150 morts à Kaboul… Il faut virer les US et Daech
Actualités du droit - Gilles Devers, 7/06/2017
Ce 31 mai, à 8 h 20, un camion de vidange, blindé d’explosifs, a foncé place Zanbaq, dans Wazir Akbar Khan, le secteur sécurisé de Kaboul, qui comprend les bâtiments officiels, dont la présidence, et les ambassades étrangères. Pour arriver jusque-là, le camion avait passé plusieurs points de sécurité. In extremis, les policiers ont tiré, causant la déflagration : 13 policiers sont morts. Le bilan est dramatique : 150 morts et 300 blessés. Plusieurs ambassades ont été endommagées par la puissance de l’explosion.
L’attaque n’a pas été revendiquée. C’est donc du très sérieux.
La population, éreintée par ces décennies de terrorisme, est descendue dans les rues de Kaboul, demandant la démission des responsables de la sécurité. En réponse, une répression violente, qui a fait 4 morts le 2 juin. Pour dire l’ambiance, le ministre des Affaires étrangères, Salahuddin Rabbani, qui a échappé il y a peu à un attentat et dirige le parti tadjik Jamiat, appuie cette demande, alors que le président Ghani, issu de l'ethnie pachtoune, s’y oppose…
Le gouvernement afghan, à bout de souffle et sous perfusion étasunienne, a aussitôt accusé le réseau Haqqani, de la famille des talibans. Ce qui est incohérent : vu les réalités du terrain, il n’y a pas d’avenir en Afghanistan sans un accord politique avec les talibans, qui ont rejeté toute implication dans l’attentat. Ils sont en position de force, devenus quasi-institutionnels, et auraient tout à perdre en ensanglantant la population de Kaboul.
Ces gens-là savent composer avec le temps. Le réseau a été créé à la fin des années 1970 par la CIA et l’ISI (services secrets pakistanais) pour mener la guerre intérieure contre les soviétiques, qui tenaient alors Kaboul. Après l’invasion US de 2001, le réseau Haqqani a été combattu au nom de « la guerre contre le terrorisme », et ses troupes ont rejoint l’arrière-pays et la résistance.
En réalité, les US sont en train de perdre la main, car ils sont face à un choix impossible : pour ressaisir la situation, ils devraient redéployer les troupes, ce qui est impossible à faire passer dans l’opinion US (16 ans de guerre en Afghanistan pour quel résultat ?). Alors, ils pourraient tout miser sur le jeu politique, mais c’est imposable car ils sont haïs de la population. L’impasse de war on terror… Une leçon à méditer.
Les pays forts de la région, la Russie et l’Iran, ne peuvent laisser la situation pourrir. Avec pour principes la stabilité des États dans leurs frontières et en alarme sur la transhumance des djihadistes, ils cherchent à reprendre la main, partie complexe car il faut parler à tout le monde – dont les talibans - et mettre dans le coup les grands voisins, le Pakistan, l’Inde et la Chine.
Daech a une carte à jouer : bloquer le processus en semant le chaos et en attisant les divisions. S’est ajouté, le largage par Trump, le 13 avril dernier, d’une bombe de puissance extrême sur des zones montagneuses tenues Daech. Daech proclamé principal adversaire par les US ? Une vraie aubaine ! Alors, on va se faire entendre, et foncer dans la destruction : meurtres aveugles pour meurtres aveugles, en pourrissant la situation.
Pour le peuple afghan, l’avenir est clair : virer les US et Daech. Un travail militaire et diplomatique de longue haleine. Respect aux morts passés, présent et à venir, sur cette terre devenue de feu.
Immense respect pour la population meurtrie de ce pays. Mais notre gouvernement est bien bon, et il joue à fond les cartes du droit et de la solidarité pour accueillir les demandeurs d'asile afghans... C'est bien connu.