui vient de se faire infliger un plan de rigueur, attend des résultats.

De l’autre côté, on trouve à la manœuvre la Droite de la revanche, camouflée en « Parti de la social-démocratie brésilienne » (PSDB), plantée dans ses places fortes du Sud, et spécialement à Sao Paulo, qui a perdu les élections, et cherche à se refaire une santé, décidée à tout faire pour accéder au pouvoir dans quatre ans. Comme au bon vieux temps, c’est le jeu de la rue contre les élections. Douze ans de pouvoir du PT, avec une société brésilienne transformée, ça ne passe pas. Non mais c’est vrai : imaginez dans un grand pays, un modèle économique qui associe le développement et la solidarité ? Avec des dirigeants populaires et courageux, qui se font réélire ? Non, soyons sérieux, c’est un mauvais épisode, auquel il faut mettre fin le plus tôt possible. D’où la volonté de tout faire pour souffler sur les braises du scandale, car en fait c’est sur l’économie que tout va se jouer, et là, Dilma est une experte.

Si le Brésil lâche, et repasse dans la main US, les dégâts seront considérables, et pas qu’au Brésil. Alors, oui, j’espère que Dilma va tenir le coup. Tout va se jouer sur l’économie : si ça repart, le scandale Petrobas sera has been.

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