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La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit bride la compétence du juge administratif en matière de propriété intellectuelle

droit des collectivités territoriales - actualités et miscellane - Luc BARTMANN, 7/11/2011

L'un des articles de la loi susvisée a eu pour objectif de clarifier les dispositions du Code de la propriété intellectuelle (CPI) régissant les voies civiles de recours en matière de propriété littéraire et artistique (article L. 331-1 dudit code), de dessins et modèles (article L. 521-3-1), de marques (article L. 716-3), d’indications géographiques (article L. 722-8), de brevets d’invention (article L. 615-17) et d’obtentions végétales (article L. 623-31). Il s’agissait de bien poser le principe de spécialisation juridictionnelle selon lequel les actions civiles et les demandes effectuées dans chacune des matières précitées relèvent de tribunaux de grande instance (TGI).
Or, parmi ces matières, s'il est un domaine dans lequel le juge administratif a accepté sans trop d'hésitations de se reconnaître compétent, c'est bien celui de la propriété intellectuelle. Cette solution repose  implicitement sur le postulat que le rattachement ducontentieux des droits d'auteur est commandé par des considérationsétrangères au droit d'auteur lui-même.

Le juge administratif se fonde ainsi sur la nature ducontrat qui est à la base du litige ; s'il s'agit d'un marchépublic, ou d'une façon plus générale d'un contrat administratif,la juridiction administrative se juge compétente pour statuer surtous les aspects du litige, y compris ceux relatifs à la propriétéintellectuelle. Ceci a été affirmé expressément par un arrêt duConseil d'Etat par lequel il a jugé que la juridictionadministrative était compétente pour se prononcer sur la détentionpar un facteur d'orgue d'un droit de propriété intellectuelleen raison des travaux effectués sur l'orgue d'un édifice cultuel (C.E. 14 juin 1999 Conseil de la fabrique de la cathédrale de Strasbourg n° 181023).Mais la juridiction administrative se reconnaît également compétente quand l'unedes parties au litige est une personne publique. On peut ainsi seréférer à un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon quise prononce sur l'existence d'une atteinte au droit moral d'unartiste du fait d'un défaut d'entretien de ses œuvres par unecommune (CAA de Lyon du 20 juillet 2006 M. Gustave X. n° 02LY02163).


Plus récemment, dans un arrêt du 27 avril 2011 consorts A. n° 314577 le Conseil d’État a étendu la compétence du juge administratif aux mesures conservatoires en matière de droits d'auteur, en se fondant sur la subtile distinction entre la mesure conservatoirerelevant de la saisie-contrefaçon stricto sensu, et la mesured'exécution impliquée par une décision au fond rendue par le juge administratif lui-même.

Cette tendance du juge administratif pouvait se justifier au regard de la rédaction de l’article L. 331-1 du  CPI qui disposait jusqu'au 19 mai 2011 :

"Toutes les contestations relatives à l'application des dispositions de la première partie du présent code qui relèvent des juridictions de l'ordre judiciaire sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance, sans préjudice du droit pour la partie lésée de se pourvoir devant la juridiction répressive dans les termes du droit commun."On notera que ce texte n'englobait dans la compétence des TGI que les contestations en matière de propriété intellectuelle qui relevaient des juridictions de l’ordre judiciaire, ce qui revenait à admettre à contrario que des contestations en la matière pouvaient relever d'un autre ordre de juridiction.

Mais le texte est dorénavant rédigé ainsi :

"Les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique, y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance, déterminés par voie réglementaire."
C'est donc très clairement un bloc de compétence judiciaire qui est créé par la loi, et l'on devrait donc normalement voir se tarir les jurisprudences administratives statuant sur des problématiques de droit d'auteur.
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