Preuve d’un risque de persécution
Planète Juridique - admin, 26/01/2015
Code Lexis-Nexis 2014, C. étrangers, art. L. 711-1 et Annexe 3
La Cour européenne a de nouveau condamné les modalités d’appréciation pour le moins expéditives d’une situation de persécution par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile.
En 2013, elle avait déjà déjugé sévèrement l’appréciation portée sur la situation d’un candidat à l’asile sri-lankais qui avait été débouté de sa demande au motif que son récit était peu étayé. Pourtant, un certificat médical établi en zone d'attente par un médecin français décrivait quatorze plaies récentes par brûlure occasionnant des douleurs. Pour la Cour, ce document constitue « une pièce particulièrement importante du dossier (établissant) une forte présomption de traitement contraire à l'article 3 de la Convention » (CEDH, 19 sept. 2013, no 10466/11, R. J. c/ France, § 42). Elle avait pointé ici la négligence des autorités françaises qui n'ont jamais cherché à établir l'origine de ces plaies et à évaluer les risques qu'elles révélaient. La Cour nationale du droit d'asile s'était notamment bornée à relever que le certificat ne démontrait pas un lien avec des sévices infligés en détention et s'en était tenue à la seule invocation du caractère lacunaire du récit. De la même manière, elle avait estimé qu'il pouvait être reproché aux autorités françaises de ne pas avoir pris en compte les risques spécifiques encourus par un ressortissant iranien qui avait manifesté son opposition à une milice locale (CEDH, 30 avr. 2013, no 55787/09, Mo. P. c/ France, § 51 à 54). La France avait encore été condamnée pour avoir débouté un ressortissant pakistanais de confession ahmadie au seul motif que ses déclarations écrites étaient « sommaires, peu crédibles et dénuées de précision personnalisée et argumentée ». La Cour européenne s'était rangée à une toute autre appréciation en relevant qu'elle ne trouvait pas d'éléments dans les motivations des instances françaises pour écarter le récit du requérant et que le Gouvernement français ne lui avait soumis aucun élément mettant en doute l'authenticité des documents produits (CEDH, 19 déc. 2013, no 7974/11, N.K. c/ France, § 45).
Le 15 janvier 2015, les juges de Strasbourg ont une nouvelle fois dénoncé l’appréciation de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides qui avait rejeté la demande de protection de deux ressortissants soudanais en raison de l’incohérence de leurs récits, de l’absence de preuve matérielle et d’un mensonge sur l’identité d’un requérant. Estimant qu’un renvoi exposerait ces personnes à un risque de peine ou traitement inhumain ou dégradants, la Cour a mis en avant un faisceau d’indices accablants : condamnation à une peine de prison justifiée par le soutien aux forces d’opposition, récit circonstancié et compatible avec les données internationales disponibles, présence de plusieurs cicatrices conformes aux allégations de torture, méfiance des autorités soudanaises à l’encontre des darfouris ayant voyagé à l’étranger, violences endémiques à l’égard des membres des ethnies darfouries (CEDH, 15 janv. 2015, n° 18039/11 et n°80086/13, A.A. et A.F. c/ France).