Fraude au séjour et vie privée et familiale
Planète Juridique - admin, 3/11/2014
Code Lexis-Nexis 2014, C. étrangers, art. L. 313-11, L. 511-1 et Annexe 3
En dissimulant une procédure de divorce, un étranger commet une fraude dès lors que, en se remariant avec une de ses compatriotes, il ne peut plus bénéficier du droit automatique de séjour qui était attaché à son mariage avec une ressortissante française. Selon une jurisprudence encore rappelée le 16 octobre 2014, le préfet était normalement fondé à retirer le titre de séjour obtenu par fraude sans autre considération (CAA Paris, 16 oct. 2014, n° 14PA01523, Préfet de police : « il appartenait donc au préfet de police (…) de faire échec à cette fraude et de retirer la carte de séjour temporaire »).
Le lendemain de ce rappel, le Conseil d’État a modifié l’état du droit. Il a estimé que l'intéressé était présent en France depuis plus de dix ans, qu'il y exerçait légalement une activité de commerçant et que, depuis son remariage, il avait eu trois enfants. De nombreuses attestations témoignaient par ailleurs de la bonne insertion de sa famille.
En appliquant dans toute leur rigueur les principes qui régissent le retrait des actes administratifs, le Conseil aurait mis en échec un traité international, en l’espèce l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme. Il a donc estimé qu’il incombait au préfet de s’assurer que le retrait d’un titre de séjour et l’obligation de quitter le territoire édictée en conséquence ne portait pas une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé.
Si elle doit tenir compte de la nature, de la durée et des circonstances d’une fraude avérée, l’administration doit désormais prendre en compte tous les éléments relatifs à la vie privée et familiale, fussent-ils postérieurs à des manoeuvres se rapportant à une période entachée par une fraude. Tel était le cas dans l’affaire jugée : la dissimulation d’un divorce avait permis au requérant de se maintenir en France et de nouer des liens familiaux et privés (CE, 17 oct. 2014, n° 358767, Ministre Int., annulation du refus de séjour et de l’obligation de quitter le territoire).