Actions sur le document

Des seins qui prennent froid

Justice au singulier - philippe.bilger, 6/03/2013

Quelle misérable époque qui s'esbaubit face à l'intelligence ainsi pervertie, à la révolte ainsi dévoyée et à la féminité ainsi dégradée ! Mais je persiste en oubliant les Femen : le sexe est beaucoup plus important qu'on le dit.

Lire l'article...

Il y a des magazines qui, à la devanture des kiosques, posent des questions cruciales, par exemple celle-ci : Le sexe est-il aussi important qu'on le dit ?

J'ai envie de répondre qu'il est encore plus important qu'on l'assure, qu'il est la substance même de nos vies et met au centre de l'existence le plus beau sentiment qui soit, à la fois attente, espérance, élan et fragment d'éternité : le désir. Sortir de soi, pas pour se fuir mais pour se retrouver enrichi d'un miracle.

J'ai eu envie de répondre cela à cette pressante interrogation mais, tout de suite, je ne sais pourquoi, j'ai songé aux Femen et à leurs ridicules et pitoyables prestations.

Leurs poitrines dénudées et peintes. Leurs seins qui prennent froid au lieu de nous donner chaud. Le triste et satisfait étalage d'une féminité s'efforçant de disparaître derrière un dévoilement intempestif et y parvenant trop bien.

Je sais bien que la modernité stupide applaudit d'abord toutes les prétendues avancées, surtout quand elles ont l'habileté ou l'audace conformiste de s'affirmer féministes alors qu'elles tuent le féminisme authentique, avant de se demander à quoi elles servent.

Les Femen fournissent à l'extase contemporaine de quoi se dégrader encore davantage.

Parce que ces femmes ont pris l'habitude de revendications à la fois pacifiques mais agressives (20 minutes), qu'on regarde leurs seins sans être émus, qu'on lit leurs slogans et écoute leurs cris sans être le moins du monde touchés, qu'on les considère comme l'expression la plus achevée, quoique heureusement minoritaire, d'un monde en décomposition, il faudrait les célébrer.

Elles vont même avoir droit à une émission de télévision et à l'initiative de qui, devinez ? De Caroline Fourest évidemment. Rien de ce qui est féminin ou islamiste ou FN ne lui est étranger : le stupéfiant est que le service public accueille ses obsessions (France 2).

Qui peut, homme ou femme, être une seconde convaincu par ces navrantes manifestations qui viennent un jour profaner Notre-Dame de Paris, sans pouvoir l'enlaidir, pour s'en prendre au pape - quel courage incroyable !- et qui demain se tourneront vers d'autres pantalonnades ? Le comble est le sérieux que certains réussissent à garder devant l'irruption d'une telle bêtise nue et fière d'elle dans notre espace commun. Pour leur message qui serait "universel", le mieux n'est-il pas d'en rire ? Ou de s'en désintéresser ? Pour qu'il rejoigne l'immense vivier des élucubrations nées des provocations sans cause.

Il paraît que les seins seraient leurs armes. Qu'elles ne se fassent pas de souci, elles auront le champ libre.

Quelle misérable époque qui s'esbaudit face à l'intelligence ainsi pervertie, à la révolte ainsi dévoyée et à la féminité ainsi dégradée !

Mais je persiste en oubliant les Femen : le sexe est beaucoup plus important qu'on le dit.


Retrouvez l'article original ici...

Vous pouvez aussi voir...