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Le calme ou la tempête ?

Justice au singulier - philippe.bilger, 18/03/2012

Il faut choisir une bonne météo pour la campagne présidentielle.

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Je reviens à l'instant de la gare de Lyon et j'ai constaté l'avancement des préparatifs pour la manifestation du Front de gauche place de la Bastille.

Jean-Luc Mélenchon (JLM) est en train de monter dans les sondages et il n'y a pas lieu de s'en étonner quand on entend ce tribun talentueux et simpliste donnant des frissons délicieux de peur et de curiosité à une bourgeoisie lassée de notre président.

Je trouve tout de même - mais mon opinion, apparemment, n'est guère partagée - que JLM abuse du vocabulaire et des attitudes guerriers. Entre "I'm dangerous" et "l'insurrection civique", cette antienne répétitive et belliqueuse qui aspire à nous laisser entendre que la société sera mise à feu et à sang avec bonheur par son entremise devient un procédé, une posture. A force d'être ressassée, la menace perd son venin et ressemble à un tic. Le genre "retenez-moi ou je fais un malheur" n'a qu'un temps. Au-delà, il tombe dans le ridicule. La tempête puis la tempête. JLM devrait laisser aussi sa chance au calme (Le Parisien).

Qui pouvait douter qu'une fois lancée, la formidable machine présidentielle (l'appareil, le parti et le candidat) ne ferait pas des dégâts ? Imaginait-on Nicolas Sarkozy, avec des sondages initialement médiocres, se contenter d'une campagne pépère en s'appuyant sur son statut de président alors que précisément celui-ci est plus qu'en question ? Il était facilement prévisible que l'outrance, la violence verbale, le pilonnage incessant de son adversaire principal seraient ses armes quotidiennes et, de fait, encore tout récemment à Lyon, elles ont été exploitées avec maestria. Ni le calme ni la tempête : du grand vent en permanence (Journal du Dimanche).

Aussi, les doléances du Parti socialiste sur cette "violence", cette "outrance", même confirmées avec mesure par François Hollande (TF1), apparaissent davantage comme des gémissements traduisant l'inquiétude, le soupir de belles âmes effarouchées et déstabilisées que pour une indignation véritable qui serait au demeurant hors de propos. La forme de cette campagne étant ce qu'elle est, il conviendrait que le candidat socialiste s'attachât au fond en veillant à ce que son intelligence, son sens de la complexité, son désir d'humanisme ne rendent pas flou son projet. S'abandonne-t-il à une "force trop tranquille" (Marianne 2) en répugnant à réagir avec vigueur parce qu'obsédé par le premier tour, il ne penserait en réalité qu'au second et au débat avec son probable contradicteur Nicolas Sarkozy ? Est-il si ennemi de la tempête et de l'artifice d'orages suscités pour la façade qu'il s'en tiendrait à un calme manifestant certes sa résistance à tout mais donnant l'impression aussi, peut-être, d'une personne imperméable à ce qui devrait la mobiliser, la faire bouger ? Le calme est une belle disposition qui, poussée à la limite, fait regretter les impétueux et les résistants.

Ce n'est pas qu'un problème de climat.

Quand François Hollande se propose de modifier la Constitution de la République - ce qui, en effet, fait toujours "très chic", comme le souligne François Terré (Le Figaro) - en supprimant le mot "race" de son article 1er, j'incline à considérer que cette surenchère qui n'est absolument pas nécessaire révèle un investissement dans l'immatérialité laïque et généreuse à proportion de la difficulté d'offrir des pistes crédibles et fiables pour la matérialité de la politique qu'on attend. C'est une fuite plus qu'une avancée.

Sur un autre plan, où en est-on au sujet des peines plancher ? Cette réforme fondamentale et utile de 2007 - il n'y en a pas eu tant qu'on puisse négliger cette dernière - va-t-elle être supprimée ou maintenue ? Il y a des variations socialistes qui nous laissent dans une incertitude à vite dissiper car la position de François Hollande constituera un indicateur précieux sur la capacité de la gauche à intégrer et pas seulement à défaire. A révérer une sorte de catéchisme ou à privilégier ce que la réalité a rendu irremplaçable.

Il faut choisir une bonne météo pour la campagne présidentielle.


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