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Alain Finkielkraut tête de série !

Justice au singulier - philippe.bilger, 15/11/2013

D'autres suivront que j'ai sollicités et qui m'accorderont, s'ils le veulent bien, leur confiance. Au moins, ma tête de série ne les dissuadera pas de me suivre.

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Enfin !

Depuis quelques mois, je proposais à divers médias - télévision ou radios - un projet qui aurait consisté à poser à un certain nombre de personnalités une seule question, mais celle qui fâche, qu'on n'ose jamais formuler. C'était, à chaque fois, des réponses dilatoires ou franchement négatives. Avec présomption sans doute, je continuais à penser qu'il y avait dans mon envie une mine à creuser et le hasard qui est parfois bienveillant m'a facilité les choses.

En effet, grâce à une idée lumineuse de mon plus jeune fils, Jean-Baptiste, et à l'assistance technique très efficiente de mon neveu par alliance Rémi Duhautois, j'ai pu, à partir d'aujourd'hui, mettre en ligne une série d'entretiens vidéo qui pourront, dès publication de ce billet, être consultés et visionnés sur http://www.youtube.com/watch?v=jPMFwAXj5Ss

ou, plus simplement, en tapant philippe bilger alain finkielkraut sur le site You Tube.

Mais l'essentiel est moins dans la concrétisation de cette aspiration qui est mienne depuis le début de cette année et qui est probablement liée à mon Institut de la parole, que dans les motifs qui m'ont conduit à vouloir à tout prix engager ce processus.

En effet, j'étais probablement arrivé à un tournant de mon existence où, après avoir fourni des réponses en tentant toujours de les imprégner de sincérité, parfois au risque de la provocation - mais la vérité est rarement raisonnable ! -, j'éprouvais plutôt le désir de questionner, d'interroger, de laisser parler, de découvrir. Combien de fois, passionné par les émissions politiques et/ou culturelles, sérieuses ou de divertissement, même sportives, j'avais été frustré parce qu'il me manquait des éclairages essentiels, des réponses nécessaires, tout simplement parce que les journalistes n'avaient pas su, pu les faire advenir ou qu'ils les avaient trop vite réduits à la portion congrue par des interruptions intempestives et inutiles qu'ils confondaient avec l'intelligence de la contradiction ou l'audace du sujet.

A la longue, ce sentiment d'être toujours privé d'une nourriture intellectuelle fondamentale, d'une approche politique approfondie, parce qu'elles n'avaient pas eu droit de cité et d'esprit, est devenu tellement insupportable que je ne pouvais plus me résoudre à subir ces inévitables déceptions.

La conséquence de ce paysage médiatique appauvri est que paradoxalement les gens comme moi faisaient une fixation sur les remarquables portraits offerts en certaines circonstances par les magazines. Ils constituaient, réussis, une synthèse entre des entretiens incomplets, inachevés et fragmentaires et le rêve d'un questionnement totalement renouvelé. Je songe notamment à Judith Perrignon qui dans cet exercice - récemment encore avec Frédéric Taddéï - est incomparable. Il fallait donc se réfugier dans ces lectures pour avoir la chance d'appréhender, sans être privé, la totalité saisissable d'une personnalité.

Au coeur de ma démarche, il y a d'abord, très égoïstement, l'immense bonheur de découvrir, de rencontrer ou d'approfondir. Certaines personnalités, qui peut-être accepteront ces entretiens, sont inconnues de moi, d'autres, j'ai pu les croiser, voire les fréquenter, être liées à elles par des liens de cordialité ou d'estime ou me trouver à leur égard seulement dans une sorte de neutralité désireuse d'être enrichie par une relation directe et immédiate. Pour toutes donc, il y a l'obsession de savoir, d'analyser, de scruter, de bénéficier de la bonne volonté lucide et clairvoyante de personnes qui demeuraient dans mon panthéon personnel - aimées ou non - depuis longtemps. J'ai une fringale de ces humains-là. Quelque chose de plus fort que la sympathie. Etre l'explorateur de territoires inconnus ou médiocrement approchés. Les laisser se montrer. La grâce viendra d'eux.

Ce qui m'importe, ce sont leurs réponses. Aucune vanité pour laisser croire que l'interrogation est plus importante que ce qui va la suivre. La question n'est formulée qu'à cause de l'obligation où je me trouve, pour pouvoir prétendre ouvrir des portes et des esprits qui me sont étrangers même s'ils peuvent m'apparaître plus ou moins familiers, d'enclencher un processus modeste, courtoisement inquisiteur, seulement motivé par le souci de mieux comprendre et de mettre de la lumière là où trop souvent il y a de l'acidité idiote ou de la complaisance promotionnelle. C'est mon invité qui compte, c'est lui sur lequel exclusivement se portera ma concentration, mon attention. Je ne serai que le passeur heureux vers une réalité humaine , politique, culturelle, judiciaire, artistique que j'ai eu la faiblesse de privilégier. Que d'autres sont impatients de toucher de l'esprit.

Les classiques, les sulfureux, les atypiques, les emblématiques, les discrets, les "grandes gueules" comme les délicats seront, s'ils le veulent bien, dans mon vivier à partir du moment où ma dilection parfois paradoxale pour eux me les aura recommandés. Je peux leur garantir une écoute équitable, un questionnement urbain et, je l'espère, une curiosité de bon aloi. Au fond, je voudrais pouvoir montrer comment, à l'intérieur d'eux-mêmes, ça marche. Rien de plus extraordinaire que d'entrer dans la "machine" humaine pour que cette dernière nous guide vers là où il lui plaît de nous emmener. Et qu'elle ne soit pas mutilée par un "montage".

Je ne pouvais pas rêver d'une plus éclatante tête de série qu'Alain Finkielkraut qui m'a fait l'honneur, grâce à l'entremise de mon amie, la brillante, courageuse et nécessaire Elisabeth Lévy, de m'accorder ce premier entretien qui dure 38 minutes. Je l'ai entendu, retrouvé, écouté avec cette impression bienfaisante que je ne m'étais pas trompé dans mon admiration et qu'il offrait en toutes circonstances un élan, une sincérité, une profondeur, la passion de scruter au plus près la vérité, la complexité du monde, de la France, une aptitude indépassable au langage - heureusement il n'y a pas un Finkielkraut pour le commun et un pour les médias mais un toujours, pour tous.

D'autres suivront que j'ai sollicités et qui m'accorderont, s'ils le veulent bien, leur confiance.

Au moins, ma tête de série ne les dissuadera pas de me suivre.


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