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Emmanuel Macron entre deux rounds...

Justice au Singulier - philippe.bilger, 13/04/2018

Emmanuel Macron, avant le round de ce dimanche 15 avril, sera porté par cette insigne maladresse de François Hollande. Il aura déjà remporté une victoire avant même d'avoir combattu.

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Ce soir, je suis prêt à sacrifier le match de foot Monaco-PSG pour pouvoir regarder le débat entre d'un côté Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin et de l'autre le président de la République. C'est dire comme je suis impatient de ce qui nous attend sur un plan civique et médiatique !

Ce sera un combat, une joute passionnante dans tous les cas. Dans cette lutte que le président mène contre les médias (il ne veut pas se laisser imposer leur rythme et leur superficialité) tout en se servant d'eux quand il l'a décidé, la rencontre entre ces deux journalistes et lui-même sera un round important quoique non décisif. Il aura encore tant d'autres opportunités pour s'expliquer et convaincre durant les quatre années qui lui restent pour présider et, j'en suis persuadé, pour se représenter. Pour atypique qu'il soit, Emmanuel Macron aura cette ambition ordinaire, et pourquoi pas légitime ?, de penser que sans lui, la France serait orpheline.

Entre deux rounds ? Plutôt entre une séance d'échauffement et un round.

En effet le long entretien que le président a eu avec Jean-Pierre Pernaut le 12 avril dans le JT de TF1, s'il a tenu ses promesses, n'a pas mis Emmanuel Macron en difficulté. En roue libre, avec une maîtrise de son argumentation et ses facultés d'empathie poussées à leur comble, il a, questionné par un journaliste demeurant dans son registre, c'est-à-dire dans le bon sens du terme populaire, fait preuve, dans cette belle salle de classe de l'Orne, de ses dispositions préférées : une pédagogie souriante et patiente.

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Les citoyens n'étant pas perçus comme des enfants mais pour des compagnons auxquels il convenait de préciser, d'expliquer les choses de la vie, du pouvoir et de la complexité. L'exercice a eu ses limites et il est vraisemblable que le président n'a pas forcément rassuré les retraités ni amoindri leur rancoeur quand il les a pris par le sentiment et répété qu'il avait besoin d'eux. L'affection tactique en l'occurrence n'a pas forcément créé de la conviction.

Le boxeur présidentiel a fait ses gammes, s'est entraîné, s'est échauffé et ce soir il sera fin prêt. Je ne me fais aucun souci pour lui.

D'abord - j'espère me tromper - j'ai cru comprendre qu'il ne serait question que de politique internationale où l'action du président a redonné à la France de l'allure, de la hauteur et de la cohérence. Même si on aborde les thèmes liés à la quotidienneté de la vie publique, à l'immigration, à l'islamisme et au terrorisme, je ne doute pas que les échanges ne seront pas forcément à son désavantage.

Jean-Jacques Bourdin est un puncheur remarquable, très pugnace mais de courte distance. Paradoxalement, il permet au talent qui lui fait face de s'appuyer sur la vigueur du questionnement et de l'exploiter.

Edwy Plenel, pour être un opposant résolu et sur certains sujets monomaniaque, est aussi un journaliste qui a peu l'habitude de ces entretiens. Il corrigera, s'il le peut, son défaut qui est de poser des questions interminables qui laissent peu de place à son interlocuteur pour la réponse. Par ailleurs Plenel, à la fois enrichi et entravé par sa maîtrise du verbe, est souvent conduit à adoucir la violence du fond et en définitive la charge est beaucoup moins explosive qu'on pourrait le craindre ou le souhaiter. Enfin il convient de ne pas oublier - et Mediapart l'a bien compris - que, si Plenel a pour ambition de projeter le président dans les cordes, ce dernier, en acceptant la confrontation, va banaliser son contradicteur et va faire passer son soufre pour une tranquille et démocratique conversation. Plenel perdra probablement plus dans ce pugilat que le président qui ne déteste pas que ses retranchements soient atteints et qui a du répondant.

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Je ne sais pas si ces deux entretiens en trois jours résultent d'un dessein machiavélique du président (L'Obs). En tout cas, ils surviennent dans une période qui ne pouvait lui être plus favorable grâce paradoxalement à la médiatisation aigre de François Hollande qui vient de publier son livre "Les leçons du pouvoir". Manifestement il ne les avait pas bien apprises même si son ouvrage est tout sauf médiocre et ne mérite pas les crachats, la dérision, l'opprobre avec lesquels lui et son auteur ont été traités.

François Hollande n'a pas eu l'intelligence ni la sagesse de se retenir, de demeurer durablement dans une ombre qui si elle n'est jamais totale pour un ancien président, aurait dû tout de même le mettre en retrait dans l'espace public et médiatique. A l'évidence il ne parvient pas à digérer son abandon de 2017 comme s'il avait besoin, après, de livrer une campagne présidentielle qu'à l'heure dite il avait été contraint d'abandonner. Voir mon billet du 25 août 2017 : François Hollande ne se remet pas de n'avoir pas perdu en 2017 ! Il n'a pas échappé au ridicule quand sur France 2 il a eu le culot de déclarer : "J'aurais pu battre Emmanuel Macron mais je ne l'ai pas voulu" (France 2, RTL).

A la rigueur on aurait pu lui pardonner la publication précipitée de son livre - inventaire et justification de son quinquennat - s'il ne cessait pas de déborder et de prétendre donner des leçons, au nom de son échec, à la conduite présidentielle d'Emmanuel Macron. Il est patent qu'on est prêt à lui lâcher la bride pour qu'il puisse reconstruire le passé à sa guise mais qu'on lui dénie toute légitimité pour s'aventurer dans le futur et blâmer un président qui ne l'a pas une seconde fait regretter.

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Emmanuel Macron, avant le round de ce dimanche 15 avril, sera porté par cette insigne maladresse de François Hollande. Il aura déjà remporté une victoire avant même d'avoir combattu.


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