Excellence sartoriale française : des marques anciennes pour des vêtements (plus ou moins) chics
Le petit Musée des Marques - Frédéric Glaize, 14/04/2019
Au hasard d’échantillonnages de vieux bulletins de marques françaises, parmi les logotypes remarquables ainsi découverts, j’ai mis de côté ces personnages attachés à une certaine notion l’élégance vestimentaire.
Certains d’entre eux tiennent la dragée haute au savoir-faire so british de Savile Row et au raffinement transalpin. D’autres sont plus anecdotiques, mais tous ont une allure unique.
Commençons avec le père Mathieu, un homme à la dégaine un peu rustique, les mains dans les poches, le veston ouvert et une dégaine peu guindée. La marque vise des “ceintures de laine élastiques” destinées à soutenir non pas le pantalon mais “le ventre et les reins et à [tenir] les mains aux chaud“.
On passe ensuite à un autre prénom, Eric, qui rime avec chic. Le secret de sa chemise au col impeccable est dans le renfort de la pointe des baleine.
De col de chemise, il est encore question avec le personnage suivant qui en a un aussi démesuré que ses poignets mousquetaires. Ce personnage est un emblème de DHJ, société spécialisée dans l’entoilage qui fait partie du groupe Chargeurs depuis 1995.
La marque suivante a été déposée après guerre, époque à laquelle la Résistance ne faisait pas référence à la qualité des vêtements. Dans un pose qui aurait pu être celle de James Cagney dans Little Caesar ou de Paul Muni dans Scarface, le personnage emblématique de cette marque marseillaise se retrousse les manche, regarde au loin et pose le genou à terre pour canarder. Chez cet homme d’action, le souci du paraître se traduit dans le soin avec lequel sont assortis tant la casquette que les chaussures aux vêtement : un seul motif semble faire son affaire.
Passons maintenant à un gentleman. On le reconnait à certains détails : son œillet à la boutonnière et la façon qu’il a de tenir sa cigarette. Cette marque est celle du GAGMI, un des piliers de la grande distribution, qui fût à l’origine de l’essor des hypermarchés en France (et dont le rôle est souligné dans un article de LSA de 2003).
On continue avec le portrait d’un dandy. Celui-ci est caractérisé par une fine moustache, un nœud papillon, le pommeau d’une canne et, détail incroyable, un lorgnon carré. Le style du dessin est emprunté à Edouard Halouze, illustrateur du début du XXème siècle (dont on peut voir ici un pochoir). Et l’on notera que l’adresse du titulaire de cette marque, le 12 boulevard des Capucines, est celle du regretté Old England (1867-2012).
On passe maintenant rue de la Paix, dans un temple parisien de la grande mesure, la maison Stark and Sons, qui est celle où sont par exemple taillés les habits des académiciens. Aujourd’hui sous la houlette de Camps de Luca (qui s’y est réfugié en quittant la place de la Madeleine), cette maison créée en 1910 avait déposé une marque “Prémesure” où l’on voit un tailleur tendre un fil. Le libellé des produits traduit le soin donné à l’ouvrage : “vêtements en tous genres, coupés, préparés à l’avance et exécutés pièce par pièce, vêtements coupés et taillés d’après des mesures précises prises avec un fil à plomb, gradué en centimètres“.
La dernière marque de cette série est atypique et peu pudibonde : pour vendre des vêtements, elle montre leur absence. Son titulaire, exploitant une friperie rémoise, vous invite toutefois à ne pas “aller cul nu“.