Quand l’UMP et le PS soutenait la GPA
Actualités du droit - Gilles Devers, 2/02/2013
Ce que je n’arrive pas à déterminer, c’est s’ils sont vraiment nazes, ou s’ils nous prennent trop pour des nazes. Mais tout ce petit monde politique commence vraiment à sentir le faisan… Aujourd’hui, la GPA (Grossesse pour autrui) est l’horreur absolue, alors qu’il y a juste deux ans les groupes UMP et PS du Sénat déposaient une proposition de loi pour légaliser cette pratique.
Comme le PS et l’UMP ne pouvaient signer un texte commun, ils avaient adopté le même texte et l’avaient signé séparément (la 233 et la 234, du 10 janvier 2010). Comme c’est mignon.
La proposition de loi est faite de bon sens, d’esprit du droit et d’une haute considération de l’amour filial. Aussi, le blog applaudit, et d’ailleurs il l’avait fait à l’époque. On ne parlait pas de couple gay, mais comment la loi pourrait-elle créer des droits différents en fonction du sexe ? Une loi discriminatoire ? Impensable. I'm choking.
Les signataires
Voici les signataires de Droite :
Par MM. Alain MILON, André VILLIERS, François TRUCY, Joël BOURDIN, Jean-Pierre CHAUVEAU, Jean-François MAYET, Charles GUENÉ, Mmes Brigitte BOUT, Catherine PROCACCIA, M. Jackie PIERRE, Mme Muguette DINI, M. Nicolas ABOUT, Mme Catherine TROENDLE, MM. Jean-Claude CARLE, Marc LAMÉNIE, Jean-Marc JUILHARD, Bernard SAUGEY, Jean-François LE GRAND, Gérard CÉSAR, Mmes Fabienne KELLER, Sylvie GOY-CHAVENT,
Et voici les signataires de Gauche :
Mme Michèle ANDRÉ, MM. Robert BADINTER, Jean-Pierre BEL, Mmes Maryvonne BLONDIN, Nicole BONNEFOY, Alima BOUMEDIENE-THIERY, Bernadette BOURZAI, Claire-Lise CAMPION, Mmes Françoise CARTRON, Monique CERISIER-ben GUIGA, M. Yves CHASTAN, Mme Jacqueline CHEVÉ, MM. Yvon COLLIN, Yves DAUDIGNY, Claude DOMEIZEL, Jean-Pierre GODEFROY, Jean-Noël GUÉRINI, Didier GUILLAUME, Mmes Bariza KHIARI, Françoise LABORDE, M. Serge LARCHER, Mmes Claudine LEPAGE, Raymonde LE TEXIER, MM. Claude LISE, Roger MADEC, François MARC, Rachel MAZUIR, Jean-Pierre MICHEL, Jean MILHAU, Robert NAVARRO, Jean-Marc PASTOR, François REBSAMEN, Daniel RAOUL, Paul RAOULT, Mme Patricia SCHILLINGER, MM. René-Pierre SIGNÉ, Simon SUTOUR, Richard TUHEIAVA, André VANTOMME, Mme Dominique VOYNET et M. Richard YUNG,
Je lance donc un appel pressant au servies recherches de la gendarmerie nationale car tous ces vaillants parlementaires ont disparu corps et âmes. Ou alors ils sont devenus muets… A moins que les grands frères leurs aient imposé le port de la burqa mentale…
Les travaux du Sénat
C’est en effet bien dommage que les auteurs de cette proposition de loi n’osent plus ouvrir leur bec, car ils disaient de choses intéressantes.
D’abord, ce petit rappel : « La maternité pour autrui constitue probablement une pratique séculaire permettant de remédier à l'infertilité d'une femme ».
Ils posaient ensuite les termes de l’évolution scientifique, et la question du droit : « Longtemps tolérée, parce que pratiquée de manière occulte, dans le secret des familles, elle n'en remettait pas moins en cause l'adage « Mater semper certa est » : la mère, désignée par l'accouchement, était toujours certaine, à la différence du père. Mais les progrès de la génétique permettent désormais de désigner celui-ci de manière tout aussi certaine, ce qui constitue en soi une première révolution pour le droit de la filiation, qui peut désormais s'appuyer sur la vérité biologique dans les deux lignes maternelle et paternelle. Néanmoins, dans la plupart des États occidentaux, la règle selon laquelle la maternité légale résulte de l'accouchement demeure l'un des fondements de la filiation, alors que la paternité légale repose encore essentiellement sur un acte de volonté du père, la vérité biologique n'étant pas vérifiée en l'absence de contestation ».
Eh oui : les progrès de la génétique rendent possible la dissociation entre maternité génétique et maternité utérine. Pas besoin d’être « le papa » ou « la maman » pour être « Papa » ou « Maman ».
Ils expliquent : « Depuis une vingtaine d'années, les techniques d'insémination artificielle et de fécondation in vitro permettent en effet à une femme de porter un enfant conçu en dehors de tout rapport charnel, avec les ovocytes d'une autre femme. Ainsi, ces nouvelles connaissances, qui donnent la certitude de la filiation biologique, permettent également de contredire les règles de la nature et contraignent à raisonner autrement en matière de filiation, non plus à partir de ces règles, mais à partir de principes éthiques ».
Ce qui conduit à distinguer la procréation pour autrui de la gestation pour autrui.
La gestation et la procréation pour autrui sont des pratiques prohibées en France, avec des sanctions civiles et pénales, et les couples se rendent dans les pays étrangers qui acceptent la GPA. Mais, déplore le texte, « ils ne peuvent faire inscrire leur enfant à l’état civil, vu la prohibition légal rappelée par la Cour de cassation le 17 décembre 2008 ». En clair : la loi punit les enfants, et les prive du droit fondamental à une filiation.
Le Sénat a constitué un groupe de travail, qui a procédé à de nombreuses auditions et à l’étude des régimes étrangers acceptant cette technique,… avant de pondre, par les voies naturelles, une excellente proposition de loi.
La proposition de loi
Principe
Seuls pourraient bénéficier d'une gestation pour autrui les couples composés de personnes de sexe différent, mariées ou en mesure de justifier d'une vie commune d'au moins deux années, en âge de procréer et domiciliées en France. La femme devrait se trouver dans l'impossibilité de mener une grossesse à terme ou ne pouvoir la mener sans un risque d'une particulière gravité pour sa santé ou pour celle de l'enfant à naître. L'un des deux membres du couple au moins devrait être le parent génétique de l'enfant.
La femme porteuse
Seule pourrait porter en elle un ou plusieurs enfants pour autrui, la femme majeure, domiciliée en France et ayant déjà accouché d'un enfant au moins sans avoir rencontré de difficulté particulière durant la grossesse puis l'accouchement. De surcroît, une femme ne pourrait ni porter pour autrui un enfant conçu avec ses propres ovocytes, ni porter un enfant pour sa fille, ni mener plus de deux grossesses pour autrui.
Le contrôle de l’Agence de la Biomédecine
Les couples désireux de bénéficier d'une gestation pour autrui et les femmes disposées à porter en elles un ou plusieurs enfants pour autrui devraient obtenir l'agrément de l'Agence de la biomédecine, cet agrément étant destiné à vérifier leur état de santé physique et psychique.
La garantie du juge judiciaire
Le texte subordonne le transfert d'embryons à une autorisation du juge judiciaire. Il fixerait également la somme devant être versée par le couple bénéficiaire à la gestatrice afin de couvrir les frais liés à la grossesse qui ne seraient pas pris en charge par l'organisme de sécurité sociale et les organismes complémentaires d'assurance maladie. Cette somme pourrait être révisée en cas d'événement imprévu au cours de la grossesse.
Respect pour l’IVG
Il appartiendrait à la gestatrice et à elle seule de prendre, le cas échéant, toute décision relative à une interruption volontaire de la grossesse.
Clause d’irresponsabilité
Enfin, le texte fait interdiction aux membres du couple bénéficiaire d'une gestation pour autrui, ou à l'un d'entre eux, d'engager une action en responsabilité à l'encontre de la femme ayant accepté de porter en elle un ou plusieurs enfants pour leur compte.
Et donc ?
Voici un excellent texte. Il prend en compte des réalités humaines et affectives, fixe des garanties objectives, instaure le contrôle de l’Agence de Biomédécine et du juge judiciaire, et recadre la responsabilité. Nickel.
Bien loin des cris des allumés du moment… Mais là, la liste est trop longue. Le grandiloquent nerveu de la Mairie de Paris parle de barbarerie... Une mention quand même au capitaine de Tombouctou qui est « fermement opposé à la GPA» mais qui approuve la circulaire de sa ministre facilitant la régularisation de la GPA.
Mais pourquoi ont-ils si peur des enfants ?