Obama réélu : les Français ont gagné
Justice au singulier - philippe.bilger, 7/11/2012
Les Français désiraient la réélection de Barack Obama. Et le président de la République. Et le Premier ministre. Pour une fois, la France a vu juste puisque d'habitude l'électeur américain brisait nos espérances nationales. Absurdement, il ne tenait pas compte de nos aspirations ! (nouvelobs.com, Le Monde, Le Figaro, Le Parisien).
Mais Barack Obama est réélu et c'est l'essentiel. Les erreurs de Mitt Romney l'ont grandement aidé mais on ne saurait réduire son tour de force de diriger à nouveau les USA pour quatre ans aux seuls échecs de son adversaire républicain.
Le plus remarquable, dans cette campagne présidentielle qui m'a semblé d'une très bonne tenue avec une courtoisie à la fois chaleureuse et perfide entre les candidats, tient au défi relevé par Barack Obama. Non seulement il a surmonté l'épreuve de quatre ans de pouvoir mais, les Américains étant désenchantés, il est parvenu tout de même à l'emporter. Il n'a plus promis du rêve mais avec une conviction sachant intégrer un bilan qu'il défendait avec intelligence mais sans arrogance, il a persuadé ses concitoyens qu'un relatif sûr valait mieux qu'un futur incertain.
Et quel talent, et quelle éloquence, et quel charisme !
Dans n'importe quelle position, de l'attitude la plus familière au comportement le plus officiel, Barack Obama jouit de cette grâce rare d'être incontestablement élu non seulement par la politique mais par une certaine qualité d'allure et d'humanité. Il n'en peut mais, il résiste victorieusement à la vulgarité qui guette paroles, actes et réactions même chez le plus lucide des hommes dès lors qu'il se tient sur le devant d'une scène, alors mondiale!
Il a été sauvé aussi par le fait que certaines évolutions négatives de son mandat, paradoxalement, n'ont pas suscité un discrédit décisif au sein de son parti. Par exemple, il est clair que par rapport à sa volonté d'ouverture initiale, à son souci d'entretenir un dialogue constant et décrispé avec ses concitoyens, il a failli puisque les observateurs qualifiés soulignent que, personnalité contrastée, il s'est au fil des ans replié sur sa famille, sur la Maison Blanche, sur cet univers qui rassure, réconforte et ne contredit pas. Cette dérive a sans doute été regrettable mais ce passage d'une extériorisation annoncée à une autarcie familiale n'a pas été choquante au point de lui faire perdre beaucoup de suffrages. Une pompe même légitime délaissée au profit de l'intimité aurait pu être, à rebours, presque un argument original et flatteur pour sa personne.
Il paraît qu'un second mandat - sa victoire populaire est très réduite même si les grands électeurs l'ont constitué largement gagnant - est forcément moins bon, ou encore plus mauvais que le premier. Cela a été le cas notamment pour Richard Nixon qui a ruiné ses formidables quatre premières années par la suite honteuse qu'on connaît.
Barack Obama surprendra-t-il ses compatriotes, au contraire, en palliant les lacunes et en comblant les vides de son action antérieure ? Deviendra-t-il plus audacieux et plus ferme sur le plan international ? Sera-t-il donc infiniment regretté en 2016 ?
Donnera-t-il doublement raison aux Français ?