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PMA et GPA, « parlez-moi de moi, y’a que moi qui m’intéresse » ! (555)

Planète Juridique - admin, 8/02/2014

La coupe est pleine : une nouvelle fois le souhait de certains - ou de ceux qui parlent en leur nom - d'être parents à tout prix phagocyte le débat public au point de paralyser toutes les évolutions qui s'imposent … Continuer la lecture

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avocats006(1)La coupe est pleine : une nouvelle fois le souhait de certains - ou de ceux qui parlent en leur nom - d'être parents à tout prix phagocyte le débat public au point de paralyser toutes les évolutions qui s'imposent de longue date dans le champ du droit de la famille. Il serait temps de retrouver un peu de raison en imposant les priorités et en ne se laissant plus impressionner  par ceux qui - et on les comprend - aspirent à être parents, pardon  à "avoir" un enfant.

On a déjà connu cette pression  de la part des "candidats à l'adoption" qui aspiraient à satisfaire leur désir d'enfants. Ils ne comprenaient  pas ou difficilement que l'Aide sociale à l'enfance ne leur "fournisse" pas en nombre et en qualité les enfants qu'ils entendaient accueillir. Encore aujourd'hui cette difficulté existe. Quelques 15 000 demandes d'adoption sont enregistrées dans les conseils généraux. En couple ou célibataires ces personnes souhaitent généralement accueillir un enfant de 3 mois, de type européen, en bonne santé. Or les pupilles de l'Etat - les enfants sans famille adoptables - ne sont aujourd'hui, et on s'en réjouit, que quelques 2 300 contre 40 000 en 1060 et 20 00 en 1980, ils ont plutôt âgés - 7 à 9 ans - , souvent de couleur, parfois porteurs de handicaps et en fratrie. Le déphasage est réel. Les candidats sont déçus des délais d'attente qui leur sont présentés et les pouvoirs publics de ne pas trouver  comme ils le souhaiteraient des personnes ou des familles susceptibles d’accueillir les enfants qui sont sans famille et condamnés à demeurer pupilles de l'Etat.

Et les candidats à l'adoption déçus de se tourner vers l'adoption transnationale où d'autres difficultés se présentent qui ne garantissent pas une réponse. Certains n'hésitent pas à franchir la frontière de la légalité pour se "procurer " l'enfant tant attendu.

Dès lors les mêmes en arrivent à fonder leurs espoirs sur la PMA ou la GPA.

Il n'est pas question, aujourd'hui pas plus qu'hier, de nier la souffrance de ceux qui ne peuvent pas être parents à la hauteur de leurs désirs. Mais cette revendication de l'enfant doit, comme toute aspiration à la reconnaissance d'un droit, s'inscrire dans une problématique sociale collective.

En vérité si on veut bien décrypter le discours ambiant, on ne parle depuis des mois que pour les adultes qui aspirent à avoir un enfant. "Parlez-moi de moi, y'a que moi qui m’intéresse" ... et trop c'est trop ! C'est une hypocrisie de mettre les enfants à naître en avant et de les prendre en otage.

avocat_jeunePlus grave. Sous la pression et le pilonnage de cette revendication qui ne concerne que  relativement peu de personnes dans le pays, on laisse côté les questionnements qui sont massivement devant nous. On perd le sens de la relativité.

Ainsi 1,5 million d'enfants vivent avec des adultes qui ne sont pas leurs géniteurs. Ce sont donc quelques 3 à 5 millions d'adultes qui s'inscrivent dans l'univers de la famille recomposée. Pour tous ceux là, les adultes certes qui doivent savoir quelles sont leurs responsabilités, mais les enfants aussi qui doivent savoir quelle autorité respecter, il faut clarifier les termes modernes de la responsabilité parentale qui aujourd'hui est partagée, qu'on le veuille ou pas, du fait des pratiques matrimoniales des adultes.

Depuis 15 ans l'adaptation de notre droit sur ce point précis est paralysée par la crainte de reconnaitre l'homoparentalité (projet Morano avorté sous la présidence Sarkozy) et aujourd'hui encore par les exocets adressés à feu roulant et avec succès sur le projet de loi Famille : certains lui reprochaient de  refuser de ne pas prendre en compte la PMA et au-delà la GPA ; d'autres d'être en réalité le cheval de Troie de ces techniques de procréation. Exit donc la loi Famille qui entendait aborder entre autres la seule question qui vaille : la co-responsabilité.

Plus que jamais il est urgent de voter une disposition législative qui consacre les responsabilités des tiers à l'égard d'enfants qu'ils élèvent sans pour autant déposséder les  parents biologiques et juridiques. Rien de plus simple à faire si l'on veut enfin s'y consacrer sereinement.

Escamoté aussi le souci de répondre à tant de parents qui ne savent plus ce qu'ils sont légitimes à faire pour faire grandir leurs enfants  quand trop confondent autorité et violence et se sentent dépossédés quand on leur avance qu'on peut éduquer un enfant sans le battre. Doit-on rester l'un des derniers pays d'Europe à ne pas condamner les châtiments corporels ? Disparu le débat sur les atteintes à l'intégrité physique de l'enfant non justifiées par des maisons médicales (excision, circoncision, etc.) lancé par le Conseil de l'Europe.

Bien d'autres problématiques sont aujourd’hui paralysées comme l'accès des enfants à la connaissance de leur origine, y compris dans les cas d'adoption plénière, la reconnaissance des différentes affiliations de l'enfant, le droit des enfants de pouvoir faire la preuve de leur identité par l'octroi d'une carte d'identité, le droit d'être majeur avant l'âge en demandant leur émancipation, de saisir le juge aux affaires familiales en cas de conflit parental, etc. Tout simplement d'être mieux entendus en justice et de se faire rendre justice quand ils sont victimes. Que dire du statut des jeunes majeurs qui est à reconstruire ?

PetitjugeA la trappe l'idée de permettre aux enfants d'exercer personnellement  leurs droits - la capacité juridique  de l'enfant notamment à partir de 13 ans - avec le souci de mieux les responsabiliser quand dans le même temps on n'hésite pas à les condamner, y compris comme des adultes à partir de 16 ans .

On ne parle plus d'aborder les questions majeures de la liberté de religion, de réunion et d’association et d'une  manière générale de l'engagement citoyen qui  demain doit  gager une meilleure démocratie.

Plus largement, le nez collé à cette préoccupation majeure pour une minorité que sont la PMA et la GPA, personne ne se préoccupe des politiques publiques en direction des familles et de l'enfance. Ainsi la France patrie autoproclamée des droits de l'homme est absente de la démarche qui conduit à ouvrir aux enfants des recours internationaux contre la violation de leurs droits en refusant de ratifier le 3° protocole additionnel à la Convention internationale des droits de l'homme. L'Allemagne l'a fait, pas nous  ! Quel courage pour le pays qui en 1990 était le premier des Quinze composant alors l'UE à ratifier la Convention  ! Qui a suivi le refus du gouvernement de s'engager dans cette voie ? Dans le même temps on se targue de respecter les droits de l'enfant. L'enfance n'est même pas un objet de politiques publiques. Où sont le ministère de l'enfance souhaité par le réseau associatif et le code de l'enfance annoncé par la ministre de la justice?

Bref, même si certaines dispositions de ce que la loi Famille abattue avant décollage se préparait à proposer étaient adoptées - discours du premier ministre et souhait de députés PS - on aura perdu à cause de ce débat chronophage la dynamique de prise en compte globale des droits de l'enfant avec toutes les préconisations concrètes qui en découlaient et que nous pensions réactivée après tant d'années de déclin. (Voir blog 554)

Ce débat centré sur le nombril de certains en quête de maternité ou de paternité nous aura globalement coûté cher.

Il est temps de se reprendre. Et déjà, de la part des politiques, de laisser de côté les enjeux politiciens pour garder à soi un certain électorat ou pour combattre le gouvernement en place.

016Dans la vie il  faut savoir hiérarchiser les urgences. La reconnaissance de l'homoparentalité doit progresser - on peut être homosexuel et bon parent -, mais les enjeux majeurs du moment sont ailleurs : la condition familiale, la prise en compte de l'enfant sujet de droit avec en arrière fond les équilibres démographiques, les termes de la citoyenneté, nos engagements internationaux, etc.

Il ne suffira pas de mettre ces rappels sur le compte de l'homophobie pour contester ces réalités. PMA et GPA, halte au feu !

(1) Rapport du groupe de travail sur les nouveaux droits  dans le cadre du travail préparatoire à la loi Famille "De nouveaux droits aux enfants ? Oui, dans l'intérêt même des adultes et de la société", 121 propositions


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