Le Code du travail battu à la présidentielle ?
Actualités du droit - Gilles Devers, 7/05/2017
Emmanuel et Brigitte veulent Code du travail, pour « donner de la souplesse aux entreprises », et donc en limitant les droits des salariés :
- accords d’entreprise pour librement fixer le taux de majoration des heures supplémentaires, en écartant le minimum légal de 10% ;
- accords d’entreprise étendu aux salaires, aux conditions de travail, et à la formation, donc tout est en live ;
- fusion du comité d’entreprise, des délégués du personnel et du CHSCT en une instance unique, le but étant de casser la défense collective des droits des salariés ;
- plafonnement des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, mesure inique qui avait été annulée le Conseil constitutionnel dans la loi El Khomri.
Il n’y a jamais eu une seule étude pour expliquer qu’une entreprise embauchait ou non en fonction de la législation du travail, qui est – tout le monde le sait – aussi souple que non coûteuse pour les premiers mois, et même les premières années. Dézinguer le Code du travail créera combien d’emplois ? Où est l’étude ? Une entreprise embauche quand elle a des carnets de commande. Et le must : limiter l’action du CHSCT, qui veille sur la santé et la sécurité des salariés… une mission quasi-marxiste !
En réalité, c’est un choix de banquier : améliorer les résultats des grosses entreprises, et tant pis pour la fragilisation de la société.
Dans leur belle aventure, Emmanuel et Brigitte vont rencontrer un petit obstacle qui s’appelle la loi, mais tous deux sont tellement mignons et « progressistes » qu’ils veulent marginaliser de cet obstacle dérisoire.
Premier tracas, l’article L1 du Code du travail :
« Tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l'objet d'une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l'ouverture éventuelle d'une telle négociation.
« A cet effet, le Gouvernement leur communique un document d'orientation présentant des éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options.
« Lorsqu'elles font connaître leur intention d'engager une telle négociation, les organisations indiquent également au Gouvernement le délai qu'elles estiment nécessaire pour conduire la négociation ».
Emmanuel et Brigitte connaissent bien cet article, qui est la marque d’un droit du travail de la négociation et de l’inclusion, et qu’ils n’avaient pu faire abolir par la loi El Khomri.
Alors, cette concertation ? Eh bien, ils ont clairement annoncé que ce serait une concertation a minima, comme une formalité creuse. Hors de question d’entrer dans une négociation.
Deuxième tracas, le vote de la loi au Parlement. Là, les choses sont claires : la loi réformant le code du travail ne sera pas débattue au Parlement. Emmanuel et Brigitte veulent se faire autoriser à réformer le Code du travail par ordonnances,… et pendant l’été. Même pas la peine de se fatiguer avec le 49-3 : ce sera des ordonnances prises en conseil des ministres après avis du Conseil d’État. Je rappelle qu’il fallait voter Emmanuel et Brigitte pour défendre la démocratie.
La question d’un vote salutaire créant une majorité sérieuse à l’Assemblée nationale, pour bloquer ce genre de progressistes, s’impose comme un enjeu décisif. Logique : sagesse n’est pas folie.