Arrêt « Google Spain» (CJUE 13 mai 2014, C131/12) : Les juges communautaires soumettent Google à la Directive " Données Personnelles " (95/46)
K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Matthieu Bourgeois, Amira Bounedjoum, 23/05/2014
En faisant (nettement) prévaloir la protection de la vie privée et des données à caractère personnel, les magistrats communautaires sont allés bien au-delà des pronostics de certains praticiens, en reconnaissant l'existence d'un droit au déréférencement, dans lequel certains verront la consécration d'une forme de "droit à l'oubli" numérique.
A. Les faits à l’origine de cette décision
Une personne physique (de nationalité espagnole) avait constaté que, en renseignant son nom dans le formulaire de requête du moteur Google, apparaissaient des liens vers les pages d’un quotidien ancien (paru en 1998), faisant état d’une vente-aux-enchères immobilière liée à une saisie pratiquée en recouvrement de ses dettes de sécurité sociale.
S’étant adressée sans succès aux sociétés Google Spain et Google Inc. pour leur demander de supprimer ses données, cette personne s’est ensuite adressée à l’agence espagnole de protection des données (l’« AEPD »). S'étant vue ordonnée de supprimer les liens litigieux, Google a formé un recours devant la juridiction supérieure espagnole (l’« Audiencia National »), qui a alors interrogé la Cour de Justice de l’Union Européenne (« CJUE »), d’une série de questions préjudicielles.
B. Les questions préjudicielles et les réponses de la CJUE
1. L’activité d’un moteur de recherche doit-elle être qualifiée de « traitement de données à caractère personnel » ?
"Oui", répond la Cour qui a précisé que cette qualification s’applique peu important que certaines des informations traitées ne contiennent pas de données personnelles et/ou aient été « déjà publiées telles quelles dans les médias » (points 28 à 30).
2. L’exploitant du moteur de recherche doit-il être considéré comme « responsable du traitement » ?
"Oui", selon la Cour qui considère que l’exploitant du moteur de recherche « détermine les finalités et les moyens de cette activité et, ainsi, du traitement (…) qu’il effectue » (point 33).
3. L’entité du moteur de recherche installée dans un Etat membre peut-elle être considérée comme un « établissement » local de nature à entraîner l’application du droit national de cet Etat ?
"Oui", répond la Cour qui considère que le traitement des données est effectué dans le cadre des activités de la société Google Spain qui a en charge les activités de commercialisation de publicité ciblée aux habitants de cet Etat (l'Espagne) - les fameux "AdWords" - qui « constituent le moyen pour rendre le moteur de recherche (...) économiquement rentable » (point 56).
4. L’autorité nationale peut-elle ordonner au moteur de recherche qu’il procède au déréférencement sur les pages de résultats d’informations publiées par des tiers, sans s’adresser préalablement à ces tiers, et ce y compris lorsque de telles informations ont été publiées légalement ?
"Oui" selon la Cour, qui relève qu’un tel traitement « se distingue de et s’ajoute à celui effectué par les éditeurs de sites web et affecte de manière additionnelle les droits fondamentaux de la personne concernée » (point 83). La Cour ajoute que si une demande de suppression adressée aux éditeurs était requise préalablement à toute demande de déréférencement, une protection efficace et complète des personnes concernées ne pourrait être réalisée (point 84).
5. Une personne dispose-t-elle d’un droit à obtenir la suppression de liens dans les pages de résultats d'un moteur de recherches, et ce alors même qu’il s’agirait d’informations publiées légalement par des tiers ?
"Oui" répond la Cour, sauf en cas de « raisons particulières, telles que le rôle joué par ladite personne dans la vie publique » (point 99).
Extrait des Chroniques Juridiques du Blog kpratique, cliquez ici pour lire l'article dans son entier
Une personne physique (de nationalité espagnole) avait constaté que, en renseignant son nom dans le formulaire de requête du moteur Google, apparaissaient des liens vers les pages d’un quotidien ancien (paru en 1998), faisant état d’une vente-aux-enchères immobilière liée à une saisie pratiquée en recouvrement de ses dettes de sécurité sociale.
S’étant adressée sans succès aux sociétés Google Spain et Google Inc. pour leur demander de supprimer ses données, cette personne s’est ensuite adressée à l’agence espagnole de protection des données (l’« AEPD »). S'étant vue ordonnée de supprimer les liens litigieux, Google a formé un recours devant la juridiction supérieure espagnole (l’« Audiencia National »), qui a alors interrogé la Cour de Justice de l’Union Européenne (« CJUE »), d’une série de questions préjudicielles.
B. Les questions préjudicielles et les réponses de la CJUE
1. L’activité d’un moteur de recherche doit-elle être qualifiée de « traitement de données à caractère personnel » ?
"Oui", répond la Cour qui a précisé que cette qualification s’applique peu important que certaines des informations traitées ne contiennent pas de données personnelles et/ou aient été « déjà publiées telles quelles dans les médias » (points 28 à 30).
2. L’exploitant du moteur de recherche doit-il être considéré comme « responsable du traitement » ?
"Oui", selon la Cour qui considère que l’exploitant du moteur de recherche « détermine les finalités et les moyens de cette activité et, ainsi, du traitement (…) qu’il effectue » (point 33).
3. L’entité du moteur de recherche installée dans un Etat membre peut-elle être considérée comme un « établissement » local de nature à entraîner l’application du droit national de cet Etat ?
"Oui", répond la Cour qui considère que le traitement des données est effectué dans le cadre des activités de la société Google Spain qui a en charge les activités de commercialisation de publicité ciblée aux habitants de cet Etat (l'Espagne) - les fameux "AdWords" - qui « constituent le moyen pour rendre le moteur de recherche (...) économiquement rentable » (point 56).
4. L’autorité nationale peut-elle ordonner au moteur de recherche qu’il procède au déréférencement sur les pages de résultats d’informations publiées par des tiers, sans s’adresser préalablement à ces tiers, et ce y compris lorsque de telles informations ont été publiées légalement ?
"Oui" selon la Cour, qui relève qu’un tel traitement « se distingue de et s’ajoute à celui effectué par les éditeurs de sites web et affecte de manière additionnelle les droits fondamentaux de la personne concernée » (point 83). La Cour ajoute que si une demande de suppression adressée aux éditeurs était requise préalablement à toute demande de déréférencement, une protection efficace et complète des personnes concernées ne pourrait être réalisée (point 84).
5. Une personne dispose-t-elle d’un droit à obtenir la suppression de liens dans les pages de résultats d'un moteur de recherches, et ce alors même qu’il s’agirait d’informations publiées légalement par des tiers ?
"Oui" répond la Cour, sauf en cas de « raisons particulières, telles que le rôle joué par ladite personne dans la vie publique » (point 99).
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