Compay Segundo, tout simplement
Actualités du droit - Gilles Devers, 7/07/2012
Un chanteur, s’accompagnant à la guitare s’approche du micro… Mille fois vu, toujours différent, mais quand nous avons entendu Compay Segundo, c’était un autre monde.
D’abord, le son de la guitare. L’Espagne, riche et conquérante, a inventé des guitares puissantes et onctueuses, mais à Cuba, les guitares étaient fabriquées avec des bois récupérés sur les ports. Un petit modèle, au son plus aigre, nulle pour la rythmique, et condamnée à être une invitation à chanter. Pour ce faire, les cubains ont doublé deux cordes, le sol et le mi, à un octave. C’est la tres, au son unique, acidulé, harmonique et décalé. Compay Segundo, qui s’amuse à jouer de la musique depuis qu’il est gosse, a bricolé une guitare cubaine à sept cordes, l’armonico, seule la corde du sol étant doublée.
Ca, c’est le truc du son unique. Ecoutez le premier air, enregistré en studio : on distingue bien les sons simples et les sons doubles. Piquez ensuite dans le concert à 20 : 20, à 27 : 30, ou à 43 : 30. Compay Segundo embarque l’orchestre, et on entend deux guitares,… mais il n’y en a qu’une… Une dont deux cordes sont doublées.
Et Compay Segundo se met à chanter : le rythme nous avait déjà posés à Cuba, dansant, fort, mais nous sommes saisis par la chaleur de cette voix, patinée par un usage intensif des plus doux des havanes.
Compay Segundo, né en 1907, artiste depuis ses quinze ans, a chaque jour célébré la musique devant ses fidèles amis, mais il a gagné sa vie comme rouleur de cigares – torcedor – un grand métier, exercé jusqu’à ses soixante dix ans « sans manquer un seul jour ».
C’est uniquement en 1997, avec l’album Buena Vista Social Club, qu’il a conquis le monde, lançant avec lui mille musiciens dans les feux de la scène.
Le voici pour son concert à l’Olympia en 1999. 92 ans, resplendissant et nous faisant découvrir des mondes nouveaux. Prenons le temps de nous arrêter devant la beauté, la beauté qui mêle le bonheur et les larmes.