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Intérêt de l’enfant ou intérêt des couples homosexuels ? (502)

Droits des enfants - jprosen, 18/11/2012

Invoquer, comme le fait Eric Walter dans le Libération du vendredi 16 novembre, les droits de l’enfant pour justifier l’adoption pour tous est profondément choquant. Revendiquer l’accès au mariage pour les couples homosexuel et l’adoption au nom des enfants est … Continuer la lecture

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Invoquer, comme le fait Eric Walter dans le Libération du vendredi 16 novembre, les droits de l’enfant pour justifier l’adoption pour tous est profondément choquant. Revendiquer l’accès au mariage pour les couples homosexuel et l’adoption au nom des enfants est un détournement pur et simple de la réalité. La stratégie est classique consistant à retourner un argument contre ses adversaires mais il y a des limites qu’on ne saurait dépasser.

D’abord ce n’est pas d’aujourd’hui comme il le prétend que nous nous préoccupons de la protection des enfants, d’ici et d’ailleurs. Personnellement je n’ai pas attendu le débat sur le mariage  homosexuel pour poser la question des droits de l’enfant. Je revendique même d’avoir vu venir la question de la revendication d’un droit à l’enfant bien avant d’autres. Il suffirait de remonter dans ce blog pour le vérifier ou de revisiter mon site www.rosenczveig.com qui a plus de 10 ans d’âge. Et j’ajoute avoir été responsable pour le compte du ministre de la famille de la loi sur l’adoption du 6 juin  1984 qui a veillé à ce que tous les enfants même handicapés se voient reconnaître le droit d’accéder à l’adoption.

Ce débat sur la légitimité et la compétence étant vidé, reste qu’il faut appeler un chat un chat. Le droit à l’enfant, par l’adoption ou par les procréations assistées, est au cœur du débat posé par le mariage homosexuel. Or l’enfant n’est pas un objet, mais un sujet dont on doit autant se préoccuper que de ceux qui le revendiquent.

Raisonnons donc !

Des homosexuels qui s’aiment et veulent voir sacraliser leur union, quoi de plus normal aujourd’hui ! Certains estiment que le PACS est un sous-statut et veulent accéder au mariage comme les hétérosexuels, pourquoi pas ! Etant observé que nombre d’hétérosexuels préfèrent la souplesse du PACS au mariage et à sa procédure de divorce - il faut aussi prévoir le pire -  longue et coûteuse. Et en relevant que nombre de couples homosexuels comme hétérosexuels sont fondamentalement hostiles au mariage. A chacun sa formule. Liberté chérie. Personnellement je ne vois pas d’inconvénient à ouvrier le mariage à l’ancienne devant Monsieur le maire aux homosexuels.

Mais que l’on ne nous dise pas que c’est pour les enfants.

Cette reconnaissance du droit au mariage civil est d’autant aisé pour le juriste que notre droit dans ses évolutions les plus récentes - et j’ajoute sous notre pression répétées- a pris sa distance par rapport au contenant de ce qui fait famille – le mariage depuis Napoléon – pour s’attacher d’abord au contenu : les rapports parents-enfants. Les deux parents, mariés ou non, qu’ils vivent ensemble ou non, exercent pleinement et à égalité l’autorité parentale dès lors que la filiation est reconnue avec l’enfant et chacun d’eux. S’il y a conflit dans le couple il faut une décision de justice qui confiera l’exercice à titre principal à l’un ou à l’autre et, mieux, qui laissera l’exercice conjoint perdurer pour s’attacher à la résidence. Certains diront qu’on a reconnu le droit des pères ou des mères ; en vérité nous avons consacré le droit de l’enfant à ses deux parents. Tant mieux si les adultes y trouvent leur compte, mais l’enjeu a été l’enfant.

On est donc renvoyé au débat sur la filiation. La filiation s’établie soit pas présomption (l’époux est censé être le mari des enfants déclarés par son épouse sous son nom de femme mariée), soit par un acte volontaire quand les parents ne sont pas mariés, sachant que désormais la femme qui accouche n’a plus a priori à déclarer son enfant : les témoins le font, sauf si elle s’y oppose (déclaration sous le nom de jeune fille, accouchement sous X, etc.)

Reste que les couples conjugaux sont plus fragiles que les couples parentaux. Ils se défont souvent. Une nouvelle cellule se reconstitue fréquemment – pas systématiquement - avec un compagnon ou une compagne et parfois les enfants de celui-la ou de celle-la. Et le mouvement peut se répéter avec plusieurs strates d’adultes autour du même enfant !

Oui, je le dis et je le répète depuis 20 ans, là encore dans l’intérêt des enfants, mais aussi des adultes, parents biologiques ou affectifs, il faut consacrer l’arrivée le statut de celui qui n’est pas parent. Il a des droits et des devoirs à l’égard de l’enfant qu’il élève au quotidien qui n’ôte rien à ceux du parent biologique et juridique.

Cette avancée juridique permettait de reconnaître de facto et de jure l’homoparentalité.  Des enfants sont élevés par des couples homosexuels sans que les enfants en pâtissent. Sur les deux millions et demi d’enfants vivant avec un seul parent biologique - dont un million avec un compagnon ou une compagne du parent - on peut estimer que quelques milliers – et pas des dizaines  et des dizaines de milliers comme l’avance M.Walter – ont vu un parent du même sexe que celui qui l’élève s’installer avec celui-là.

En d’autres termes, le statut du tiers, sans référence à la sexualité, permettrait sans heurts et sans problèmes de prendre en considération l’homoparentalité quand elle existe. Adultes et enfants auraient à y gagner.

C’est une autre question que celle qui nous est posée par les couples homosexuels : un enfant peut-il avoir deux filiations paternelles ou deux filiations maternelles ? 

La majorité des français s’y refuse et à tout le moins disent qu’il faut être prudent ici en analysant les conséquences en chaîne que cela peut avoir sur un sujet délicat à aborder et pilier de la société.

Par exemple, aujourd’hui, un enfant ne pouvant pas avoir deux pères, l’officier d’état civil refusera d’enregistrer la nouvelle reconnaissance de paternité qui pourrait intervenir. Il faut en supprimer une pour en substituer une autre. Demain, le tabou étant tombé, faudra-t-il accepter que l’enfant se voit doter de plusieurs pères ou mères selon la vie affective de ses parents ? Et pourquoi s’arrêter à deux : ne peut on pas imaginer trois hommes ou trois femmes qui s’aiment d’amour et veulent élever un enfant ensemble ? Le fait que l’Eglise reprenne cet argument que je développe depuis des lustres ne retire rien à sa pertinence.

Un beau-père ou une belle-mère hétérosexuels ne peuvent adopter l’enfant du conjoint que si l’enfant n’a pas déjà un père ou une mère. Sinon il faut l’accord de celui-ci ou de celle-là pour une adoption simple. Si l’adoption intervient le parent biologique perd l’autorité parentale.

Une des difficultés à la reconnaissance du mariage homosexuel tient à une décision de la Cour européenne de justice qui, en référence à la conception ancienne du mariage cellule de base de la famille, lie indéfectiblement  mariage et adoption. On comprend dès lors les résistances qui montent en force en en France ces dernières semaines à l’égard du mariage homosexuel pour ne pas tomber dans l’automaticité de l’adoption refusée par l’opinion ?

L’adoption est une fiction : l’enfant est réputé avoir pour père ou pour mère celui qui l’adopte. On voudrait nous faire croire avec deux filiations paternelles ou deux filiations maternelles qui fonctionneraient de pair que l’enfant a été conçu par deux hommes ou deux femmes. C’est une frontière que ne veulent pas franchir une majorité de français. Et je redis ici que respecter une minorité ce n’est pas accepter qu’elle dicte sa loi à la majorité.

Voyant monter la mayonnaise qui risque de déboucher sur un affrontement digne de celui de 1983 autour du service public de l’éducation j’affirme que la prise en compte aujourd’hui de l’homoparentalité passe par le statut du tiers et par l’octroi de certains attributs de l’autorité parentale du père à son compagnon ou de la mère à sa compagne. Le droit correspondrait à la réalité sans ambiguïté. C’est la voie à suivre.

Avançons dans le raisonnement d’Eric Walter : les groupes de pression homosexuels, faute de pouvoir adopter en France ou à l’étranger, revendiquent déjà haut et fort  l’accès aux procréations assistées et bien évidemment au final, au nom de l’égalité hommes femmes, à la gestation pour autrui. Or l'enfant ne peut pas devenir l'objet d'un contrat même gratuit. Dans notre droit on ne peut pas déléguer l'autorité parentale à autrui dans un contrôle de la justice pur éviter les trafics. Comment une majorité de gauche ferait-elle tomber la personne humaine dans le marché ?  Et qui plus au nom des droits de l'enfant? On marche sur la tête.

La fécondation avec donneur – de sperme ou d’ovule – pose la question de la dissociation des filiations génétique, gestative, sociale, juridique et affective. L’homme qui donne du sperme est le père biologique, la femme qui porte l’enfant est la mère. Comment nier ces réalités ? Mais celui ou celle qui élève l’enfant et le fait sien comme la chair de sa chair doit aussi être reconnu(e). A l’inverse on ne peut pas gommer les premiers au profit du parent social, affectif ou juridique. Il faudrait avant tout chose aborder cette question majeure de la filiation, pardon des filiations, résultant notamment du développement de la chaîne du froid.

A qui va-t-on faire croire que l’ovule fécondé revendique au nom de ses droits d’enfant à naître de naître de disposer de deux parents homosexuels ?

Certains homosexuels, en violant la loi française sont déjà allés « concevoir » un enfant à l’étranger. Ils sont ostensiblement violé la loi française et aujourd’hui, au nom de leur enfant, en fait au nom de leur revendication à être parents reconnus, ils demandent à la France de changer ses règles du jeu. La Cour de cassation, a refusé de céder au chantage fait au nom des enfants. Elle a eu raison.

Les enfants ainsi conçus ont été pris en otage. Et on nous parle du droit des enfants ! De qui se moque-ton ? L’enfant n’est pas instrumentalisé par ceux que depuis des lustres affirment que l’enfant est une personne. Une nouvelle fois nous avons la preuve que ceux qui invoquent l’intérêt de l’enfant ne font que parler d’eux.

Que les homosexuels assument leur revendication, tout à fait audibles au demeurant, à élever ces être parents, mais qu’ils jouent à cartes ouvertes et entendent que leur revendication pour importante peut se heurter à d’autres enjeux encore plus essentiels.


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