Apologie du nazisme par un député maire ?
Actualités du droit - Gilles Devers, 22/07/2013
« Comme quoi, Hitler n'en a peut-être pas tué assez » de la part d’un député-maire, et en parlant des Roms… Les réactions n'ont pas tardé pas, … mais pour dénoncer un « dérapage ». Attention les amis, ce n’est pas du dérapage, mais de l’apologie de crime contre l’humanité.
La scène s’est passée hier dimanche en fin d’après-midi à Cholet, lors de l’arrivée d’une mission évangélique de 150 caravanes. En provenance de Tours, elle n’a pu se rendre sur l’aire de grand passage de la route du Puy-Saint-Bonnet, qui l’accueille habituellement mais dont l'accès, selon Ouest France, a été barré par un talus de terre. L’air d’accueil local ne compte de 30 places, et les 150 caravanes se sont installées dans un champ de 5 ha, empêchant les agriculteurs qui l’exploitent d’y envoyer leur troupeau.
Le député-maire UDI de Cholet, Gilles Bourdouleix, s’est rendu sur place. Le ton a monté et l'élu aurait, selon lui, été « comparé à Hitler » par les gens du voyage, mettant en cause son comportement raciste. La réponse du député-maire aurait été : « Comme quoi, Hitler n'en a peut-être pas tué assez ». Les propos ont été publiés par le Courrier de l’Ouest.
Aujourd’hui, Gilles Bourdouleix se défend d'avoir prononcé une telle phrase, et dit avoir marmonné « Si c'était Hitler, ils les auraient tués ».Tout le problème est que le journaliste, Fabien Leduc, journaliste au Courrier de l'Ouest, et auteur de l'article, confirme... et explique avoir enregistré. La bande-son a été rendue disponible.
Le premier point sera donc de savoir quels propos exacts ont été tenus, et s'ils étaient tenus pour être entendus, et par qui.
Le second point est la qualification. Il faudra faire une étude précise lorsque l’on connaitra exactement les propos et le contexte, mais regardez un peu ce que dit la jurisprudence.
La base : l’écrit qui présente comme digne d'éloge une personne condamnée pour crime, magnifie son crime et fait ainsi l’apologie dudit crime (Cour de cassation, chambre criminelle, 16 novembre 1993, n° 90-83128, Publié). Mais est aussi une apologie des crimes de guerre, la publication d'un texte de nature à porter un jugement de valeur morale favorable aux dirigeants du parti national socialiste allemand condamnés comme criminels de guerre par le Tribunal international de Nüremberg et constituant un essai de justification au moins partielle de leurs crimes. (Cour de cassation, chambre criminelle, 14 janvier 1971, n° 70-90558, Publié). La Cour ajoute qu’un écrit qui présente comme susceptibles d'être justifiés des actes constitutifs de crimes de guerre doit être considéré comme apologétique et l'intention coupable se déduit du caractère volontaire des agissements incriminés (Cour de cassation, chambre criminelle, 7 décembre 2004, n° 03-82832, Publié).
Gilles Bourdouleix est député, mais l’immunité dont il bénéficie ne joue pour les opinions émises « dans l'exercice de ses fonctions » (Constitution, article 26 ; Cour de cassation, Chambre Criminelle, 7 mars 1988, Bull. n° 113 p. 286).
Si la phase est exacte, elle ne relève pas du dérapage mais de l’apologie de crime de guerre. C’est au Parquet de prendre les initiatives. Pour rappel, des poursuites visant cette qualification avaient été engagées à propos du tee-shirt « Jihad, né le 11 septembre ». Les faits sont ici d’une autre gravité.