L'UMP : "Un grand moment de démocratie" !

A l'heure où j'écris ces lignes, Le Monde titre : Chaos à l'UMP, et constate que "l'opposition est sans leader".

De fait, on ne sait pas encore qui de Jean-François Copé ou de François Fillon va être élu président du parti. C'est la Commission d'organisation et de contrôle des opérations électorales (Cocoe) qui le déterminera. Il n'est pas besoin d'attendre sa décision pour constater quelques évidences.

Que Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, n'ait plus le front de se présenter ou d'être vanté comme un organisateur hors pair quand un tel fiasco honteux pour la droite sarkozyste survient ! Au moins sur ce plan, la cause est entendue maintenant.

Alain Juppé joue au grand sage et énonce que Copé et Fillon sont obsédés par 2017. Mais quelle aigreur et quelle nostalgie de sa part ! Il aimerait tellement être encore plausible dans cette course ! Et Jean-Pierre Raffarin avec sa fausse objectivité partisane et sectaire !

Il y a eu des fraudes comme François Fillon et ses partisans le craignaient. Peut-être des deux côtés, mais tout de même quelle indignité que cette élection dominicale qui a mobilisé beaucoup d'adhérents mais donné une triste image de l'intégrité du processus électoral. Il n'y avait vraiment aucun motif de se gausser des socialistes !

En dépit de quatre motions sur six, notamment l'inénarrable Droite forte, quel que soit le résultat définitif, François Fillon sera parvenu à distraire une bonne moitié d'adhérents de cette UMP chauffée à blanc en parfaite correspondance avec la fin de campagne cynique de Nicolas Sarkozy. Ce n'est pas rien et cela permet de ne pas totalement désespérer de la droite à venir même si l'ancien Premier ministre a été tenté un temps - d'où sans doute une illisibilité momentanée de son positionnement - de se placer sur le terrain de Copé et de sa surenchère délibérément provocatrice.

Apparemment Jean-Louis Borloo et l'UDI, même si François Fillon est président, vont se sentir pousser des ailes. Un tel désastre à l'UMP a de quoi rendre même un centrisme guère indépendant séduisant pour les moins obtus des conservateurs.

Marine Le Pen, avant même que nous tombions en plein vaudeville, avait annoncé ce que serait cette élection et cette nuit. Et les quatre ans à venir qui seraient "un enfer"(LCI). Sur l'élection et la nuit, au moins elle avait totalement raison. Avec son parti, elle ne peut que s'enthousiasmer devant une opposition classique qui lui offre de telles perspectives, avec un risque de dislocation de l'UMP ou une envie, pour certains, de rejoindre le FN.

David Assouline, même s'il est très peu doué, quoique sénateur, pour être un porte-parole convaincant du PS, affirme que celui-ci ne se réjouit pas de cette déconfiture. On n'est pas obligé de le croire et le PS aurait bien tort de ne pas s'en féliciter. Ce n'est pas tous les jours que l'adversaire vous offre de tels cadeaux.

Mon cauchemar : que ces péripéties dans tous les cas déplorables pour l'UMP portent sur un pavois Nicolas Sarkozy pour la primaire de 2016 (sauf cataclysme judiciaire). Il serait dramatique pour la droite et pour la France que la première, pour sauver la seconde, ne puisse avoir recours qu'à celui qui en a détruit les fondements honorables durant cinq ans. Que François Fillon ne se laisse pas abattre, rien que pour nous faire échapper à ce retour.

Je répète que 60% des votants en faveur de François Hollande n'étaient pas socialistes. Que le président ne l'oublie pas et ne se recentre pas que sur les seuls plans économique et financier ; qu'il n'abandonne pas le sociétal aux farfelus de la modernité...

Devant un tel tableau, Rachida Dati, avec son intelligence et sa lucidité habituelles, a osé évoquer "un grand moment de démocratie" !

On rit ou on pleure ?